Quand j'ai fait écouter Protest The Hero pour la première fois à mon cousin, il m'a dit "c'est marrant, dans ce groupe, il n'y a jamais aucun plan simple". Et pourtant, le quintet canadien a ce talent de rendre la complexité immédiate et efficace, grâce à des rythmiques puissantes et des riffs qui, bien qu'ultra techniques, ne sacrifient jamais leur musicalité et leur énergie.
Avec "Volition", leur quatrième opus, le groupe ne change pas sa formule miracle, un metalcore racé et subtil armé de la voix incroyable de Rody Walker, mais développe sa spontanéité, et livre ici probablement son album le plus simple d'accès. Cet album diffère de ses prédécesseurs par les conditions de sa gestation. On notera tout d'abord un changement de line-up, le batteur Moe Carlson quittant le groupe, et étant remplacé par Chris Adler (Lamb Of God) pour l'enregistrement studio, et Mike Ieradi pour la tournée. Le frappeur de remplacement n'apporte pas les influences métal et lourdes de son groupe d'origine mais les lignes de batterie ne perdent aucunement en explosivité ('Underbite'). Deuxième élément particulier de "Volition", il a été financé par crowd-funding, cette pratique qui consiste à demander des sous aux particuliers en échange de récompenses (chansons bonus, album en avant première, apparition aux crédits, etc). Ce procédé, utilisé par de plus en plus d'artistes, permet aux groupes de s'affranchir de labels pour sortir leurs productions dans les conditions qu'ils désirent.
Musicalement, "Volition" condense tout ce que Protest The Hero sait faire de meilleur. On retrouve la technique incroyable des musiciens très mise en avant sur "Fortress" avec un titre comme 'Without Prejudice' et ses guitares fulgurantes aux phrasés néo-classiques marqués, mais aussi la basse tenue par Arif Mirabdolbaghi, aussi à l'aise dans le groove lancinant que dans les rythmiques les plus saccadées et rivalisant de vélocité avec les 6 cordes sans le moindre soucis. 'Yellow Teeth' ou encore 'Mist' rappellent l'époque "Kezia", sorte de narration barrée, illustrée de cavalcades épiques, de changements de rythmes brutaux ou de descente de guitare dissonantes. On verra également l'aspect plus progressif de "Scurrilous", sur 'Plato's Tripartite' par exemple.
Mais "Volition" a sa personnalité propre, avec une approche punk et spasmodique. Les passages s'enchainent à une vitesse hallucinante, ne laissant pas à l'auditeur le temps de s'en remettre. A l'image de 'Clarity' ou 'Animal Bones', on s'en prend plein la figure pendant ces 54 minutes et on en redemande tellement l'adrénaline inonde le système nerveux ! L'album présente aussi beaucoup de guests, principalement au chant, avec notamment Jadea Kelly, qui "jouait" déjà le rôle de Kezia dans l'album du même nom. 'Drumhead Trial' fait intervenir pas moins de 3 invités, avec un superbe duel de guitare, et la charmante voix de Kayla Howran au contre-chant.
"Volition" ne marque certes pas un tournant dans la discographie de Protest The Hero, ne révolutionnant pas le son du groupe, mais au contraire, assied son propos. Les canadiens montrent qu'ils maitrisent leur style à la perfection et qu'ils ont digéré leurs précédents opus. On pourra reprocher un certain manque d'expérimentation et de volonté d'aller voir ailleurs puisque seule la présence des invités apporte une nouveauté réelle. L'album reste néanmoins une réussite et un très bon point d'entrée pour découvrir la carrière de ces 5 furieux de la musique.