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Traditions ridicules, je vous hais


TYPE:
EDITOS
GENRE:

-



Chaque année, à la même époque, tout le monde s'esclaffe sur le dos de ses petits camarades en organisant quelques petites plaisanteries innocentes. Mais de cette innocence peuvent jaillir de véritables drames humains. Petite leçon de responsabilisation..
BATRIC - 08.04.2014 -
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En ces temps de renouveau de notre bien-aimé gouvernement, je ne veux pas louper l’occasion inespérée que me donnent les hasards du calendrier de solliciter madame Tourayne, ministre des affaires sociales, pour qu’enfin soit abolie une tradition ridicule qui, chaque année, provoque de multiples drames dans l’indifférence générale.

Mais tout d’abord, un rappel des faits historiques me semble indispensable pour la bonne compréhension du sujet par l’ensemble de nos lecteurs : le 1er avril 447, un maçon de Constantinople essaie une nouvelle technique de son invention pour réparer une brèche dans la célèbre muraille ceignant la ville. Le pauvre homme brille tellement par son incompétence que sa technique provoque en fait l’effondrement d’une tour située à proximité puis, par un « effet domino » désormais bien connu des ingénieurs, l’effondrement successif de pas moins de 56 autres tours. Pour s’en sortir, le maçon invente une histoire abracadabrante de tremblement de terre et se dédouane ainsi.

Quelques années plus tard, le pot aux roses est découvert et, plutôt que de punir le menteur effronté, il est décidé de lui rendre hommage chaque année en inventant une petite plaisanterie innocente le 1er avril. C’est ainsi que l’année suivante, on écorchera vives 982 jeunes filles pour faire croire qu’un monstre inconnu menace la sécurité des braves citoyens dans les environs.
Qu’est-ce qu’ils ont ri, ce jour-là, je vous laisse imaginer !
 
Cette tradition s’est ensuite perpétuée jusqu’à nos jours, mais elle me pose personnellement un problème.

Depuis des années, je suis réputé pour ma naïveté incommensurable et il faut bien avouer que ceux qui me connaissent ont largement tendance à en profiter. A un tel point que cela faisait des années que je n’osais plus sortir de chez moi ni même répondre au téléphone le jour du premier avril.

Mais voilà, ce mardi, confiant et également conscient du ridicule de ma peur irrationnelle, j’avais décidé de reprendre courage et de mener une vie normale en cette journée honnie du premier avril.

Tout commençait pour le mieux car j’étais, vous vous en doutez, aux abois et décidé à ne me laisser surprendre par rien. Je m’étais levé tranquillement à 7h et n’avais prêté aucune attention aux informations matinales. « Tiens, la Tour Eiffel est à nouveau vendue au Qatar, elle est bien bonne ! »,  m’étais-je esclaffé en écoutant ma radio favorite et en prenant mon café copieusement arrosée de douze pincées de sel par mon bambin farceur de 7 ans.

Puis, en me brossant stoïquement les dents avec mon dentifrice au fort goût de mayonnaise, je n’avais pas davantage réagi à la nouvelle selon laquelle madame Royal serait pressentie pour le ministère de l’écologie. Qu’est-ce qu’ils sont amusants, ces journalistes, alors !

Mais c’est un événement sur la route du bureau qui malheureusement a provoqué une totale perte de contrôle : je m’arrête chez mon boulanger favori et, après lui avoir commandé mes 12 pains aux raisins quotidiens, je l’entends m’annoncer qu’il vient d’apprendre que Yes est en concert le soir même dans ma petite ville de Niort, accompagné de Genesis, line-up complet avec Peter Gabriel, et Pink Floyd. J’avoue que j’aurais dû me méfier, d’autant que certains informations du même acabit paraissaient le jour même sur votre site favori, mais je n'ai pu échapper à un grand moment de faiblesse.

J’appelle immédiatement l’Acclameur, grande salle de concert ultra-moderne sise dans la ville en question et la nouvelle m’est bien confirmée. C’est que, depuis notre maçon de Constantinople, le concept a eu le temps de bien se rôder. Je prends immédiatement ma place et paye par carte bancaire, et avec le sourire, les 3 872 € qui me sont réclamés. A aucun moment je ne me méfie de l’accent douteux de mon interlocuteur.

Toute la journée, je suis sur un petit nuage. Je ne remarque même pas que mon écran est à l’envers et que c’est probablement la cause de cette douleur lancinante dans mes cervicales. Je ne me doute non plus de rien lorsque mes collègues me disent que je suis appelé d’urgence par notre PDG pour recevoir ses félicitations suite à mon dernier article remettant en cause la validité de notre nouveau plan de rémunération. Enfin, je suis loin de penser au 1er avril lorsque je constate que mes 4 pneus sont à plat et c’est donc en roulant sur les jantes que je me rends laborieusement jusqu’à la salle dans laquelle doit se dérouler le spectacle graalitique que j’appelle de mes vœux. Mais ce que je ne sais pas encore, c’est que ma sale journée ne fait que commencer.

Tout a été si bien organisé que lorsque je pénètre dans cette salle de concert, il y a un monde fou. Tout un tas de fans de Yes, Genesis et Pink Floyd sont présents. Ils sont venus, ils sont tous là. Les lumières s’éteignent, l’ambiance est à son comble, la tension monte, ça sent la sueur incontrôlée et incontrôlable, les lasers s’excitent, les fumigènes montent puis, tout à coup, j’entends cette voix qui hurle « Poisson d’avril, Batric !!! ».

Je ne suis pas paranoïaque mais là, avouez quand même qu’il y a de quoi s’agacer. Et c’est bien ce que j’ai fait. Oui, j’avoue que j’ai perdu mon sang froid, monsieur le docteur.

J’ai saisi mon voisin par le col, ai sorti mon briquet bic, lui ai plaqué sur la tempe et ai hurlé à qui voulait l’entendre « bougez pas ou je le bute ! ». Ils se sont tous esclaffés et, du coup, j’ai mis ma menace à exécution : j’ai allumé le briquet. Sauf que le mec avait les cheveux hyper longs, à se demander si c’était pas une fille, saleté de hippie ! Et les cheveux, c’est super inflammable, vous n’imaginez pas à quel point… du coup, voilà le gars qui a la tête toute enflammée. Je lui dis de ne pas bouger, qu’on va arranger ça, mais il n’est pas fichu de rester en place.

Je saute sur l’extincteur et en vide le contenu sur le hippie en question. Mais j’entends beaucoup trop tard quelqu’un qui me dit en riant : « poisson d’avril, on avait rempli l’extincteur avec de l’essence ! ».

OK, c’est un complot. Je laisse la torche vivante nouvellement créée par mes soins se débattre gracieusement dans les flammes de l'enfer, trouve un téléphone et compose le 18. A l’autre bout, on décroche et sans attendre, je dis à mon interlocuteur : « c’est super chaud, ici, il faut venir rapidement éteindre l’incendie ! ». Sauf qu’au bout du fil, ce n’est pas un pompier qui me répond mais une dame d’un certain âge qui m’annonce d’une voix langoureuse : « oui, mon chéri, ici aussi il y a un incendie à éteindre… ». Saleté de poisson d’avril.

Je laisse tomber l’affaire et sors du bâtiment. J’appelle la seule personne que je juge encore digne de confiance : mon acolyte Peter (ça s'explique, souvenez-vous qu’à ce moment-là, j’ai perdu tout sens commun). Peter décroche, me laisse lui expliquer la situation et me répond d’un ton fort à-propos : « calme-toi, mon coco, j’ai maté des poissons d’avril bien plus costauds ». Je suis rassuré. Il me conseille de remonter dans ma voiture, d’aller dans les bois les plus proches, de m’installer confortablement puis d’attendre dix à douze ans qu’on m’ait probablement oublié.

Et aujourd'hui, je suis donc là, tout seul abandonné à méditer sur ma vengeance. Et je vous garantis qu'après tout cela, notre poisson d'avril à nous l'année prochaine, sur Music Waves, ça risque bien d'être encore plus costaud que ce que vous avez connu jusqu'à aujourd'hui; Ma vengeance sera homérique !
 
(2) COMMENTAIRE(S)  
 
 
CORTO1809
08/04/2014
  0
Au fou :-) !
ADRIANSTORK
08/04/2014
  0
Bravo Batric pour cet article qui illumine l'une des grandes angoisses méconnues de ce monde. Si tu possèdes un GPS dans ta voiture, on pourra toujours te localiser pour t'apporter le nouvel album de Gentle Giant, remixé par Steven Wilson.
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