1973. Gentle Giant vient de perdre Phil Shulman, l’un des 3 frères fondateurs du groupe, qui décide de retourner à l’enseignement. Le groupe, nullement découragé, décide de sortir un nouvel album "In a glass house" (nom inspiré du proverbe « ceux qui vivent dans des maisons de verre devraient s'abstenir de lancer des pierres »). Cet album sera-t-il celui du succès public ? Avec le recul, il s’agit d’une des meilleures ventes du groupe, ce qui s’avère étonnant à bien y regarder.
Premièrement les morceaux sont plutôt longs alors que le groupe nous avait plutôt habitué à des morceaux de 4 ou 5 minutes déjà denses. Deuxièmement, la pochette, sobre, en noir et blanc, illustre assez bien l’ambiance austère et labyrinthique de la plupart des six compositions de l’album. Et troisièmement, Capitol refuse de distribuer l’album aux Etats-Unis arguant du fait qu’il soit invendable, ce qui vous brosse finalement en 3 temps le portrait assez fidèle d’un album jugé généralement comme l’un des plus difficiles d’accès dans la discographie du groupe. Pourtant, à bien y regarder, les choses n’ont pas tellement changé, on est toujours en présence d’une musique sophistiquée (qui contraste avec le nom grotesque du groupe) à la fois folk et électrique, médiévale et jazzy ; le groupe a juste développé son vocabulaire musical qu’il maîtrise dorénavant parfaitement.
‘The Runaway ‘qui ouvre album commence par un bruit de verre répété... Quand celui-ci devient rythme, la musique commence ; ensuite, les riffs syncopés de la guitare et du clavier semblent se livrer un duel sans merci rejoints bientôt par la flûte et plus tard par un solo de vibraphone que l’on croirait échappé d’une session de Frank Zappa. Quant à la voix, si celle-ci ne vous fait pas penser à l’école de Canterbury, c’est que vous n’avez probablement jamais écouté un album de Caravan ou d’Hatfield And The North.
L’austérité apparaît avec le deuxième morceau apparemment simple dans sa forme : chants en canon et claviers sont les composantes essentielles de ce morceau répétitif, monastique et mystérieux. Surprise, le troisième morceau à l’atmosphère funky contraste fortement avec l’ambiance solennelle qui l’a précédée. ‘Way Of Life’ annonce ce que sera l’album suivant, à savoir un savant mélange de sophistication et d’accessibilité pour plaire au marché américain. Le folk médiéval reprend ses droits avec ‘Experience’ tandis que ‘A Reunion’ est une balade dominée par le violon rappelant fortement Caravan ; et c’est avec le morceau titre, dynamique et enjoué, que se conclut cet album court (moins de 38 minutes) mais finalement bien représentatif du savoir faire de ce groupe en cette époque bénie pour le rock progressif.
"In A Glass House" n’est peut-être pas le meilleur album pour entrer dans l’univers de Gentle Giant (y en a-t-il un ?) mais si vous êtes sensible aux musiques raffinées et aux productions sonores des 70’s, cet album est digne de figurer dans votre discothèque. Enfin, si vous avez le choix, optez pour l’édition remasterisée 2009 sortie par Alucard. Il n’y a pas de bonus mais le son est clair et met très justement en valeur la musique produite par le groupe.