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"Seulement trois étoiles !" vont certainement s'écrier ses admirateurs, soufflant leur colère ! Eh oui, et pourtant j'aime Fish et son précédent album m'avait conquis. Mais je dois avouer qu'après de multiples écoutes, "Weltschmerz" me laisse perplexe... et insatisfait. Fish est frappé du syndrome du trop généreux, du trop plein. Est-ce le confinement qui laisse plus de loisirs à nos artistes favoris, mais pourquoi ceux-ci se croient-ils obligés de nous imposer des doubles albums gargantuesques jusqu'à l'indigestion ? Fish avait largement de quoi faire un dernier album "simple" de toute beauté pour clôturer sa carrière. Au lieu de quoi, il dilue son propos et finit par lasser l'auditeur.
Certes, il semble qu'il ait eu beaucoup de choses à nous dire. Trop, peut-être ? Car c'est à une véritable logorrhée cathartique à laquelle il se livre, la musique étant parfois oubliée derrière ce flot de paroles sombres et anxiogènes dans une époque qui n'en avait pas besoin. Toujours est-il que le premier disque n'a jamais réussi à me captiver et qu'il est même dispensable. Les choses prennent une autre saveur sur le second disque, en tout point remarquable, du poignant 'Garden of Remembrance' au prog très réussi de 'Waverley Steps', sans oublier le très sombre mais convaincant 'Weltschmerz' et le magnifique saxophone de 'Little Man What Now ?' qui reviendra longtemps vous hanter.
Comme Tony, je pense que 'Garden of Remembrance' aurait été un bien meilleur point final à la carrière de Fish. Grâce à la magie du numérique, rien ne nous empêche de supprimer les titres trop bavards et de réordonner les pistes pour faire de ce double à moitié réussi un simple parfait. Il est cependant dommage que ce ne soit pas le chanteur qui ait de lui-même eu cette initiative.
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Peut-être fallait-il une pause assez longue à l’écossais, pour s’apercevoir que l’authenticité de son inspiration ne pouvait s’enraciner que dans le rock progressif et dans la multiplicité instrumentale de son héritage folklorico-celtique.
Pour autant, je ne trouve pas que cet album surpasse très nettement le "13th Star" de 2007. Après un magnifique 'Perfume River' doué entre autres choses d’un vocal rampant, d’une rythmique hypnotique et d’une guitare intestine, où l’on retrouve le Fish que l’on attend, prédicateur, addictif, ésotérique, l’album enchaîne aussitôt sur 3 morceaux incluant le titre éponyme et qui sans être mauvais, déroulent 15 minutes de musique tout à fait quelconque. Le regain d’intérêt est certain pour la suite du programme, s’attardant notamment sur le thème de la grande guerre, avec du mordant et une ambiance mortifère très en phase. Mais, ce qui modère l’admiration, c’est l’impression d’assister au bilan d’une fin de parcours, plutôt qu’à l’écriture d’un chapitre réellement nouveau. Si je disais que 'High Wood' a lorgné sur la méthode démonstrative de 'Raw Meat', on pourrait répondre que l’affiliation est lointaine et peu convaincante. En revanche, il est indiscutable que 'Crucifix Corner' adopte une construction identique en tous points à celle de l’inoubliable 'Vigil', pour ne pas dire qu’il en reprend la mélodie. Non que cela soit déplaisant, mais on ne peut s’empêcher de réentendre ce moment de bravoure, avec un tel éclat que la réussite du remake, paradoxalement, s’affadit quelque peu devant la résurrection de son modèle. 'Thistle Alley', quant à lui, récupère (en douceur d’abord) l’ambiance mélodique de 'Jungle Ride', en prenant soin d’échanger rapidement sa dimension introspective contre une emphase écrasante, massivement et collectivement destructrice, comme pourrait l’évoquer la fresque d’un no man’s land déchiqueté par les explosions et jonché de cadavres. 'The Leaving', qui suit juste après, semble décliner le même thème sur un modus operandi plus proche de la sphère individuelle, de la psychologie de l’homme ou du soldat.
Avec cet album, Fish opère la synthèse, somme toute assez réussie, de ses préoccupations intimistes et de sa vision résignée de la destinée humaine. Mais, musicalement, le déjà entendu est omniprésent, et à ce stade de carrière je suis un peu dubitatif sur la suite que pourrait encore imaginer notre ami le poisson. En attendant, si vous aimez (le poisson…), ne passez pas à côté de "Feast of Consequences". Personnellement je ne peux pas le classer dans le top 3 de la discographie, mais il vaut encore le détour.
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What would you do if I opened my heart to you ?
Avec les 4 piliers massifs que sont 'Shadowplay', 'Credo', 'Tongues' et le titre éponyme, je ne parviens pas à comprendre que l’accueil du second opus de l’ex-leader de Marillion se soit montré aussi froid. D’autant que les autres titres ne sont pas en reste : 'Just good friends' détient l’étonnant pouvoir de rendre son mid-tempo entraînant, 'Lucky' additionne sa rythmique répétitive et l’imperceptible évolution de son couplet au bénéfice d’un résultat des plus addictifs, et 'Dear Friends' est une jolie ballade, toute en finesse et dégageant une belle émotion qui n’a pas vieilli. Bien dommage que les capacités vocales du capitaine Fish se soient altérées peu après ce début de carrière solo, proprement magnifique.
Moins homogène que son prédécesseur, "Internal exile" se présente davantage comme un patchwork d’ambiances, de styles et d’idées musicales variées, mais ce qui provoque souvent la dislocation de l’unité participe au contraire au charme de cet album. De la surprenante alchimie, par exemple, de l’enchaînement d’un 'Tongues' surgissant des chaudrons infernaux au titre éponyme du projet, résolument folk et festif.
"Internal exile", un album au rabais ? It don’t mean nothin’, it don’t mean nothin’ to me !
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Oh for the company dream of the company, drink to the company until we die… Le meilleur de Fish en solo ? J’ai découvert rétrospectivement les tous premiers albums de Marillion, mais j’ai eu la chance de goûter pleinement au néo-progressif des années 90, au moment même où sortaient "Vigil in a Wilderness of Mirrors", puis "Internal Exile". Je les ai pris en pleine figure, et en contexte. 'Vigil' qui ouvre l’album est le masterpiece incontournable de cette discographie (nb: une erreur s'est glissée dans le tracklisting, le titre n'est pas éponyme), et 'The Company' en décroche peut-être la première place sur l'aspect de la puissance mélodique. Avec un chant renversant, à l’émotion inégalée. Le coup d’envoi de "Vigil…" restera dans les annales de ce que la production de l’écossais, hors Marillion, aura compté de plus poignant. Du début à la fin, rien à jeter (à part 'Big Wedge' ?), jusqu’au bouleversant 'Cliché', cliché en effet mais oh combien envoûtant. A redécouvrir sans modération.
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Fish est (re)parti de très haut avec "Raingods with Zippos", et a redégringolé avec "Field of Crows", en passant par l’étape discutable de "Fellini Days". Forcément, à l’aune de découvrir ce "13th Star", sur le rythme d’une galette une fois tous les 3 ans environ, il est légitime de réfréner l’optimisme. Si on descend plus bas que l’album précédent, on va devoir s’équiper de pelles et de pioches, et commencer à creuser.
Pourtant, si je ne suis pas parvenu à cautionner pleinement ce nouvel opus après récidive d’écoutes répétées, un album qui n'a pas l'insolence dépressive de "Sunsets on Empire" ni l'envergure progressive de "Raingods with Zippos", j’ai quand même fini par me laisser prendre au jeu de son rock musclé, épais, aux effets modulés par de subtiles tournures mélodiques ou vocales, et par des arrangements assez efficaces. Un peu à la manière de la production de Pendragon, à partir de son virage métal-rock. Les titres ont presque tous quelque chose d’intéressant - ce n’est pas le cas de 'Manchmal', qui reprend la formule de 'Square Go' mais en moins bien ; on trouve aussi quelques effluves nostalgiques, pas désagréables. 'Arc of the Curve' est une relecture assez claire de 'Lady Nina', façon ballade onirique - mais je n’en ferai pas un reproche, car cela fonctionne plutôt bien. Fish n’aura pas atteint la productivité de l’équipage Marillion versant Hogarth, en revanche il en aura suivi le parcours en dents de scie. Il est amusant de constater qu’au moment où il sortait ce "13th Star" à l’émotion malheureusement un peu contenue, en 2007, Marillion publiait "Somewhere Else", un album qui n’avait pas manqué de susciter la polémique. Mais pour sa part il avait la difficile tâche de succéder au fantastique "Marbles". Alors, après "Field of Crows" et "Fellini Days", il n’est pas vraiment l’heure de bouder son plaisir.
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Effectivement, ce "Fellini Days" rompt totalement avec l’élan progressif que "Raingods..." avait réinsufflé dans la discographie. Il ne s’apparente pas vraiment non plus au rock tourmenté de "Sunsets on Empire", ni à la mouvance pseudo FM de "Suits". Fish tente l’exploration de nouvelles voies, hybridées entre ambiances méditatives, un peu planantes, et débauche de guitares électrisées qu’il affectionne toujours pour leur part. Il renoue aussi avec certains de ses vieux travers, comme en témoigne l’entame avec son '3D' qui n’en finit plus d’échouer à convaincre. La seconde partie de l’album se défend assez bien, quoique sans originalité particulière : 'Our smile' est un bel exemple de sobriété productive, dégageant un sentiment de bien-être au travers d’un vocal totalement lisse et d’une mélodie dépourvue d’artifice. 'Long cold day' et 'Dancing in fog' sont 2 tranches de rock telles que l’ami Dick sait (parfois) les concocter, pas impérissables (authentiquement mélancolique s’agissant de 'Dancing in fog') mais suffisamment muries pour que l’oreille s’y attarde sans trop de lassitude. 'Clock moves sideways' joue les prolongations dans le même état d’esprit, et 'The Pilgrim’s address' est un vibrant plaidoyer contre la guerre au moyen-orient (comme quoi l'histoire est un éternel recommencement) qui peut lui aussi marquer un point à condition de faire passer la pilule de sa sonorité très aiguisée. Sonorité dont on aurait pu penser, à tort, que notre écossais avait souhaité s’affranchir avec l’étape de "Raingods". Cet album n’est pas inintéressant, et on peut saluer les efforts effectués par Fish pour renouveler le style de sa musique, à défaut de la réinventer. Mais "Fellini Days" a la mauvaise idée d’arriver juste après "Raingods", et la comparaison qualitative, inévitable, ne peut qu’alimenter la déception.
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