Tout ce que touche Yuval Kramer se transformerait-il en or ? Omb est le nouveau projet du génial leader et guitariste d'Amaseffer. Il est encore question ici de métal progressif puisque le jeune israélien semble être tombé dans la marmite quand il était petit. Il y retrouve des compagnons de jeu habituels tels Davidavi Dolev au chant (Reign Of The Architect), Yuval Tamir et Or Rosenfeld, tous anciens membre de Black Marbles, groupe de métal de Haifa. Du prog, mais pas que. "Swinesong" y mêle également du folk sur un fond d'Avant-garde métal technique et déjanté. Originellement invité comme ingénieur du son, Kramer a intégré le groupe en tant que membre à part entière depuis 2012 pour y insuffler son expérience et son talent.
"Swinesong" est un concept album qui aborde des thèmes personnels et torturés tels l'estime de soi, l'amour, le sexe, la frustration, les promesses non tenues, les troubles de la personnalité, etc ... Inutile de préciser qu'avec de tels sujets, la musique ne ressemblera pas à une valse viennoise. Autant à travers les textes, les arrangements que la musique elle-même, Omb véhicule des émotions en accord avec le concept abordé, sur fond de métal prog technique, avant-gardiste et accrocheur.
Après une intro sur fond de violon au sonorités faussement joyeuses et inquiétantes, 'These Walls ...' donne le ton d'un album galopant sur fond de métal classique à la Maiden avant que la frénésie ne s'empare des musiciens et de Dolev pour une fresque psychotique déjantée et endiablée. Entre envolées métal et breaks aux orchestrations symphoniques et acoustiques, Omb nous embarque dans un univers onirique dont il ne faut pas perdre le fil sous peine de décrocher très vite. Les titres percutants et perturbés (vous avez dit perturbants ?) s'enchaînent sans temps morts. La narration de certains passages installe une ambiance qui sert le concept. Omb raconte ses histoires en les faisant vivre à son auditoire. Paroles et musiques sont au service permanent du concept, telle 'An Ordinary Caveman Sings Ode To Obsession' dont les tempos successifs dépeignent la frénésie obsessionnelle du personnage.
Comme annoncé plus haut, il faut s'accrocher pour ne pas être largué par un propos intense et une musique aussi virevoltante qu'elle est décousue. Les arrangements souvent complexes et l'aspect conceptuel de l'opus nécessiteront plusieurs écoutes pour en appréhender toutes les subtilités. Les quelques moments de répit se trouvent dans les intros acoustiques teintées de folk et dans quelques breaks, mais ils ne constituent pas l'essentiel des titres, comme l'intro doucerette de 'A Smaller Dose Of Tyranny" qui s'enflamme très vite avec une performance vocale ébouriffante de Davidavi Dolev (comme sur la majorité des titres d'ailleurs) parfaitement secondé par des growls inquiétants donnant une noirceur qui le dispute à la folie sur la fin du morceau.
Et les musiciens sont à l'unisson de ce concept torturé et frénétique. Leur irréprochable technique leur permet les digressions que ce genre avant-gardiste laisse augurer. Kramer est au sommet de son art. Il varie les touchés et les rythmiques au gré des nuances de chaque titre, tantôt en arpèges acoustiques, tantôt en riffs syncopés ou en solos endiablés. L'éventail de possibilités que son talent lui confère autorise une variété de jeu étonnante et criante d'authenticité. La section rythmique effectue aussi un travail remarquable tant les rythmes s'enchaînent de façon fluide malgré la sinuosité des compositions. De nombreux autres instruments (violons, cuivres) viennent ajouter une touche originale et parfois symphonique (heureusement que Beethoven était sourd) à un album qui, décidément, foisonne de bizarreries et d'idées hors normes.
Torturée, déjantée, technique, épique et résolument métal, la musique d'Omb est difficile à classer mais elle mérite une écoute attentive, voire studieuse, tant elle regorge de richesses. Il vous faudra donc apprécier le métal sous toutes ses formes, avant-gardiste, progressif, épique ou encore extrême. 'Swinesong', fruit d'un travail de création originale et d'une maîtrise technique totale, mérite ainsi que l'on s'attarde sur son cas, comme dans chaque projet où Yuval Kramer est à l'affiche. Est-ce vraiment un hasard ?