En dépit de la prolifération de groupes liés à la scène post-metal-atmosphérique-technical-djent et autres intellectualisations musicales avec en fer de lance Animals As Leaders, TesseracT et Periphery, Aeris arrive à tirer son épingle du jeu avec un style unique, réunissant technicité et spontanéité. Avec "Temple", le groupe, dont les membres sont actifs dans de nombreux autres projets, nous offre une leçon de musicalité, illustrée par les ravissants dessins de Clémence Bourdaud.
Si l'on devait faire un reproche à "Temple", c'est sa longueur de 28 minutes ! A peine le temps de dire ouf que l'aventure est terminée. Et pourtant, le trajet en vaut bien la peine. Car ces 28 minutes fourmillent de plans, riffs, mélodies, laissant entrevoir toutes les influences des musiciens.
L'album est séparé en 3 parties. Le premier bloc, intitulé Flamme, réunit les 3 premiers morceaux 'Fire Theme', 'Hidden Sun' et 'Rising Light'. L'intro frappe très fort avec un son riff tout en tapping, et sa rythmique pachydermique. On retrouve là des structures rythmiques alambiquées à la Meshuggah dans lesquelles l'auditeur ne sait plus trop où donner de l'oreille. Mais rapidement, Aeris commence à montrer l'étendu de son univers avec un passage tout en retenu et une guitare envoûtante aux écritures jazz (on sent alors l'expérience du guitariste avec son groupe Sidony Box).
Sans que l'on s'en rende compte, 'Fire Theme' laisse place à 'Hidden Sun', dans un registre bien différent. Ici, la guitare se fait plus distordue et le morceau évolue dans un paysage Doom au tempo lent et oppressant, où les mélodies s'étirent jusqu'à l'infini. L'enchaînement avec 'Rising Light' se fait une nouvelle fois très naturellement, les morceaux ne présentant pas de coupures. Cette dernière partie de Flamme reprend en réalité le thème principal entendu au début du bloc, pour terminer le cycle.
La seconde partie, Richard Horizon Robot, dévoile un Aeris qui s'éloigne du registre metal et se rapproche de sonorités rock, où le groove trouve une place prédominante. On retrouve une structure similaire à Flamme, avec un 'Richard' servant d'introduction contenant son lot de riffs, de soli jazzy. Vient ensuite 'Horizon', interlude dépouillée avec en rôle principal une mélodie de guitare fragile et aquatique. Ce moment de calme au milieu de la tempête plonge l'auditeur dans un moment de douceur et de relaxation. Le bloc se conclut par 'Robot', hyper mélodique, évoquant le jeu de Tosin Abasi de Animals As Leaders.
Le dernier bloc, constitué du seul morceau 'Captain Blood', vient conclure le voyage en résumant l'aventure. Tout y est : le solo hyper inspiré, les arpèges éthérés, le final grandiose et sa cavalcade épique.
28 minutes, c'est vraiment court. On sort de "Temple" en en demandant plus, toujours plus ! Pourtant, il faudra encore bien des écoutes pour apprécier chaque mélodie, chaque arrangement. Car en 28 minutes, Aeris en dit beaucoup plus que bien d'autres formations.