Les musiciens de Sanguine Hum sortent ici leur second album mais trois des quatre hommes ont déjà un passé en commun sous le nom de Antique Seeking Nuns. A l'époque, leur musique est plutôt marquée par le rock progressif jazzy de ce que certains ont appelé "l'école Canterbury" (Haltfield and The North, Caravan, entre autres). Sanguine Hum, c'est essentiellement le bébé du guitariste/chanteur Joff Winks et du claviériste Matthew Baber, dont la culture musicale semble s'étaler du rock progressif de l'école Canterbury à Porcupine Tree (à moins que ce ne soit Pink Floyd !) en passant par l'electronica moderne. Drôle de mélange que l'on retrouve un peu dans ce "Bourdonnement optimiste".
Il y a dans cet album une volonté de rester plutôt accessible même si l'on est loin d'une musique pop simple ! Si beaucoup de morceaux sont de durée moyenne aux côtés de deux autres nettement plus développés, cela n'empêche pas le groupe d'insérer souvent des rythmes complexes et changeants. Les influences jazz-rock sont bien là mais pas si évidentes que chez d'autres formations car le chant et les mélodies vocales viennent d'ailleurs. Ceci étant dit, les parties instrumentales sont nombreuses et on a même deux titres complètement dénués de chant. Parmi leurs références, certains penseront à Happy The Man, un des rares groupes de rock progressif américains influencés par le rock anglais dans les années 70 mais aussi par le jazz-rock. On retrouve le même mélange de piano électrique sonnant parfois comme un vibraphone et de synthés aux textures plus modernes ou plus typiques du rock progressif anglais sur "In Code" par exemple, mais ce n'est pas une exception.
Matt Baber est un claviériste aux doigts bien déliés qui aime aussi s'amuser avec des programmations rythmiques et autres boucles électroniques. Son aisance sur un piano ou un orgue est évidente sans que les parties solistes ne soient envahissantes. Joff Winks possède un timbre medium à aigu, clair, pas très puissant mais agréable et notre homme se débrouille plutôt bien à la guitare, partant à l'occasion dans des solos lyriques et planants bien inspirés, avec un son parfois assez fortement traité et un peu métallique. La section rythmique d'Andrew Booker et Brad Waissmans'amuse bien sans pour autant faire de démonstration époustouflante.
Sons feutrés, rythmes syncopés suivis de manière élégante et subtile... Sanguine Hum ne fait pas dans la démonstration gratuite, même si quelques dissonances et parties un peu plus agressives peuvent secouer un peu l'auditeur qui penserait avoir affaire à un groupe de progressif aux influences soft jazz et un peu intello. Une section du morceau éponyme décoiffe sérieusement par exemple. Les trois grandes parties de la suite finale sont vraiment un des meilleurs moments du disque avec un départ planant plutôt acoustique, un refrain qui se mémorise facilement, un court interlude atmosphérique, une section nerveuse aux soli échevelés et quelque peu dissonante, et enfin un final de nouveau plus calme et mélodique reprenant le thème du début.
"The Weight Of The World" est un album qui se découvre lentement. Les contrastes sont rarement violents et les mélodies ne sont pas du genre du celles que l'on entonne en chœur mais elles finissent par s'insérer dans l'esprit. De quoi avoir envie de découvrir leur précédent opus – légèrement différent et peut-être un peu plus rock – pour ceux qui ne connaissent pas encore cette formation d'Outre-Manche sortant un peu des sentiers battus du rock progressif.