Bien avant que la publicité ou le langage courant nous bourre le mou avec l’expression "c’est qui le patron ?", de l’autre coté de l’atlantique tout le monde connaissait la réponse à cette question. Le patron, The Boss en anglais, c’est Bruce Springsteen. Les chiffres parlent d’eux mêmes : plus de 40 ans de carrière, 18 albums studio, presque autant de compilations et de lives et surtout des concerts à rallonge dépassant allègrement les 3h00.
Après cette série de superlatifs, il semblait quasiment évidement que la toute nouvelle production du Boss provoquerait un épiphénomène. C’est ainsi que quelques jours avant sa sortie officielle, "High Hopes" s’est retrouvé par erreur sur des plateformes d’achat en ligne.
Intéressons nous à présent au contenu de ce dix huitième album studio. A la lecture des titres des 12 plages un sentiment de déjà vu s’installe. En creusant un peu, on se rend compte qu’il n’y a finalement que 6 nouvelles compositions, le reste étant soit des reprises, soit de nouvelles versions issues de la discographie du Boss. Nous voilà donc face à un méta-disque, issu du croisement de la compilation et de l’EP.
Aux avant-postes nous trouvons Tom Morello (Rage Against The Machine) qui apporte une note plus électrique à de nombreux titres notamment sur 'The Ghost of Tom Joad’ gratifié de deux longs solos de guitare dont un assez elliptique. Mais la participation du guitariste ne se limite pas à cela puisque de l’aveu même de Bruce Springsteen, Tom Morello l’a inspiré et surtout incité à réaliser ce disque atypique. Le Boss assume son coté engagé en proposant une magnifique version de ‘American Skin (41 shots)’, hommage à un jeune noir non armé tué de 41 balles suite à une bavure policière. Dans la même veine nous retrouvons également une version de ‘The Wall’ qui évoque le Vietnam. La plage permet de profiter de quelques cuivres assez funestes renforçant le coté tragique de l’histoire. Sur le plan des inédits tous les ingrédients habituels de l’artiste sont présents avec des ballades folk, quelques cuivres et des choeurs pour une musique sentant bon le terroir et s’aventurant même parfois dans des registres proches du Gospell ('Heaven’s Wall'). En résumé les compositions restent très conventionnelles mais portées par une voix toujours aussi agréable.
"High Hopes" pourra sans peine constituer un fond sonore abordable auprès du grand public mais qui malheureusement ne retient pas vraiment l’attention. Faire du neuf avec du vieux et racler les fonds de tiroir n’est pas toujours une bonne chose. Bruce Springsteen n’a plus rien à prouver mais il aurait pu mieux faire et surtout éviter de travailler à l’économie.