Parfois 20 petites minutes suffisent à vous brûler ce qui vous reste de cerveau. Parfois 20 petites minutes se révèlent plus efficace que 60. Parfois 20 petites minutes ont l’air d’en faire le double.
20 minutes, c’est le temps que dure "Drei Rituale Jenseits Des Kosmos" qui vient enrichir, après deux prières pour les morts et deux splits, la discographie pour l’instant assez anarchique de Urfaust. Cauchemardesques, drapés dans une production sale et bourdonnante, les trois plages anonymes qui le structurent forment les mouvements d’un rituel incantatoire qui semble interminable, infini, affreusement lancinant et répétitif, déchiré par des cris d’agonie, des hurlements écorchés qui semblent exhorter les forces maléfiques, les exalter.
Urfaust nous convie à une messe noire, à une cérémonie impie dont il est le prêtre suprême et qui confine à la transe chamanique quasi hypnotique. Avec une économie d’effets louable, le duo réussit la gageure d’être cent fois plus inquiétant, plus dérangeant aussi que toutes ces faces de panda grimées à la truelle prenant la pause au fin fond d’une forêt.
Son art se rattache au black metal sans pour autant lui être vraiment féodé tant il s’affranchit de tous les invariants que le genre affiche comme autant de stigmates. Noir certes, mais avec ses allures de magma étouffant qui suinte des émanations sinistres, "Drei Rituale Jenseits Des Kosmos" touche à l’absolu car il se pare d’une aura cosmique immense et opaque. Mais on ne parle pas là de fumette et de musique planante. Ici la notion de cosmos est à prendre dans le sens philosophique du terme et renvoie donc à une réflexion sur le néant, l’univers et sur Ceux (ou Celui) qui l’ont créé.
Plus que jamais, Urfaust possède une place singulière au sein de la scène black metal. Occulte, ésotérique, intellectuel, élitiste et très difficile d’accès… Mais aussi d’une beauté rare pour qui saura l’entrevoir à travers les méandres intimes de ce trou noir sans fin.