Eternel second couteau peut-être, For Ruin n'en demeure pas moins un (très) solide artisan au service d'un Black Death plus lisse que brutal. Stagnant dans l'ornière de l'auto-production et disparus des écrans-radar (ceci expliquant sans doute cela) depuis 2009 et un Last Light de bonne mémoire, les Irlandais peinent toujours en définitive à vraiment s'imposer. Le fait d'ouvrir pour des pointures telles que Paradise Lost ou Rotting Christ n'y change rien. Ater Angelus corrigera-t-il cette injustice ?
A l'instar de ses aînés, cet album en a suffisamment sous le capot pour drainer un public plus vaste que celui-ci qu'il rencontrera au final. Toujours mené d'une main de fer par John Murphy, son incontestable leader, chanteur et guitariste au long cours dont il fut tout d'abord le projet personnel, For Ruin forge comme à son habitude un opus compact et direct, sachant aller à l'essentiel et qu'animent des titres aux lignes redoutables.
Seul oripeau de ses racines noires et granitiques, le chant rugueux du maître des lieux se charge d'enténébrer des compositions lourdes et sombres parfois ("Absentia"), accrocheuses toujours car émaillées de riffs nourris au grand et pur Heavy Metal qui les rendent des plus mélodiques. Toutes sont ainsi perforées de ces éclairs lumineux qui se combinent à une rapidité maintenue (presque) tout du long.
Hymne évident, "Unwinding" séduit par ses modelés entêtants creusant de profondes crevasses dans la mémoire. Il en va de même de "The Master is Here", mid-tempo au teintes envoûtantes ou de "Last Light" dont le nom est une manière de clin d'oeil à l'offrande précédente, avec laquelle Ater Angelus partage une constante référence religieuse. Une piste instrumentale, ici en guise de conclusion, achève cet édifice modeste mais attachant d'une formation trop peu connue et pourtant non dénuée d'une certaine personnalité, laquelle ne noue cependant aucun lien avec la sévérité minérale souvent de mise chez ses compatriotes de l'art noir, Primordial ou Altar Of Plagues en tête.
Et au final, le bilan qui s'impose au terme d'une écoute sans temps mort, est inchangé par rapport à Last Light à savoir la certitude d'avoir affaire à un effort en tout point imparable dont l'incontestable qualité ne devrait toutefois guère permettre à ses auteurs d'atteindre l'étage du dessus. Soutenu par un label, on imagine le succès que For Ruin pourrait connaître. Ce dernier a choisi la liberté, respectons-le pour cela...