Chaque fois que l'on aborde l'écoute d'un album de Citizen Cain, groupe britannique apparu en pleine période néo-progressive au début des années 90 et qui après un long silence de 10 années est revenu sur le devant de la scène en 2012 avec la publication d'un nouvel album, le constat se révèle le même : la première audition "gratte fortement" les oreilles de manière peu agréable, et Raising the Stones, quatrième album du groupe paru initialement en 1997 et faisant l'objet d'une remasterisation comme l'ensemble de la discographie, n'échappe pas à la règle.
Et pourtant... Comme chaque chroniqueur dans le monde se plaira à le souligner, l'univers abordé par Cyrus et ses acolytes rappelle furieusement celui de Genesis. C'est tout d'abord son leader dont le timbre de voix singe plus que de raison celui de Peter Gabriel, au point d'en friser parfois la caricature. Ce sont ensuite de nombreuses sections, les plus mélodiques, que l'on pourrait sans peine voir extraites de la discographie de Genesis, sur la période couvrant les albums de Trespass jusque Wind and Wuthering, voire même Duke ! Vaste programme ! Tout concourt donc à ce que l'auditeur se retrouve en terrain balisé, l'acceptation de ce clonage relatif relevant ensuite de son bon vouloir à se laisser embarquer par le projet.
Mais, au-delà de ses repères rassurants, la musique proposée sur Raising the Stones s'avère beaucoup plus compliquée à assimiler que cette première approche ne pourrait le suggérer. En plus de ses emprunts à l'histoire, Citizen Cain ajoute une complexité qui vient perturber et quelque peu désorienter l'auditeur qui se laisserait bien embarquer dans un confort relatif.
Lorsque le groupe s'écarte de sa référence principale, c'est pour proposer des mélodies aux thèmes compliqués, dont les changements incessants de tonalité feraient frémir n'importe quel théoricien de la musique. Portés par un chant flirtant souvent avec les limites de la justesse, ces thèmes multiples aux enchaînements pas toujours évidents nécessiteront plusieurs écoutes avant de se laisser apprécier à leur juste valeur. De même, de nombreux passages instrumentaux techniques viennent s'insérer entre les différentes parties de morceaux à rallonge. Là encore, le groupe s'affranchit de nombreux codes et nous promène sans vergogne d'ambiances néo-progressives (introduction de Last Days of Cain) à des cavalcades furieuses de percussions rappelant l'univers de Stravinsky (Bad Karma, en y ajoutant une touche jazzy avec la présence d'un violon endiablé. Ces parties donnent ainsi tout leur cachet à la musique du groupe, et s'avèrent passionnantes écoute après écoute.
Les instruments rock classiques ne sont bien entendu pas en reste, et outre les nombreuses interventions de claviers, la basse virevoltante tenue également par Cyrus est particulièrement mise en valeur.
Encadré par deux epics, les deux titres majeurs de l'album, Raising the Stones est une œuvre qui nécessitera plusieurs écoutes attentives avant de révéler toutes ses splendeurs. J'encourage les novices de la musique de Citizen Cain à faire fi de la première impression "brute de fonderie" qui se dégage de la musique du groupe pour partir à la découverte de cette galette qui, loin d'être un simple clonage de la bande à Gabriel, propose une ouverture vers un univers qui titille les neurones.