Deux années après “Jessica”, Jeff Green nous livre “Elder Creek”, un album-concept sur la place de la mémoire dans la vie (vaste sujet!). Entouré de la même équipe que précédemment, Jeff a laissé de côté l’orchestre mais a convié quelques guests, entre autres Alan Reed de Pallas et Sean Filkins de Big Big Train.
Débarrassé des pesanteurs orchestrales, “Elder Creek” apparaît plus digeste que son prédécesseur, présentant un côté progressif classique assez rétro 80’s ce qui colle assez bien avec le côté nostalgique se rattachant à la mémoire. La production sonne toutefois plus moderne, notamment grâce à une rythmique qui sait se faire plus appuyée (‘Gordian Knot’). L’accessibilité des mélodies rend le propos très assimilable et n’effarouchera pas les allergiques aux genres métalliques.
Par contre, les amateurs de progressif vintage ou les désireux de sensations nouvelles risquent fort d'être déçus. C’est que l’album est hautement conventionnel dans la composition et le traitement des mélodies ... et les références qui viennent à l’esprit lors de l’écoute - agréable et fluide - de cet “Elder Creek” sont assez datées : piano wakemanien dans ‘Gordian Knot’, guitare et tubular bells très oldfieldiens dans ‘Point Blunt Light’, thème pop-funk typé 80’s de ‘Elder Creek’, collages de samples vocaux déjà entendus dès 1968 dans ‘Revolution 9’ des Beatles, chœurs plus dignes des Kinks que de Moon Safari (‘Our First Meeting’)... Ajoutons à cela quelques mièvreries persistantes, tel le chant trop émotionnel de ‘Loops and Threads’, ou les vocalises sur fond d’arpèges de synthé de la fin de ‘Gordian Knot’... Tout ceci ne renouvelle pas le genre qui fait appel à tous les clichés du progressif classique : intro en mesures impaires dès le début de l’album, l’entame atmosphérique (bruits de nature) de la pièce maîtresse de l’album, ‘A Long Time From Now’, passage obligatoire par l’epic de 20 minutes, truffé de breaks assez convenus.
Cet avis pourra paraître sévère concernant un album qui s’écoute facilement. Seulement, celui-ci paraît lesté de tics et de poncifs et il aura bien du mal à surprendre l’auditeur habitué aux circonvolutions du prog moderne. Heureusement les mélodies sont là, notamment dans les soli de guitare, mais l’impression de déjà-entendu risque fort de l’emporter chez la majorité des familiers du style progressif à tendance symphonique.