L'inconnu talentueux qui se cache derrière le nom trompeur de The Psychedelic Ensemble a encore frappé. Il nous revient comme à son habitude avec un concept album ambitieux, gorgé de musiques symphoniques et virevoltantes frappées du sceau d'un progressif agencé et exécuté selon les règles de l'art. Cerise sur le gâteau, la présence d'un orchestre symphonique et d'une chanteuse feront certainement baver d'avance les fans du genre.
Et il est vrai que les premières minutes du titre d'ouverture judicieusement appelé 'Overture' font illusion : une instrumentation ample mélangeant l'orchestre et les instruments électriques compose une introduction classico-cinématique du meilleur effet, augure d'un excellent moment musical. La deuxième partie du titre, plus enlevée et plus électrique, sert surtout de prétexte à des envolées à la guitare et aux claviers jouées à un train d'enfer, dont l'impact est amoindri par quelques effets de répétition et l'impression que la trame musicale s'égare un peu par moments au profit de la seule rapidité d'exécution.
Ce titre condense toutes les qualités et tous les défauts qu'on pourra trouver à cet album. Côté qualités, on retrouve un foisonnement d'idées, une profusion de solos à la guitare et aux claviers (le nom d'ELP vient souvent à l'esprit) faisant montre d'une grande virtuosité, de belles prestations vocales tant masculines que féminines, la présence de chœurs bien dosés et de beaux moments mélodiques. Mais ces belles dispositions sont contrariées par trop de générosité, trop d'idées, trop de changements de rythmes, trop de superpositions de couches instrumentales et vocales, trop de force et de vitesse, … trop de tout. Cette surabondance noie l'auditeur et le perd, oubliant au passage de garder une petite place pour l'émotion.
C'est énervant car il y a de très beaux moments qui se trouvent malheureusement perdus au milieu d'autres plus quelconques. On a l'impression qu'à trop vouloir montrer ses indéniables qualités de composition et d'exécution, The Psychedelic Ensemble a réuni en un album suffisamment d'idées pour en enregistrer plusieurs. Les meilleurs passages se trouvent finalement ceux durant lesquels l'orchestre arrive à s'exprimer seul ('Overture', le début et la fin de 'The Golden King', 'Finale') ou sur lesquels la gracieuse voix d'Ann Caren se pose ('The Queen Of Sorrow', 'Great Day'). Musicalement, on voyage entre ELP et Yes avec le panache parfois verbeux des premiers et la complexité quelquefois prise de tête des seconds.
The Psychedelic Ensemble est comme un volcan sous pression prêt à déverser des jets de lave musicale à tout moment, semblant avoir des difficultés à canaliser son énergie, ce qui donne un côté un peu "foutoir" à l'album. Le disque ressemble à un gros gâteau à la crème : l'extérieur est appétissant et les premières bouchées délicieuses, mais l'abus de sucreries finit par le rendre écœurant. Si je peux paraître sévère, cela part de l'adage selon lequel qui aime bien châtie bien. The Psychedelic Ensemble dispose d'un énorme potentiel qu'il a tendance à gaspiller dans une surenchère de moyens : on a toujours l'impression de passer à deux doigts de quelque chose d'intéressant mais on reste finalement sur sa faim. Les amateurs de virtuosité pure y trouveront peut-être leur compte, ceux qui lui préfèreront l'émotion seront plus difficilement conquis.