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TITRE:

ARJEN ANTHONY LUCASSEN LE 30 NOVEMBRE 2007


TYPE:
INTERVIEWS
GENRE:

METAL PROGRESSIF



Juste avant la sortie du très attendue nouveau Ayreon « 01011001 », le génial géant batave s'est longuemment entrenu avec Cosmic Camel Clash de nos amis des Eternels et Struck…
STRUCK - 18.01.2008 -
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En effet, pour cette entrevue avec celui qui réussit à réunir la crème des chanteurs à chaque projet, il fallait bien la crème des interviewers : Cosmic Camel Clash de nos amis des Eternels (Les Eternels) et Struck…

Struck : Avant que « 01011001 » ne sorte, tu as titillé la curiosité des fans avec l'identité des invités. N'est-ce pas étrange de les mettre en avant plutôt que le contenu musical de l'album ?
Arjen Lucassen : Tu fais référence au concours du chanteur mystère qui a eu lieu sur le site officiel... c'était une blague au départ. Nous avions enregistré avec notre première chanteuse et le résultat était nickel... et nous nous sommes dit « Pourquoi ne pas poster ça sur le site et laisser les gens deviner de qui il s'agit ? Ca sera marrant. ». Nous avons donc posté sa voix sur le site... et tout autour du monde, des gens ont commencé à soumettre des noms !!
Nous avons recommencé avec le deuxième interprète et ça s'est étendu partout : on en a parlé sur Blabbermouth, tout le monde votait et il y a une masse de gens qui se sont inscrit sur le forum pour prendre part au truc.
Et ce jeu me plaisait : je collais un extrait avec Steve Lee... et qui s'attendrait à voir Steve Lee sur un album d'Ayreon ? Je me disais « celui-là, personne ne le trouvera » et, quelque part dans le monde, quelqu'un a trouvé, en une demi-heure. C'était juste un truc très cool à faire, une super manière de faire participer les gens au projet.

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Struck : Et combien de personnes ont participé, en gros ?
Arjen : C'est très dur à dire... mais énormément. Tu te rends compte que tous les chanteurs ont été identifiés en moins de vingt minutes, même les inconnus ? Même les guitaristes et les claviéristes ? Thomas Bodin des Flower Kings a été trouvé en moins d'une heure... C'est très dur de dire combien de gens ont participé, je sais juste que ça a très bien marché. Et je ne me suis pas vraiment préoccupé des conséquences, je n'ai pas pensé que ça pourrait nuire au projet si telle était ta question.

Struck : Donc à la base, c'était plus une blague qu'un acte commercial...
Arjen : Oui, mais au final ça a eu un impact commercial certain (Rires) ! Ca aurait pu être un plan de maison de disque !
En fait, nous sommes partis de quelque chose de tout petit et c'est devenu énorme, surtout quand des noms comme Hansi Kürsch, Jorn Lande et Daniel Gildenlöw ont commencé à faire surface. Les gens se disaient « wow, les choses se passent à fond ! ».

Struck : Avoir tellement de chanteurs, est-ce que ça ne rend pas le scénario plus complexe et le concept moins fluide ?
Arjen : En fait, ça a été assez difficile cette fois-ci car, au départ, je voulais faire un projet avec quatre ou cinq chanteurs. Donc je leur ai envoyé des e-mails et personne ne m'a répondu.
Alors, j'ai envoyé une autre volée d'e-mails, cette fois-ci à dix-quinze chanteurs en tout, puis à vingt... et pas une seule réponse. Je me disais « Oh merde Ayreon n'intéresse plus personne... ».
Et, d'un seul coup, en une semaine de temps, quinze chanteurs m'ont répondu qu'ils étaient motivés ! Je me suis retrouvé avec quinze chanteurs sur les bras du coup. Et on ne peut pas dire à un chanteur « Bon, ben, finalement je n'ai pas besoin de toi. » quand on l'a démarché à la base.
Donc, ce qui était initialement prévu comme un simple album est devenu un double et avant que je réalise vraiment ; tout ça est devenu beaucoup plus gros que ce que j'avais anticipé. Il a fallu que j'écrive une histoire qui convienne à toutes ces voix, et j'ai créé cette histoire où dix des dix-sept chanteurs appartiennent à une race alien appelée Forever et les sept autres incarnent des humains.
D'une certaine manière tout ça se tient très bien : ça fonctionne dans les chansons et c'était censé se dérouler comme ça dès le départ. En fait, ça n'a pas été réellement compliqué : la partie compliquée a été de trouver la bonne place pour chaque chanteur, mais une fois ça défini, tout a fonctionné comme prévu.

Struck : Est-ce que les histoires de science-fiction et les space-operas te donnent plus de liberté en tant que songwriter ?
Arjen : Mmmh... (il réfléchit) oui, car c'est une manière de raconter des histoires en étant très critique à propos de ce qui se passe dans le monde sans se retrouver à prêcher directement. Présenter un discours critique sous la forme d'une histoire de science-fiction permet aux gens qui ne veulent pas lire entre les lignes de ne pas le faire, ils peuvent se contenter de lire une chouette histoire.
Prends Star Trek : on peut regarder les épisodes et les apprécier en tant que tels mais il y a toujours un message derrière, qu'on peut choisir de considérer ou pas. C'est en gros ce que je voulais faire : je pensais à toute la merde qui arrive dans le monde et qu'on peut voir tous les jours à la télé. Tel groupe croit en tel dieu, tel autre groupe croit en tel autre dieu et ils se battent car ils veulent que tout le monde croie au même. Ca n'a aucun sens ! Et on regarde la télé, on voit tout ça se produire et pour nous c'est déjà devenu normal.
Mais je me demande toujours ce que penserait un extra-terrestre qui regarderait notre planète : une planète parfaite, toute cette eau, les substances les plus rares de la galaxie, le soleil pile à la bonne distance, tout est magnifique... que penseraient-ils en nous voyant ? « Mais qu'est-ce que vous faites, là ? Et pourquoi ? » (Rires).
Si on met tout ça dans un concept de science-fiction on peut le faire sans être ridicule, et c'est pour ça que j'utilise cette approche plutôt que de partir dans la critique sociale directe où on prêche, « Vous devez vous amender »... car je déteste ça dans la musique en général.
Mais j'aime quand il y a plusieurs niveaux de lecture.

Cosmic : Tu viens de dire que tu as écrit l'histoire autour des chanteurs et pas le contraire. Or « 01011001 » est la suite d'« Into The Electric Castle »... était-ce donc voulu depuis le début ou est-ce arrivé en cours de route ?
Arjen : Je commence toujours par écrire la musique, puis je laisse la musique m'inspirer pour l'histoire. Cette fois-ci, ça sonnait très spatial, avec tous ces synthétiseurs et cette atmosphère très sombre et glauque... donc je savais que ça devait être une histoire de science-fiction et que ça devait être assez sombre.
L'histoire d'« Into The Electric Castle » est très simple en fait, c'est un album très bateau si on y regarde de plus près : ça parle d'amour, d'aliens et d'un château électrique ! C'est assez bébête en fait, tout en étant mignon : il y a ces aliens de la race "Forever" qui vivent sur la planète Y et ont perdu leurs émotions. Donc, on se demande à quoi ressemble cette planète et pourquoi leurs émotions ont disparu... se pourrait-il qu'il y ait un lien avec le fait qu'ils soient devenus dépendants de la technologie comme nous le sommes devenus ?
Je le vois autour de moi : les gens sont devenus dépendants de la technologie et tout va extrêmement vite, on est dans une logique d'accélération et d'amélioration continuelle. Je voulais lier ces deux choses, et j'ai oublié ta question (Rires).

Cosmic : (Rires) Quand as-tu réalisé que tout ça allait être la suite d'« Into The Electric Castle » ?
Arjen : Je me suis dit que ça pourrait être cool d'expliquer comment tout ça était arrivé, comment les émotions avaient disparu, ce qui s'était passé. La base du concept était celle-là, puis j'ai dégoté tous ces chanteurs et j'ai écrit l'histoire précise autour d'eux.
Je fais toujours les choses dans ce sens-là : si on le fait dans l'autre sens on est trop limité.

Cosmic : Sur la chanson « Web Of Lies » qui traite des relations sur Internet, les personnages joués par Simone Simons (Epica) et Phideaux Xavier (Phideaux) portent les noms de leurs interprètes. Jouent-ils leur propre rôle ? L'ambiguité entre interprète et personnage fait-elle partie du concept ?
Arjen : Non. Je me suis juste dit que ce serait amusant... j'ai dix aliens sur l'album, et sept humains. Je déteste devoir inventer des pseudonymes, je ne sais pas pourquoi. Et même pour les aliens : appeler tel alien Ziltoïd (Rire général), tel autre je ne sais pas quoi... ça me gonfle, je trouve systématiquement le résultat ridicule.
Donc, les aliens n'ont pas de nom mais des symboles, et chaque chanteur a pu choisir son symbole. Par exemple, Steve (Lee) a choisi le yin-yang, Jorn (Lande) voulait un corbeau... et pour les humains je me suis dit que plutôt que d'inventer des noms ils pouvaient utiliser les leurs. Mais ils ne jouent pas leurs propres rôles : Simone est une jeune fille magnifique et elle n'a pas besoin de draguer sur Internet, elle a déjà suffisamment d'admirateurs à la base (Rires).

Struck : Tu viens d'évoquer Ziltoïd, et durant une interview que nous avions réalisée avec Devin Towsend...
Arjen : (le coupant) Vous avez interviewé Devin Townsend ? Ca a dû être intéressant...

Cosmic : Oui, c'était justement pour la promotion de « Ziltoid The Omniscient »...
Struck : Il nous a donc dit qu'il préférait la voix de Céline Dion à celle de James LaBrie (Arjen rit). Serait-il envisageable d'entendre un jour Céline Dion sur un album d'Ayreon ?

Arjen : Jamais de la vie (Rires) !! Je ne l'aime pas du tout. Mais il devait blaguer, non ?

Cosmic : J'ai bien peur que non en fait.
Struck : Il nous a dit que la voix de James LaBrie ne le touchait pas du tout.

Arjen : Possible. Mais je ne n'emploierai jamais... je ne sais même pas son nom. Je ne veux pas le prononcer (Rires). C'est vraiment très mainstream. Ce n'est pas à cause de sa personnalité, c'est juste que ce type de musique m'entre par une oreille et sort par l'autre. Ca ne me touche pas, mais alors pas du tout. J'espère que vous n'êtes pas fans.

Struck : Non… Mais est-il envisageable de voir un jour des chanteurs français sur un album d'Ayreon ?
Arjen Lucassen : J'adorerais ça, oui : sur le dernier album j'ai des chanteurs qui viennent de partout dans le monde mais aucun Français. Le problème c'est que je n'en connais aucun. Je n'ai aucun chanteur masculin hollandais non plus d'ailleurs. C'est bizarre... tu peux m'en citer quelques chanteurs français ?

Cosmic : Des chanteurs français ? (se lançant dans une énumération qu’on qualifiera de CCCienne) En fait, ils sont plutôt typés « extrême » comme Hreidmarr d’Anorexia Nervosa, Joe Amoe de Nightmare , Joe Duplantier de Gojira et ce fou de Julien Cassarino qui chante dans Manima et , Psykup…
Arjen : (visiblement intéressé) Oh, oui...

Struck : En fait, ce qu’il oublie de te dire ; c’est qu’il est le manager de tous ces chanteurs (Rires). Sinon, pourquoi invites-tu tant de chanteurs métal d'ailleurs ?
Arjen : J'invite plein de chanteurs, mais en fait je n'arrive pas à convaincre des vocalistes en dehors des scènes métal et prog. Car « prog » et « métal » sont encore des gros mots : si j'essayais de démarcher Céline Dion, elle se braquerait dès que j'évoquerais ces genres. Pourtant, la notion de progressif est liée à celle d'ouverture et d'absence de limites, on peut tout tenter.
Donc, je continue d'essayer de démarcher des gens : j'essaye à chaque fois d'obtenir Kate Bush, Peter Gabriel, Ian Anderson (Jethro Tull), etc... je continue de tenter de les convaincre mais c'est toujours non.

Struck : Et comment convaincs-tu les chanteurs en général de participer à tes projets ?
Arjen : S'ils connaissent ma musique c'est facile : beaucoup de chanteurs apprécient ce que je fais et participent à cause de ça, ils me disent même qu'ils sont honorés d'y participer. Il y a aussi beaucoup de gens qui me démarchent : James LaBrie m'a fait savoir qu'il adorait Ayreon et qu'il voulait participer par exemple, ce qui est une manière géniale de procéder.
Convaincre des chanteurs qui ne connaissent pas ma musique est très difficile, surtout les gros noms. Ce n'est pas facile de les atteindre, il faut passer par les maisons de disque car on ne peut pas les contacter directement. Ce genre de chanteurs représente la réelle difficulté car ils refusent purement et simplement de prendre part au projet.

Struck : Tu les payes pourtant... pas assez peut-être ?
Arjen : Oui je les paye, et s'il le fallait je les paierais suffisamment. Je paierais David Bowie vingt mille euros sans sourciller pour qu'il apparaisse sur un de mes disques. Mais quelqu'un comme lui ne travaille pas pour l'argent, il n'en a plus besoin... et ça ne m'intéresserait pas de travailler avec quelqu'un qui ne serait motivé que par le cachet de toutes façons.
C'est une de mes règles d'or : si je sens que la personne n'est intéressée que par l'argent... bon, peut-être que si c'est Alice Cooper je ferais avec, j'admets (Rire général). Mais sinon c'est très important pour moi qu'ils apprécient la musique, qu'ils viennent chez moi, qu'ils donnent le meilleur d'eux-mêmes et qu'ils aient à coeur de rendre le projet meilleur.

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Cosmic : A la base il devait y avoir un chanteur de plus, et des rumeurs persistantes évoquent que ce dix-huitième homme devait être Udo Dirkschneider (U.D.O, ex-Accept). C'est vrai ?
Arjen : (surpris) Vraiment ? C'est la première fois que j'entends ça ! Il devait y avoir Roy Khan (Kamelot) mais il a eu des problèmes de voix durant sa tournée donc j'espère qu'il sera sur le prochain.
Au départ, je voulais huit humains car il y a huit chanteurs sur quatre chansons. Il fallait une voix féminine pour le refrain de la chanson avec Ty Tabor (King's X). Mais, au final, j'ai préféré utiliser ma voix. Il y avait beaucoup d'options, mais il n'y a personne dont j'ai enregistré la voix et que je n'ai pas utilisé au final.
Ca serait intéressant de travailler avec Udo sinon. Je ne sais pas si je pourrais lui écrire des parties mais je le connais : j'ai fait partie d'Accept pendant deux semaines (Rires). Je devais tourner avec eux donc nous avons répété durant deux semaines et au final ça n'a pas fonctionné car j'avais d'autres obligations. Donc je le connais bien.

Cosmic : L'artwork est comme toujours très soigné. Est-ce que le peintre Jef Bertels suit tes indications à la carte, ou est-ce que tu lui laisses une certaine liberté artistique ?
Arjen : Il s'approprie évidemment une certaine liberté car c'est un peintre et il fait les choses à sa manière. Mais il fait des concessions pour moi car ce qu'il aime le plus c'est dessiner des monstres et de petits bonshommes bizarres... et moi je n'aime pas ça, j'aime les immenses paysages.
Donc, il y a toujours négociation : « Je peux caser un ou deux monstres ici ou là? », et sur « Into The Electric Castle », il a eu l'autorisation de le faire. Mais pour « The Dream Sequencer », il s'agit d'une colonie sur Mars et je ne voulais pas de petit martiens. Il m'a donc donné une peinture sans monstre et sans créature étrange, je lui ai dit « Tu as réussi ! Tu as peint un tableau sans bébête étrange ! »...et il a répondu « Si si, ils sont planqués derrière le séquenceur, on ne peut pas les voir. » (Rires).
Pour « The Human Equation », je lui ai dit qu'il fallait des humains au milieu de la pochette... mais il ne fait pas d'humains, donc il a peint ce visage humain effrayé. Il m'a envoyé un preview du tableau et il y avait trois petits points au premier plan. Je lui ai demandé de quoi il s'agissait : « Dis donc, ces trois points, ce ne serait pas de petites creatures ? ». « Non non, ce sont, euh... des champignons... ». « Mouais... je ne vois pas de champignons, je pense que ce sont des petites créatures ! » Et finalement j'ai vu le tableau en entier et il s'agissait bien de trois petits bonshommes.
Pour le dernier album, je lui ai expliqué l'histoire, je lui ai dit qu'il s'agissait d'une planète totalement aquatique, qu'il fallait des machines qui sortaient de l'eau, une atmosphère sombre... Je lui ai donc dit qu'il pouvait y avoir des créatures mais que les gens ne devaient pas les voir, qu'ils devaient les imaginer.

Struck : Mais pourtant, sur la pochette de « Flight Of The Migrator », il y a un genre de gros monstre... (Rires)
Arjen : (Rires) Ca c'est moi, merci beaucoup! Mais ce n'est pas peint, c'est de l'infographie.

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Struck : Pourquoi l'album « Space Metal » de Star One n'est-il pas sorti sous le nom Ayreon ? Penses-tu qu'il a été moins exposé à cause de ça ?
Arjen : En fait, il y a toute une histoire derrière Star One. J'avais travaillé avec Bruce Dickinson pour « Flight Of The Migrator », et lors d'une interview que je donnais en Belgique il est venu me dire « J'adore ton boulot, mon manager aussi et je veux qu'on fasse un album ensemble. ». Et bien sûr j'étais pour (Rires).
Donc, nous avons discuté du contenu musical de l'album et il voulait quelques chose plus proche de Deep Purple, avec des sons spatiaux mais heavy quand même... j'ai donc commencé à composer. J'ai écrit quatre chansons, je les lui ai envoyées et il m'a dit qu'il aimait, que je devais continuer à composer et qu'il allait écrire des paroles pour ces quatre titres.
J'ai donc écrit le reste de l'album assez rapidement... et là j'ai fait un truc très stupide : j'ai dit aux fans que j'étais en train de composer un album avec Bruce Dickinson via ma mailing list. Avant que je réalise, tout Internet était au courant... et c'est arrivé jusqu'à son manager qui a tout annulé.
Donc, j'avais ces douze chansons heavy qui ne sonnaient pas vraiment comme du Ayreon : elles auraient pu s'intégrer à un album d'Ayreon mais elles ne pouvaient pas constituer un album d'Ayreon, car Ayreon est basé sur le mélanges des genres et ces titres étaient bien plus orientés métal dans l'ensemble.
Je ne savais pas quoi faire des ces chansons, donc j'ai décidé de faire un autre projet... j'ai donc démarché Russel Allen (Symphony X) et Damian Wilson (ex-Threshold) qui ont accepté tous les deux. Puis, en travaillant sur l'album, j'ai réalisé qu'il me fallait plus de voix, et c'est devenu Star One. Je ne le ressentais pas comme un album d'Ayreon, donc je ne l'ai pas appelé comme ça. Il est possible que j'en fasse un autre un jour, je ne suis pas sûr...

Cosmic : Collaborer de nouveau avec Bruce Dickinson un jour est donc totalement exclu désormais ?
Arjen : Malheureusement, oui. J'ai envoyé un message à Bruce en lui disant « Je suis désolé, je n'aurais pas dû faire ça, mea culpa. »... sachant que je ne savais pas à l'époque que je n'étais autorisé à parler du projet. Il ne m'a jamais répondu. Je l'ai appelé une fois ensuite, il était dans son avion et m'a dit « Y'a aucun problème, je te rappelle.», et je n'ai plus jamais eu de nouvelles depuis. C'est vraiment dommage.
Ce n'est donc pas quelqu'un avec qui j'aimerais travailler... sauf bien sûr s'il m'appelait pour me dire « Ce qui est fait est fait, tournons la page et faisons autre chose» (Ton amer). Mais bon, j'ai eu la chance de travailler avec M. Dickinson et c'est cool.

Struck : Si je veux créer mon propre projet musical, quel serait ton conseil pour rassembler autant d'invités ?
Arjen : Difficile à dire : j'ai fait mon premier album d'Ayreon à trente-cinq ans et j'avais une carrière musicale de vingt ans derrière moi durant laquelle j'avais rencontré énormément de gens, travaillé avec énormément de chanteurs... et on retrouve sur le premier Ayreon tous ces gens que je connaissais déjà. C'était mon avantage. J'avais beaucoup fait pour eux, je les avais toujours aidés quand ils en avaient eu besoin donc ils étaient prêts à m'aider pour le premier album. C'est comme ça que j'ai pu le faire. Sans ça, ça aurait été impossible. Si tu n'es personne, que tu commences à partir de rien et que tu espères décrocher de gros noms, tu peux oublier, ils ne feront pas. Certains accepteront peut-être si tu leur offres beaucoup d'argent, mais d'où vas-tu le sortir ?
Donc, tout ce que je peux te conseiller est d'être patient et de construire les choses petit à petit... et surtout prends plaisir à faire ce que tu fais. Ne le fais pas parce que tu penses que ça va te rapporter, fais-le car tu n'as pas le choix, car c'est ce que tu dois faire. C'est le genre de chose qu'on ne choisit pas, qui te tombe dessus.
Sois patient... c'est comme ça que j'ai toujours fait : je pars de petit, je veux faire un album avec quatre chanteurs... et ça grandit, ça grandit, ça grandit, et d'un seul coup c'est devenu un monstre. Donc sois patient et ne fais de concessions pour personne. Ne te dis jamais « C'est ce que les gens veulent, c'est ce qui est à la mode en ce moment.»... car le temps que tu sortes ton truc ça ne sera plus à la mode ! Ou alors ça sera encore à la mode mais quelqu'un l'aura fait en mieux. Essaye d'être unique dans ce que tu fais, car si tu fais la même chose sans arrêt ça n'intéressera personne.

Struck : Que voulais-tu faire quand tu étais enfant ?
Arjen : Ca a toujours été la musique. Comme je l'ai dit, je ne l'ai pas choisi, ça m'est tombé dessus. Je n'avais pas le choix, il n'y avait pas d'autre option.
Au début, j'étais trop paresseux pour apprendre à jouer d'un instrument donc je faisais du playback, je mettais la perruque de ma mère... je ne le fais plus aujourd'hui au cas où ça t'inquièterait !
Mais, c'est ça que je voulais : être sur scène, être la star et à un moment donné, j'ai entendu Ritchie Blackmore et j'ai su qu'il fallait que je joue de la guitare pour de vrai. J'ai donc commencé à jouer et là, j'ai su que c'était le seul choix possible.
Au début, mes parents me disaient « Tu es intelligent, pourquoi n'essayes-tu pas de faire ça ou ça ?». Mon frère est professeur, il a réussi dans la vie, etc...
Puis, j'ai commencé à faire de la musique et un jour mon père a lu un article sur moi dans son journal préféré. Au boulot, les gens lui parlaient de son fils aux longs cheveux qui ne faisait pas grand-chose, et d'un seul coup il y a eu cette énorme photo de moi dans leur journal, et là il a été fier de moi car il vu que je réussissais dans ce que je faisais.

Cosmic : En parlant de scène, une tournée d'Ayreon sera-t-elle envisageable un jour ?
Arjen : C'est impossible. Il y a vingt-cinq invités sur l'album, et ça a déjà été l'enfer de les faire venir dans mon studio pendant une journée individuellement.
Et, le plus gros problème concernant les concerts est qu'il faut répéter pendant au moins deux mois : comment serait-il possible de rassembler tous ces musiciens pour répéter pendant plusieurs semaines ? Et si on y arrive ; ce n'est pas pour faire un seul show, il faudrait donner une dizaine de concerts au moins pour rentrer dans les frais.
C'est trop dur, la seule manière que j'aurais d'y parvenir serait d'utiliser une production de type théâtrale et de faire appel à des chanteurs inconnus.

Cosmic : En tant que musicien et compositeur, qu'est-ce que ça te fait de sortir des albums qui ne seront jamais joués en concert ?
Arjen : En fait, ils ont tous été joués en concert... j'ai beaucoup de DVDs que des gens m'ont envoyé et où des chansons d'Ayreon sont jouées. Ils les jouent avec leur école, leur ensemble musical, leurs amis, etc. J'ai même vu des concerts donnés en prison, donc le public ne pouvait pas s'échapper.
Donc, presque tous mes albums ont été joués live et c'est génial à voir. Bien sûr, c'est fait de façon amateur... mais c'est vraiment le produit fini et le travail sur ce produit qui sont ma récompense.
Tenter de faire un album parfait, avec un artwork parfait, un DVD et tout... c'est ça que j'aime. Bien sûr, si quelqu'un pouvait mettre tout ça en place et en faire une superproduction je serais en larmes dans le public, c'est sûr (Rires) ! Mais ça n'arrivera pas, ce n'est pas assez mainstream, je pense. Peut-être que si j'arrivais à convaincre Céline Dion de chanter ; ça pourrait se faire (Rires).

Cosmic : Et en tant que musicien, la scène ne te manque pas ?
Arjen : Ca peut paraître bizarre, mais non. J'aime créer, et sur scène on ne fait que répéter la même chose sans cesse et jouer toujours les mêmes chansons. Au bout d'un moment, j'ai l'impression d'être un acteur qui joue son rôle.
Donc, non : je l'ai fait durant quinze ou vingt ans, j'ai pris du bon temps... mais ça ne me manque pas.

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Struck : Un dernier mot pour les fans français ?
Arjen : Si un jour je monte une production théâtrale pour Ayreon et que je peux tourner avec, j'aimerais vraiment silloner l'Europe avec et évidemment jouer en France. J'y ai donné quelques concerts avec mon side-project Stream Of Passion, nous avons joué à Paris et Strasbourg et les fans français écoutaient vraiment la musique. Quand on joue en Hollande le public saute partout, mais en France les gens écoutaient et regardaient avec beaucoup d'attention, et ensuite manifestaient leur goût pour tel ou tel truc.
Donc, si je joue live un jour, je veux vraiment revenir ici. (En français dans le texte) « Merci beaucoup pour l'interview » !


Plus d'informations sur http://www.ayreon.com
 
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