Où l’on retrouve à nouveau un casting international pour le deuxième album du trio des Samurai of Prog. Disons-le d’emblée, les albums de reprises sont généralement inégaux en termes de qualité et les derniers sortis dans le petit monde du progressif (Unitopia, Nektar) n’ont pas vraiment changé la donne. Ce nouvel album est-il meilleur qu’ « Undercover », le précédent opus, qui avait laissé un souvenir plutôt mitigé ?
Mais regardons plutôt la liste des morceaux dans le détail et là, surprise ! A côté des habituelles reprises de Genesis, King Crimson et Rush que l’on trouve dans ce genre d’exercice, on découvre également des artistes beaucoup moins connus (England, Crack, Sandrose, Utopia) et surtout beaucoup moins repris. Le trio a eu la bonne idée d’insérer également quelques unes de ses propres compositions (‘Sweet Iphigenia’ et ‘The Case Of Charles Dexter Ward’) qui ne dépareillent pas finalement avec le reste de l’album. Comme pour la plupart des projets Colossus (« Kalevala », « Odyssey »…), cela est dû surtout à l’instrumentation utilisée ainsi qu’à la production qui renvoient fortement au rock progressif symphonique des 70’s dont est issue la majorité de ces reprises, créant par là même, une unité de ton pour l’ensemble de l’oeuvre.
L’album commence par une reprise d’England dont l’unique album « Garden Shed » sorti dans l’indifférence en 1977 mérite d’être (re)découvert. Sans être un chef d’œuvre, ‘Three Piece Suite’ est un beau mélange de Yes et de Genesis qui ravira les amateurs de progressif « classique » ; de plus, Robert Webb, le claviériste et l’un des chanteurs du groupe originel vient apporter sa contribution. Une bonne entrée en matière. Nous continuons avec ‘Sweet Iphigenia’, une composition originale qui trouvera sa place dans la deuxième partie du projet Colossus ‘Decameron 2’. L’introduction rappelle les musiques de la Renaissance (logique me direz-vous si vous avez suivi la première partie du « Decameron ») avant de s’envoler vers des contrées à la Flower Kings. C’est d’ailleurs à ce groupe que font penser la plupart des compositions de l’album au final. Si vous aimez le progressif symphonique des « Rois de la Fleur », il est fort probable que vous appréciez l’objet de cette chronique.
La reprise de Crack (un obscur groupe espagnol auteur d’un album sorti en 1979) est très belle. Le violon remplace naturellement la flûte dans la version originale pour une composition enlevée et dynamique. ‘Before The Dance’ de David Myers est un morceau joué au piano qui permet d’introduire ‘Dancing With The Moonlit Knight’ de qui vous savez… ‘Aspirations’ est une ballade de Gentle Giant qui se contente d’être jolie. L’autre bonne surprise de la première partie de ce double album est la reprise de PFM ‘Traveler’ (1977) avec Mark Trueack (Unitopia) au chant en lieu et place de Bernardo Lanzetti. Est-ce un avant goût du « Covered Mirror vol. 2 » ? L’avenir nous le dira. Le reste est constitué respectivement de reprises de Matti Järvinen (il fallait la trouver celle-là), King Crimson, Sandrose et Yes (chanté par Jon Davison, actuel chanteur de Glass Hammer et… Yes !)
Le deuxième CD s’ouvre avec ce qui constitue à mon avis le meilleur morceau de l’album à savoir ‘Singring And The Glass Guitar’ d’Utopia (le groupe de Todd Rundgren). Cette composition épique, dans laquelle chaque instrument délivre un solo représentant une bataille contre les forces de la nature, referme l’album « Ra », dernier opus progressif du groupe avant le virage new-wave des années 80. On retrouve Phideaux Xavier au chant et Roine Stolt avec son inimitable jeu de guitare en invité pour ce grand moment de rock progressif. ‘Darkness’ (de Van Der Graff Generator faut-il le rappeler ?) voit Steve Unruh, le violoniste du trio, s’essayer à remplacer Peter Hammill au chant ; belle tentative mais il est difficile de faire oublier le timbre de ce chanteur si particulier. De la même manière, ‘Jaccob’s Ladder’ est tellement dans les esprits des amateurs de Rush qu’il est pratiquement impossible de considérer cette reprise autrement que comme un hommage appuyé au power trio canadien. L’album se termine avec une version alternative assez sombre de ‘The Case Of Charles Dexter Ward’ dont la version originale des Samurai Of Prog se trouve sur la compilation Colossus « The Stories Of H.P. Lovecraft - A Synphonic Collection ».
Au final, The Samurai Of Prog nous livre un copieux recueil où chacun trouvera probablement son compte en matière de rock progressif et fera peut-être même des découvertes. Un bel exercice qui représente plus qu’un simple hommage...