Protean Collective est une découverte alors même que les bostoniens ont déjà sorti un EP et un album en 2010. Hormis le fait que le guitariste principal de ce quatuor soit une femme et que le mastering soit exécuté par l’ubiquiste Jens Bogren peu d’informations peuvent être glanées concernant l’univers des américains.
De composition collégiale et sur des idées souvent amenées par Steph Goyer, "The Red And The Grey" est un disque plutôt apparenté au métal progressif. Les mesures inaugurales donnent déjà des indices sur la place tenue par la section rythmique dans ce groupe. Les impressions initiales portant sur l’importance du jeu de Matt Zappa ne seront jamais démenties tout au long de ce disque. Celui-ci, bien accompagné par Dan Ehramjian à la basse, vient dynamiser une musique très sombre portée par la voix medium et parfois brumeuse ('Until We're Bones') de Graham Bacher. Les premières écoutes ne viennent pas clarifier le contenu de "The Red And The Grey" qui demeure dense et complexe. Dans des formats compris entre quatre et sept minutes pour l’ensemble des onze titres, les américains ont ramassé une forte quantité de données harmoniques rendant très ardues l’assimilation (‘The Red And The Grey’), au moins dans les premiers temps.
Heureusement, quelques moments évocateurs de grands noms du métal prog donnent les moyens pour l’accroche indispensable à l’envie de réécouter le disque. Citons notamment le côté fusion de DeadSoul Tribe dans ‘In Waves’, l’atmosphère très pesante sur-vitaminée en basse à la Jolly dans ‘I Waited’, la frénésie de Mastodon qui irrigue ‘Exposed’ et les progressions d’accords opethiennes sur ‘Room 16’. Ce n’est que la patience, vertu coutumière des amateurs de métal progressif, qui viendra révéler au fur et à mesure les richesses mélodiques de refrains qui ne se livrent pas facilement (hormis peut être pour ‘Quiet In Wartime’) et le profond charme de l’ensemble de l’édifice. Cohérence et cohésion sont les grandes forces d’un collectif sûr des ses qualités et qui ne fait aucune concession sur son approche musicale élitiste.
A l’instar d’un Tool qui ne badine pas avec la complexité Protean Collective excelle dans le tissage rythmique savant et la texture mélodique subtile. Seule réserve sous forme de regret, la mise en son très pure mais qui donne une couleur trop standardisée à l’ensemble alors que l’authenticité et la singularité du groupe auraient gagné à s’exprimer aussi dans la production. Au-delà de ce détail "The Red And The Grey" est un disque exigeant à la constance sans faille qui passionnera les estomacs robustes.