Si le sacrificiel "O Solitude" dont la vertigineuse noirceur a enveloppé nos âmes d'un linceul de désespoir était un digne représentant de la chapelle du doom funéraire, cette seconde hostie, en revanche, met tout en oeuvre pour transcender ce genre déjà très codifié.
La pochette, qu'illustre une entrée d'église, fonctionne comme une invite. Les chants liturgiques, comme échappés du"Nom de la rose", posent le décor, avant qu'une voix majestueuse et sentencieuse viennent égrainer des paroles de souffrance et de pardon. Déjà perceptible sur l'album précédent, le caractère religieux de la musique enfantée par Pantheist, qui compte alors dans ses rangs un membre de Esoteric (une référence donc, pour les connaisseurs), fait désormais plus que seulement colorer par petites touches les chansons, il les imprègne cette fois en profondeur, jusque dans leur âme.
Du nom des morceaux ('Envy', 'Lust', 'First Prayer', 'Wrath') aux atmosphères empruntes de gravité et de solennité, du chant déclamatoire si particulier, à ce son d'orgue ténébreux, tout dans "Amartia" suinte une sorte de religiosité obscure, au point de pourvoir qualifier le style du groupe, de doom liturgique, qu'il est d'ailleurs le seul à forger.
Cette seconde offrande ne se veut donc pas une simple resucée de son prédécesseur. Sa construction plus fragmentée le démontre également : dix titres d'une longueur un peu plus raisonnable (comprendre : ils ne dépassent que très rarement les dix minutes) se succèdent, agglomérés au sein de trois chapitres pour une durée totale de plus de 75 minutes tout de même, alors que "O Solitude" s'apparentait davantage à un bloc compact, divisé en 5 segments.
Mieux écrites, car plus denses et ramassés, ces nouvelles enclumes n'hésitent pas non plus à emprunter des chemins qui les éloignent des canons en vigueur au sein d'un genre qui se définit en premier lieu par sa lenteur agonisante. Avec ses guitares grésillantes et son accélération finale démentielle, 'Wrath' patauge allègrement aux confins du black metal, avant que le superbe et contemplatif 'Metatonia' ne vienne rétablir l'équilibre. "Amartia" est de ce fait de prime abord difficile à cerner, surtout pour qui s'est laissé engourdir par "O Solitude". Il n'est pas un album qui livre ses secrets facilement.
Néanmoins, il démontre que Pantheist n'est pas une entité figée. Le funeral doom, et ses règles édictées par les grands Anciens (Thergothon, Skepticism...) lui servent de fondations. Elles constituent de fait le socle sur lequel est érigé un monument aux multiples ramifications et qu'une vie entière, si les musiciens poursuivent dans cette voie, ne suffira pas à en explorer toutes les sombres arcanes.