En pleine période frénétique des guitaristes virtuoses, quelle ne fut pas l’excitation quand le passionné put dénicher un nouveau son, une nouvelle approche de l’instrument. Michael Lee Firkins fut indéniablement de ces découvertes qui enthousiasmèrent nombre de mélomanes, dont votre serviteur faisait partie. Après l’excellent "Chapter 11" nous nous étions écartés du travail de l’américain alors que celui-ci continua à produire les albums et à multiplier les activités musicales.
Armé de sa Reso-Tele, modèle unique hybride de Telecaster et de dobro, Michael laisse ses appétences de guitariste slide s’exprimer à plein régime dans une variance blues-rock southern-country bien à lui ancrée dans la moiteur du bayou. En plus d’être le virtuose qui a poussé le picking au rang de langage, dans "Yep" il fait fumer le bottleneck comme jamais pour en tirer toute la force et l'ingéniosité de son jeu (les soli de ‘Long Day’ et ‘Out Of Season’ sont des bijoux). Mais la nouveauté est que Michael s’improvise chanteur sur la totalité des onze titres de ce long album. Le moins que l’on puisse dire est que son premier essai au micro, qui remonte à l’album "Black Light Sonatas" en 2007, est parfaitement transformé dans "Yep".
Rendons tout de suite hommage au groupe expérimenté (tous ont été, entre autres, membres de Gov’t Mule) qui accompagne Michael et qui développe autour de lui cet esprit vintage en même temps que terriblement actuel. Le quartet s’est parfaitement trouvé et œuvre dans une cohésion qui participe grandement à la réussite de ce disque original, irrésistible et plein de groove (‘Last Call’). La grande force de Michael Lee Firkins est une créativité qui va au-delà de son tropisme blues-country. "Yep" est un album fortement coloré de la culture sud étasunienne agrémenté de la recherche mélodique que Lee Firkins puise dans sa maîtrise du rock et du métal (le Pride & Glory de Zakk n’est pas loin dans 'No More Angry Man' et 'Cajun Boogie').
"Yep" est une vraie belle surprise que nous a concocté le généreux Michael Lee Firkins, cinq ans après son dernier album. De plus cette sortie aura été l’heureux prétexte pour se replonger avec gourmandise dans la discographie de l’américain qui a eu l’intelligence d’évoluer du shred pur des débuts vers une perspective plus radicale. Aux réfractaires du style pratiqué ici, sachez que le rock authentique transpire dans chaque seconde et à chaque note de cet album et que l’enrobage folklorique affiché n’empêche jamais d’être rapidement touché par la classe, l’écriture et l’émotion transmise de Lee Firkins. "Yep", comme l’ensemble de la discographie de l’américain, est vivement recommandé.