Salut Joe, peux-tu te présenter toi et ton groupe rapidement à ceux qui ne vous connaîtraient pas ?
Bah euh, écoute, je vais essayer de me présenter de la façon la plus simple possible. Je m’appelle Joseph Duplantier, n’est-ce pas, on m’appelle Joe en général. Je joue dans un groupe de musique -donc, je suis un être humain (Rires)- un groupe, voilà, qui s’appelle Gojira. Ca fait douze ans qu’on existe. Quand on a monté notre groupe, on était tout gamin, en 96, mon frère et moi. On était des fous de musique tout simplement, on enregistrait des démos, au bout de trois mois d’existence, on a avait déjà notre première démo puis une deuxième démo, six mois après, puis une troisième, puis une quatrième… On faisait des démos, quoi !
On n’était pas obsédé par devenir un groupe avec des supers photos, partir en tournée, gagner de l’argent avec… même ça, ça nous dépassait complètement. Le but, c’était d’enregistrer des cassettes, de créer quelque chose de solide… C’était la musique, le but quoi !
Aujourd’hui, on voit que ça a changé pour beaucoup de gens, y’en a qui sont dans le même état d’esprit et qui arrivent à se servir des outils de l’époque comme Myspace, YouTube et tous ces trucs qui sont très utiles pour se faire connaître et voilà… Mais, je pense qu’à l’époque, il y avait plus l’aspect… la musique était beaucoup plus sacrée, y’avait quelque chose qui était plus lointain, la réussite c’était quelque chose d’un peu plus compliqué à obtenir.
Donc, c’était pas notre premier but et on a mis cinq ans à penser à sortir notre premier album, en fait. Donc, c’était en 2001, on a sorti notre premier album : « Terra Incognita » enregistré en Belgique. Deux ans après, on a sorti un deuxième album : « The Link » qu’on a enregistré nous-mêmes, on a monté notre propre studio et ce studio nous a servi à faire aussi notre troisième, à mixer le son d’un DVD live qui est sorti et là, aujourd’hui, on sort notre quatrième album : « The Way of All Flesh » qui est sorti, il y a deux jours en France, qui va sortir dans toute l’Europe le 13, et aux Etats-Unis, le 14, ensuite, y’a une sortie en Australie, Japon… qui est en train de se mettre en place, voilà…
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L’actualité justement, c’est la sortie de « The Way of All Flesh » : peux-tu nous en parler ? Quel concept se cache derrière ce nouvel album : la mort comme le suggère la pochette et le titre du fabuleux « The Art of Dying » ?
Oui… Alors, oui, c’est la mort (Rires)… Mais bon, c’est un peu compliqué de répondre à cette question juste en deux mots, dire : « C’est la mort ! »….
… Oui mais pourquoi maintenant ? Tu te sens plus vieux ?
Oui (Sourire). Bah moi-même, j’ai passé la trentaine, y’a un an et demi et c’est vrai qu’à partir de mes trente ans… Ca fait sourire quand je dis : « Voilà, on vieillit. On parle de la mort… », et tous les gens se marrent bien parce que trente ans, c’est pas vieux ! Mais comment dire ? Quand on a vingt ans, quand même tout ce que l’on a connu, c’est d’être adolescent et la vingtaine… Quand on arrive à trente ans, on commence à se dire : « Tiens, je suis un adulte, je fais partie de ce monde, je suis en train d’accomplir quelque chose ou j’suis en train d’essayer de me former pour faire ce que j’aime dans la vie… ». Et tout d’un coup, on pense à la direction qu’on prend et vers quoi cette direction mène et bien, elle mène vers la mort quelque part…
Pour moi, ça n’a rien de morbide, c’est à dire, je crois en quelque chose au-delà de la mort, je crois en l’immortalité de l’âme, c’est vraiment quelque chose que je sens en moi, qui est une croyance personnelle, intime forte…
… Et les autres membres du groupe partagent cette croyance ?
Oui, on en parle beaucoup. Disons qu’on n’est pas tous exactement sur la même longueur d’onde, ça serait bizarre, on serait une sorte de secte, hein on va dire (Rires) !
Donc, on discute beaucoup, y’en a que ça effraie plus que d’autres de discuter de ça : « Ouhlala, attends, on va pas trop parler de ça parce que ça commence à foutre le vertige ! ». Moi, au contraire, ça m’excite, j’aime bien penser aux étoiles, à l’infini… et depuis le début du groupe, en fait, y’a comme ça beaucoup de questions dans notre musique qui sont posées.
On va dire qu’on a un tempérament assez rêveur et on aime laisser aller notre imagination, on aime bien parler des choses dont on n’est pas sûr comme les extraterrestres par exemple, les éventuelles planètes recouvertes d’océans quelque part, ça fait rêver, quels genres de monstres y’aurait dans ces eaux…
… Comme l’artwork de « From Mars To Sirius »…
Voilà. Donc je sais que si on prend des faits scientifiques, y’a des choses complètement hallucinantes comme la structure elle-même de l’univers, le big-bang, les amas de galaxies…
… Des thèmes assez aériens, en fait… Alors pourquoi les concrétiser par une musique aussi sombre et lourde, n’est-ce pas paradoxal ?
Oui, on pourrait dire qu’on est des esprits libres, légers capables de communiquer dans l’amour. Pourtant, quand on regarde la réalité des faits, on est réincarné dans des corps lourds, on s’entre-tue, y’a les guerres, y’a la politique, y’a la corruption, y’a la routine, y’a le train-train quotidien qui nous tue, y’a la pollution, les viols d’enfants… Pourquoi tout ça ?
Et c’est vrai que notre musique, elle est là, c’est comme si elle se calait à la vibration de la Terre comme nous, on la ressent en tant qu’être sensible, quoi !
Tes propos confirment qu’il y a une énorme réflexion derrière votre musique…
Alors, y’a une réflexion après coup. C’est à dire spontanément, on aime cette musique, on ne se l’explique pas.
Moi, quand j’allais au lycée, bon, j’ai beaucoup souffert du collège par exemple. Au collège, j’ai énormément souffert de l’attitude des autres enfants, je trouvais qu’il y avait beaucoup de cruauté, j’ai souffert vraiment avec un grand « S » et quand je suis arrivé au lycée, ça commençait à aller un peu mieux parce que je pouvais échanger des idées, avoir des amitiés qui se sont solidifiées…
Je pense que moi, j’me rappelle de cette époque, Metallica, par exemple, c’est un groupe, ça m’a beaucoup aidé à cette époque du lycée, j’allais au lycée le matin, j’écoutais Metallica dans mon Walkman, et ça, je ne l’intellectualisais pas, quoi ! C’est après coup, parce que j’aime bien réfléchir, des fois, je réfléchis un peu trop et ça me met mal au crâne (Sourire) mais j’aime réfléchir après, analyser après…
Tiens, c’est marrant, j’dis des fois que ça m’a sauvé la vie mais dans quel sens ? Donc, j’essaie de l’expliquer et du coup, y’a une analyse qui se crée et en fait, l’analyse, elle ne s’invente pas sur la chose spontanée, elle peut s’expliquer… Donc, tout ça, ça se mêle mais y’a pas une réflexion, on n’est pas arrivé en se disant : « Na, na, na… donc on va faire du métal… », le métal c’est spontané !
Tu as cité Metallica qui a influencé ton adolescence. Qu’est-ce que ça t’a fait d’en avoir assurer la première partie ?
Alors, ça a été un des jours le plus important de ma vie. J’ai… enfin pour tout le monde dans le groupe, on avait même du mal à en parler, à se dire à quel point c’était important. Ce jour-là, on était très concentré sur les émotions qu’on vivait et sur ce qui se passait, le moindre détail…
On ne les a pas vraiment rencontré parce qu’on était backstage avec eux. Mais eux, ils ont un statut de stars internationales, ils ont 45/50 ans… Enfin, j’veux dire, ils sont passés à autre chose dans leur vie et ils sont à un stade -et j’peux les comprendre- où ils n’ont pas forcément envie d’aller traîner avec tout le monde, aller boire des bières, tout ça… Et y’a tellement de pression sur eux, tellement d’attention, que je comprends qu’ils s’isolent un peu.
Après, c’est vrai, c’est un petit regret de ne pas avoir pu nouer quelque chose mais après tout, je n’ai pas besoin de ça ! Mais, c’était un moment très, très, très fort pour nous d’être sur la même scène qu’eux, de voir le public, de pouvoir dire quelque chose au public, j’étais à la place de James Hetfield, le chanteur, j’étais exactement au même endroit (Sourire)… C’était quelque chose, ouais !
Revenons au nouvel album. Si on fait abstraction de « Toxic Garbage Island », il semblerait que l’aspect écolo soit moins présent dans « The Way of All Flesh » : pourquoi ?
Alors moi, je dirais qu’au contraire, je dirais qu’il est plus présent paradoxalement. Je comprends que les gens nous aient labellisé « écolo », on va dire ! Ca ne me dérange pas, hein ? Mais, on s’est jamais vu comme tel et on a plutôt utilisé des images liées à la nature, l’arbre sur la pochette… J’pense que ça, les gens ont commencé à se dire : « Ouh la, c’est un groupe d’écolos ! Ils mettent un arbre, ils parlent d’écologie…. ».
Mangez des pommes !
Ouais pourquoi pas (Rires). Mais oui, une pomme par jour pour garder le docteur au loin (Sourire) !
Non, mais euh, on est écolo mais c’est pas quelque chose qu’on veut revendiquer, et dans le dernier album, c’est marrant parce qu’à force de répondre à des interviews là-dessus : « Pourquoi un arbre ? Pourquoi une baleine ? Pourquoi truc ?... ». Et bien moi, je trouve que dans la nature, y’a des symboles forts, y’a des choses fortes qui se dégagent et on aime bien utiliser ces images dans notre musique.
Après, dans le dernier album, y’a justement trois morceaux qui revendiquent pas mal et qui sont des espèces de coup de gueule -j’aime pas trop ce mot : « coup de gueule », c’est trop utilisé mais on va utiliser coup de gueule, c’est pas grave- sur le comportement humain qui est incompréhensible pour moi !
Pour ce nouvel album justement, avez-vous ressenti une pression particulière après un « From Mars To Sirius » qui vous a fait connaître aux yeux du grand public et notamment aux Etats-Unis ?
Alors, y’a eu une pression effectivement, y’a eu une attente parce que, pour beaucoup de gens, on était un nouveau groupe, alors que ça faisait dix ans qu’on existait. Mais, ils nous découvraient !
Donc, pour nous, cet album qu’on sort aujourd’hui, c’est un deuxième album pour beaucoup, beaucoup de gens, à part pour les fans en France qui nous suivent depuis début, voilà !
Du coup, effectivement, y’a la pression du deuxième album que tout le monde connaît mais ce que je veux dire, c’est que nous, on se met suffisamment la pression nous-mêmes, à l’intérieur de l’équipe Gojira, à l’intérieur du cocon du groupe. Au moment où on compose, on est tellement concentré qu’il n’y a pas de place pour autre chose…
… Aucun élément n’interfère dans la composition ?
Non, pas du tout, c’est vraiment quand on compose… Des fois, on y pense quand on en parle, on a une petite montée : « Mais dis donc ? Mais on est vachement attendu ? Et si on faisait ça, ça va choquer ! Oh, oh, oh… » on rigole (Rires) !
Mais dès qu’on est dans le local, c’est tellement dense, la concentration et l’envie de s’exprimer et la joie de faire ça, c’est vraiment… on adore ça, quoi !
Y’a rien au monde qui ne me fasse plus vibrer que ça ! Et quand on est en train de composer un morceau, de trouver des idées, qu’une harmonie, tout d’un coup, elle nous prend aux tripes… bah, c’est bon, on sait quoi ! Y’a un truc direct et du coup, ça n’interfère pas !
On parlait des Etats-Unis : comment expliques-tu ce carton outre-atlantique ?
(Gêné) Je ne l’explique pas. Je ne sais pas…
Dans le même état d’esprit, comment vivez-vous le fait d’être la locomotive de la scène métal française ?
Alors, quand tu emploies l’image de locomotive, je trouve que c’est pas forcément l’image qui correspond le mieux à la réalité ! Je trouve que ça serait un peu prétentieux, ça voudrait dire qu’on tire les autres quelque part ?
(Devant mon approbation) Tu penses ? Ouais ? Bah alors, à ce moment-là, peut-être que je ne me rends pas compte. Mais en tout cas, ce que je dirais, j’ai l’impression qu’on crève un abcès plutôt comme si il y avait un potentiel en France qui était énorme…
… qui s’est décomplexé en voyant qu’un groupe français comme Gojira pouvait exploser internationalement…
Bah écoute, ça me fait vachement plaisir ce que tu dis. Et beaucoup de gens nous le disent et même à l’étranger : c’est cool, c’est super, franchement, c’est génial !
Moi, j’pense que ce qui se passe, c’est que le potentiel il est là. Le seul truc que je dirais que je trouve qui manque un petit peu en France, c’est la confiance en soi. Mais j’pense qu’il faut faire la différence entre la confiance et être prétentieux c’est à dire tu peux avoir confiance en toi parce que tu estimes que tu vaux autant que les autres. Et tout le monde a des qualités et c’est pas parce qu’on est français qu’on est moins bon…
A ce propos, quels sont les groupes de cette scène française que tu apprécies plus particulièrement ?
Moi, j’adore Manimal de Toulouse, c’est un groupe qui est totalement excitant. Moi, c’est des gens que j’adore. On n’a pas du tout le même tempérament mais ça me fait du bien d’être en leur présence, en leur compagnie parce qu’ils sont hyper électriques. Enfin moi, je les adore même si parfois, ils sont saoulant, ils sont hyper marrants, ils ont un humour hyper acides et moi, j’les adore quoi ! Et musicalement, c’est efficace, c’est hyper inventif, c’est intelligent, ça joue grave et sur scène, c’est une machine de guerre ! Donc, c’est des éléments qui réunis ensemble font que bah… c’est vraiment un groupe qui peut cartonner, quoi !
Ca leur fera super plaisir de lire ça et notamment Vidda ami de Music Waves… Et quels autres groupes ?
Alors, Psykup aussi. Bon, c’est le même collectif, quasiment les mêmes personnes, Psykup, c’est un univers un peu plus complexe à pénétrer. Moi, c’est surtout en live que j’adore Psykup parce qu’ils sont jusqu’auboutistes, chaque chose est à sa place, les lights, le son, les trucs… C’est la grosse claque !
Ensuite, y’a Trepalium qui est un groupe de death que j’adore aussi, c’est des espèces d’hystériques, des fous furieux qu’on lâche sur une scène : ils sont géniaux !
Trepalium qui est issu du collectif dont fait partie Klone…
Klone aussi…
… avec lequel tu as collaboré dans leur dernier album « All Seeing Eye »…
Oui, voilà… y’a Klone mais y’en a plein. Même Eths, on a tourné avec eux, Candice sur scène, elle est complètement hallucinante…
Enfin, j’pense que ces groupes-là… y’avait Scarve, je ne sais pas où ils en sont exactement, y’a Dirk (NdStruck : Verbeuren, batterie) qui est over-booké sur son emploi du temps…
… Sylvain Coudret (NdStruck : guitare) a rejoint Dirk dans Soilwork ajouté au départ de Guillaume Bideau (NdStruck : actuel Mnemic et One Way Mirror) depuis quelques temps…
… Ouais, j’pense que c’est mort mais en tout cas, on nous en parle encore à l’étranger. Donc Scarve, putain, c’était un bel exemple !
Y’a un autre groupe que je vais citer, bon, ça n’a rien à voir avec tout ça mais en même temps, c’est un super bon exemple de ce que sont capables de faire les français : c’est Ultra Vomit !
Exact mais pour en avoir discuté avec eux justement, l’exportation c’est plus compliqué !
(Rires) J’veux pas leur faire de peine mais à l’étranger, ça va être très, très difficile parce qu’y’a tellement de références liées à notre enfance. L’humour bon enfant, moi, j’adore ! Voilà, je les ai vu avant qu’ils ne sortent cet album-là « Objectif : Thunes », j’les ai vu, ils ont joué à Tarnos, pas loin de là où on habite et j’avais mal au ventre tellement je riais, je riais… Ils font du bien quoi ! C’est un groupe qui fait du bien !
Et quels conseils as-tu à donner à tous ces groupes pour réussir comme vous ?
Bah moi, y’a un truc que je sais que nous, on a : la foi, on a la foi, on ne réfléchit pas trop en fait !
Je dirais : « Ne réfléchissez pas trop, foncer quoi ! ». Parce que des fois, on se dit : « Oui, mais qu’est-ce qu’ils vont penser de moi, ma copine… ? ». Faut pas réfléchir, faut y aller, ça se passe bien, et c’est un peu impressionnant de faire vingt dates d’affilé sans faire une seule pause et puis un jour off et repartir sur deux semaines de tour…
C’est vrai que c’est des conditions qui sont difficiles, on part de chez nous longtemps. J’pense qu’il faut quand même un peu de courage, finalement, pour faire ça même si on emploie les mots : « chance », « opportunité », « ouverture », « on était au bon endroit au bon moment »… mais il faut du courage quand même…
… Y’a plein de paramètres qui rentrent en ligne de compte…
Voilà, y’a plein de paramètres… Moi, en tout cas, ce que je veux dire c’est que tu prends n’importe quel de ces groupes, tu les mets sur une scène au milieu des Etats-Unis, tu les fous en Pologne, tu les fous en Suède… les mecs, ils sont scotchés… Donc, j’pense que le potentiel, il est là, les barrières de la langue dans certains des cas, ça peut être un problème mais y’a beaucoup de groupes qui chantent en anglais… Non, non, ça va le faire (Sourire) !
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On revient à vous, quelles sont vos influences ?
Nos influences ? Metallica d’abord, ça s’est clair et net, pour tous les quatre !
Ensuite, on a vite basculé sur des musiques un peu plus extrême. Alors, c’est passé d’abord sur les premiers albums de Sepultura, qui moi, m’ont complètement chamboulé et j’ai pénétré dans un univers d’abord qui m’a semblé très glauque et très dense et très noir et j’ai vite trouvé des choses très sucrées dedans et agréables, quoi ! Moi, Sepultura, ça a été un truc qui m’a… « Arise », l’album « Arise » puis « Chaos A.D. » qui a révolutionné… Ensuite, y’a eu Morbid Angel qui est une musique hallucinante…
… Je te coupe, à ce propos, un de nos lecteurs nous demande ce que vous auriez fait si Morbid Angel n’avait pas sorti « Domination » ?
(Rires) On ne serait pas le même groupe, ça s’est indéniable !
Et assumez-vous cette comparaison voire affiliation ?
Totalement. Et non seulement, je l’assume mais en plus, je la revendique. Et souvent même quand, on ne m’en parle pas, je le dis : « On vient de cet album, on vient de cet album… on vient de « Symbolic » de Death… ».
Après, il y a des choses plus profondes… quand je dis Metallica, Metallica, ça a été le moteur… Après « Domination », c’est ce qui a donné tous nos codes. Tous ceux qui aiment Gojira, il faut qu’ils écoutent « Domination » de Morbid Angel, ils vont comprendre d’où on vient !
Justement ceux qui connaissent Morbid Angel en général et « Domination » en particulier vous le reprochent…
(Surpris) Ah bon ? D’accord… Mais, si c’est un reproche alors y’a un truc qui m’échappe, je ne sais pas ?
A savoir que « The Way of All Flesh » est une sorte de plagiat de « Domination »…
Du plagiat ? D’accord… Alors dans ce cas-là, je comprends le reproche effectivement. Personne n’est irréprochable (Rires) !
Non, non, c’est vrai, peut-être ouais… Moi-même, j’ai pas beaucoup de recul, ça m’a tellement marqué cet album mais y’a plein d’autres choses dans notre musique aussi !
Mais, je comprends ça, j’pense que quand t’es fan d’un album et que tu vois un groupe avoir un succès en empruntant des codes de l’album, ça peut faire quelque chose et le reprocher…
Après moi, je le vois plus comme passer le flambeau ! Morbid Angel, on les connaît, on a joué avec eux, ils nous apprécient vachement, on les a rencontré en Floride. Enfin, y’a une sorte de passage de flambeau quelque part à travers les groupes et c’est pour ça que moi, je trouve que c’est pas mauvais et si un jour, je vois un groupe qui sonne comme du Gojira et qui son succès avec, quand je serais plus vieux et bien, ça me fera plaisir !
Ok… A l’écoute de « The Way of All Flesh », on reste une nouvelle fois impressionné par la précision des harmoniques artificielles reconnaissables entre toutes. Avez-vous développé une certaine marque de fabrique autour de ces harmoniques ?
Oui, oui (Rires) ! Alors ça, ça nous vient de Death, ça nous vient de Morbid Angel, encore une fois… Mais c’est qu’on s’en sert d’une certaine façon… On travaille beaucoup sur le fait d’être carré, de jouer ensemble, on n’est pas des… comment dire ? shredders… on ne fait pas de gros solo…
Moi, je ne m’estime pas guitariste. Si tu me lâches avec des musiciens dans une salle et tu me dis de faire un bœuf, je vais apporter quelques éléments comme ça, j’vais prendre du plaisir mais je ne vais pas être capable de capter la gamme et tout ça…
Donc, on n’est pas vraiment des… j’ai jamais pris de cours de guitare, pareil pour Christian… donc, on travaille énormément des sons et surtout, le fait d’être carré ! Par exemple, on va tout faire pour commencer le riff vraiment en même temps, sur la grosse caisse et finir en même temps ! Donc, déjà respecter les blancs, les temps et si possible, jouer exactement la même chose pendant le riff (Sourire)… ce qui n’est pas évident et pour donner une bonne visibilité de la musique.
Et l’harmonique artificielle, on les développe et selon où on place la main droite, on peut obtenir des harmoniques très graves qui font : « Ouuuuuuh » comme ça, sous-marine ou des trucs très nerveux. Donc, ce sont des choses qu’on aime développer, ouais !
Sans transition, si tu devais faire découvrir Gojira à quelqu’un qui ne connaît pas le groupe, quel titre choisirais-tu et pourquoi ?
Euh hum (Silence)… Ca, c’est compliqué ! Euh oui, alors, en fait, je ferais volontiers écouter un morceau du dernier album et euh… c’est trop dur, c’est trop dur ! Il faudrait que je prenne une petite après-midi avec cette personne pour lui faire découvrir (Rires).
Mais je pense… sinon y’a un morceau qui représente bien le groupe, c’est « Backbone » de « From Mars to Sirius », le deuxième morceau où y’a un peu tous les ingrédients, quoi ! Donc, voilà, je rétrograde, je vais sur l’album d’avant mais sur le nouvel justement, y’a pas un morceau qui est représentatif, c’est pour ça que c’est difficile d’en mettre un en avant, on explore des univers différents dans chacun…
… Donc, si tu devais faire découvrir Gojira au travers d’un album, ça serait le dernier ?
C’est quand même… c’est le dernier qui nous représente aujourd’hui, voilà !
Et justement ce dernier album, imaginons que tu sois vendeur : quels seraient tes arguments pour vendre « The Way of All Flesh » ?
(Silence) Je dirais que voilà, on y a mis la sueur de notre front dans cet album, on s’est défoncé. Et il est carré, y’a un gros son. Et peu importe, si on aime ou on aime pas, j’pense pour un musicien qui est un peu attentif, parce qu’on a un public de musiciens quand même, surtout dans le métal. Et je dirais qu’on y a mis toutes nos tripes, quoi !
Sinon quelle est votre humeur, à quelques heures de monter sur scène devant des milliers de vos compatriotes ?
Je suis hyper détendu…
Je confirme… Et que penses-tu du public français ?
Alors, les seuls français, pour l’instant, qu’on a vu sur cette tournée, c’était à Bruxelles. Ca nous a fait chaud au cœur parce qu’on est passé… Juste une petite anecdote, on est passé en Allemagne où on n’est pas du tout connu et ça a été difficile parce qu’on était devant des foules immenses. Tout le monde avait le t-shirt In Flames et c’était 4.000 personnes qui ont été un peu dubitatives, on va dire, qui prenaient de plein fouet le truc et donc, c’était pas évident, on a dû un peu se bagarrer… Et arrivé à Bruxelles, y’avait beaucoup de gens de Lille qui étaient là…
… qui étaient venus pour vous…
Voilà, qui étaient venus pour nous voir, y’avait beaucoup de t-shirt Gojira, des mecs qui ont gueulé, qui chantaient les paroles…
Justement, vous faîtes la première partie d’In Flames, vous avez fait celle de Metallica en France, penses-tu encore avoir besoin de ce tremplin à côté de groupes aux styles si différents du vôtre ?
Bah, disons que pour nous, c’est un gain de temps… Euh, j’aime pas parler comme ça, pourtant, c’est une réalité qui prend plus de la moitié de notre vie…
Ca a pu être un gain de temps mais est-ce toujours le cas ?
Oui, ça continue. Par exemple, sur cette tournée, on va jouer en Italie pour la première fois de notre vie, en première partie d’In Flames et y’aura peut-être 5.000 personnes à Milan… Et j’veux dire, nous si on veut jouer devant 5.000 personnes en Italie, ça va nous prendre dix ou quinze concerts…
Mais tu penses avoir des adhésions en Italie par exemple ? Au contraire, n’as-tu pas peur de revivre ce que vous avez vécu en Allemagne comme tu l’as cité, sachant que la musique de Gojira est assez éloignée de celle d’In Flames ?
Oui, c’est vrai. C’est une question pertinente. Oui, c’est vrai, c’est vrai ! C’est à dire que ça fait que ça ne fait que quelques années qu’on se développe à l’étranger et on se raccroche à des trains plus gros que nous mais c’est très formateur, on apprend beaucoup…
Et on apprend toujours…
Voilà, c’est ça et on ne réfléchit pas forcément en terme de : « Est-ce que c’est dangereux ou quoi ? ». Mais, en tout cas, on est en train de se former encore et j’pense qu’on se formera jusqu’à la fin de notre vie, en fait (Rires)…
Dans « The Art of Dying », vous débutez une nouvelle fois par des ambiances faisant références à l’Australie, les aborigènes… Pourquoi ne pas mettre des chants basques à la place ?
Houlala (Rires). Alors, on n’est pas basque dans le groupe, je tiens à la dire parce que souvent, on nous dit qu’on est basque, on ne sent pas basque, les quatre musiciens du groupe mis à part Jean-Michel Labadie, le bassiste, qui habite à Cambo au pays basque. Donc lui, on va dire que c’est le plus basque des quatre. Les autres, on habite dans les Landes, donc techniquement, c’est pas pareil, c’est important pour nous… Mais surtout Mario et moi, on a une maman qui est américaine, un papa qui est bordelais et qui a voyagé dans le monde entier et on s’est retrouvé là un peu par hasard parce que notre maison y était… enfin comment dire ? Je n’ai pas mes racines aux pays basques vraiment…
… pourtant l’accent est là !
Oui, pour toi oui, mais quelqu’un qui est de Paris oui, mais j’ai grandi là, j’ai grandi à Bayonne, j’étais au lycée au Bayonne, j’ai mes repères là, mes amis…
Par contre, on se considère, je ne sais pas d’une façon plus spirituelle on va dire, vraiment des habitants de la Terre et on a des racines aux Etats-Unis, on des racines aux Açores, voilà… Enfin, Mario et moi, en tout cas et on est passionné par toutes les musiques du monde…
…. Et pourquoi l’Australie ?
Euh alors, moi, j’le vois pas vraiment Australie. C’est vrai qu’il y a le côté didgeridoo dans la voix mais il y a une référence forte au Tibet quand même dans le chant, mais c’est vrai que la percussion peut porter à confusion vu que c’est du bambou, donc c’est un mélange un peu personnel… Mais c’est marrant que tu me dises l’Australie (Sourire) !
On parlait de pays basque, à ce titre, plutôt Claude ou Richard Dourthe ?
Pardon ?
Vu que tu es landais, ma question faisait référence au rugby est à la famille Dourthe dont le père et le fils s’occupent respectivement de Bayonne et Dax et donc je voulais savoir vers quelle ville ton cœur balançait ?
Plutôt Bayonne.
Que voulais-tu faire quand tu étais gamin ?
Euh, je voulais être pompier comme tous les gamins, quoi !
Et es-tu fier de ce que tu es devenu ?
Hum… Je suis heureux de faire ce que je fais. C’est comme ça que je le dirais, excuse-moi de… Je dirais que je suis heureux de faire ce que je fais, pas fier mais heureux, quoi !
Avant de terminer, as-tu un dernier mot à dire à vos fans qui liront sur Music Waves ?
Ouais, bah on les aime quoi, on les adore. Enfin, c’est spontané ce que je dis mais je trouve qu’ils ont une façon de se comporter avec nous qui est hyper respectueuse et on se sent soutenu vraiment même si il y a des gens qui vont critiquer ou quoi, mais c’est pas grave…
Mais c’est le lot de la popularité…
Mais même eux, je ne leur en veux pas du tout et je les aime aussi…
Super, merci beaucoup.
Merci
Une nouvelle fois, un énorme merci à Jess de Listenable ainsi que Nicofred, Zoso, Noise, Nuno777 et Häxan pour leur plus que pertinente contribution !
Plus d'informations sur http://www.gojira-music.com/