Le groupe argentin de métal progressif Fughu avait déjà attiré l'attention avec son premier album en 2010 pour que l'on scrute avec intérêt toute nouvelle production. Ils reviennent aujourd'hui avec un ambitieux concept, 'Human', distribué sous la forme de deux albums distincts mais réunis au sein d'une édition limitée à la présentation très soignée.
Human (The Tales) :
Le premier volet de ce concept s'appuie sur les bases solides que Fughu a édifié avec 'Absence', à savoir un rock progressif inspiré des ténors des années 70 avec des influences prestigieuse et assumées (King Crimson, Rush, Dream Theater ou Tool). Les argentins alternent avec bonheur les compositions torturées ("Mayhem", "Evil Eyes") avec des productions plus dépouillées axées sur l'émotion et la sensibilité ("Goodbye", "Dry Fountain"). Mais de ce côté, la performance au chant de Santiago Burgi pourra rebuter certains car il a tendance à surjouer certaines émotions un peu à la manière d'un Domenik Papaemmanouil (Wastefall). On adore ou on déteste. Ses comparses livrent une prestation d'excellent niveau comme sur l'excellent "Inertia" ou l'inspirée "The Human Way". Ce premier volet ne révolutionne pas le genre mais il a le mérite de proposer une lecture très personnelle de la condition humaine et de la retranscrire avec émotion au travers d'une musique expressive et intéressante, comme ont su nous en délivrer les allemands de Beyond The Bridge l'an passé.
Human (The Facts) :
Fughu propose ici un travail plus conceptuel, plus risqué et un peu plus symphonique - essentiellement à cause des enveloppantes nappes de claviers atmosphériques - et plus riche également, puisqu'en plus de la voix pleine d'émotion de Santiago Burgi, le groupe a fait appel à Damian Wilson (Threshold, Headspace) et Dario Schmunck, ténor argentin apportant une dramaturgie lyrique à ce concept. Le travail est finement ciselé, complexe et parfois surréaliste, mettant en scène des personnages profonds servis par une narration progressive et symphonique très originale, proche parfois d'un style Opéra-rock, où se mêle de nombreuses émotion souvent contradictoires, entre douceur et désespoir, sublimées par des joutes vocales mémorables ("Climb", "The Play"). "Quirk Of Fate" bénéficie de la majestueuse interprétation de Damian Wilson, alors que "Vater" nous montre la formidable puissance émotionnelle de la voix intense de Dario Schmunck. 'The Facts' est un (ou deux) cran au dessus encore. Fughu signe une pièce majeure du rock progressif moderne qui se doit de figurer en bonne place dans toute discographie d'amateurs de musique progressive.
Ambitieux projet que ce 'Human', peut-être trop pour les argentins dont certaines lacunes empêchent le projet d'atteindre les sommets convoités. Avec un chanteur moins caricatural et un recentrage du propos sur l'essentiel, Fughu aurait pu nous sortir la surprise de l'année. Dommage, car ce sentiment d'être passé tout proche d'un album d'exception est assez frustrant. Il y a pourtant dans ces deux albums de quoi en faire un exceptionnel.
Au final, 'Human' mérite le détour et toute l'attention des amateurs de métal et de rock prog en particulier. 'Human (The Facts)' s'impose comme un "must have" tant le génie créatif du groupe est mis en exergue. Le potentiel de Fughu entrevu sur 'Absence' éclate au grand jour et si la progression continue sur la même dynamique, il y a fort à parier que la formation comptera parmi les pilier du genre dans les prochaines années.