On connaît mal les travaux de The Floating World, jardin secret et solitaire de Amanda Votta, artiste américaine dont le nom s'est vu associé au fil des années à ceux de New Risen Throne, Gustaf Hildebrand (avec Lacus Somnorium) ou encore Secrets To The Sea, son principal port d'attache. On touche là donc les profondeurs de la Dark Ambient dans ce qu'elle a de plus abyssal et obscure.
"The Apparition", qui scelle l'alliance avec le passionnant label Cyclic Law, nous livrera peut-être la clé de cet univers mystérieux. Ou pas. Car la lisibilité accrue du projet, corrolaire de la signature avec l'écurie canadienne ne signifie pas que la musique de The Floating World ait gagné en accessibilité ou alors on n'ose imaginer dans quel hermétisme doivent baigner "Full Sturgeon Moon", "Unda" et "River Of Flowers".
Extrêmement aride, l'oeuvre repose sur un substrat synthétique étouffant auquel Amanda Votta greffe des soundscapes frissonnants et quasi insaisissables. C'est peu dire que l'on ne retient tout d'abord rien de ce maelström glacial, où se superposent des strates aux confins de la musique industrielle ('Vernal').
Fantomatique et unique vigie guidant l'auditeur dans ces nappes oppressantes, il y a cette flûte égrenant des sons hantés comme échappés des limbes ('Succor'). C'est peu. Des voix, rares toutefois, sont présentes mais on ne les discerne qu'avec difficulté tant elle résone davantage tel un écho funèbre, à l'image de 'If Only The Moon' où l'on identifiera avec peine le texte d'Oscar Wilde ("Salomé") qui lui sert de support.
Etonnamment, "The Apparition" possède une dimension littéraire et artistique bien réelle. Ainsi, outre la référence à l'auteur du "Portait de Dorian Gray", le livret détaille chaque titre par le biais de quelques lignes cependant qu'une citation du peintre Gustave Moreau, soit autant de détails qui renforce la singularité d'une création qui peu à peu se livre, offre son intimité étrange et, pourquoi pas, poétique également, reflétant par là-même l'ambivalence constante de ces pistes où s'entrelacent atmosphères oppressives et beauté spectrale ('Chromatic Abberations I').
Entre Drone bourdonnant et Ambient évanescent, The Floating World signe un album exigeant, reflet de paysages mentaux désincarnés qui pourtant renferme plus d'âme que biens de vaines explorations Dark Ambient souvent vides de sens.