Pour le sextet italien, "vitriol" n’est pas la substance acide sulfurée mais une sentence maçonnique et alchimiste qui inspira le groupe lors de la conception de son EP éponyme en 2009. Le groupe décida de s’éloigner de cet ésotérisme lors de la création conceptuelle de son premier album "Into The Silence I Sink" qui traite… du silence en tant qu’absence de communication. C’est ce dernier, sorti en fin de 2012, qui nous intéresse aujourd’hui tout particulièrement.
Avec ‘Behind The Electric Veil’ l’album démarre sur les chapeaux de roue. Même si Vitriol se veut adepte d’un métal progressif original et sombre il n’en demeure pas moins nourri par Pain Of Salvation et Dream Theater. C’est particulièrement le cas pour ces derniers à l’occasion du basculement couplet-refrain de ce premier morceau très caractéristique des américains alors que c’est véritablement structurel concernant les suédois. Les refrains sont d’ailleurs très travaillés avec de belles intentions de Gianluca Pappalardo dont les harmonies peuvent rappeler celles pratiquées par Jan Henrik Ohme de Gazpacho (‘Arabesque’). Mais n’insistons pas plus sur les parallèles entre les transalpins et le patrimoine progressif mondial car à dire vrai Vitriol sait se démarquer par l’alternance des tissages métal et des séquences éthérées qui façonne une bonne partie du disque. C’est ce qui pourrait faire sa force à l’avenir alors que pour l’instant c’est ce qui explique que sa constance et son identité soient encore fragiles.
Alors que les compositions de moyenne durée comme ‘Despite Your Cries’ ou ‘Slowly She Dies’ arrivent à trouver une ligne directrice les longues aventures sont plus difficilement abordées. ‘Endless Spiral’ est un morceau qui n'arrive pas à mettre bout à bout des passages qui pourtant ne manquent pas de qualité, comme la démonstration vocale de la fin de première partie. La séquence instrumentale qui suit n’apporte pas de réelle plus-valu à l’ensemble. Un léger mieux avec le second gros morceau de l’album ‘Three Times’ qui entretient une vraie tension sur plus de la moitié des neuf minutes et dont la jonction avec l’interlude atmosphérique central est maîtrisée. A l’instar d’un groupe comme Protean Collective les italiens sont créateurs d’un métal progressif technique difficile à digérer mais celui-ci n’arrive pas à amener la même émotion selon les nuances de densité et d’énergie d’un morceau.
"Into The Silence I Sink" possède assez de bons moments de métal progressif pour traiter le travail des italiens avec sérieux et considération mais cela n’est pas suffisant pour enthousiasmer totalement l’écoute. Les prestations de Gianluca Pappalardo sont généreuses, fragiles ou puissantes selon les thèmes mais les mélodies et les textures instrumentales qui lui servent de trame n’offrent pas l’unisson adéquate à l’expression d’émotions franches. C’est dans cette dichotomie que réside le potentiel de cette formation et aussi l’essentiel de ses efforts à fournir, à notre sens, pour vraiment s’affirmer.