Bien que signé chez Cyclic Law, Parhelion pourrait se fondre à merveille au sein du catalogue d'une autre officine elle aussi vouée à l'Ambient, celle du plus confidentiel mais non moins intéressant Glacial Movements. Car Ihor Dawidiuk, son unique créateur, trouve dans la beauté immaculée des contrées polaires sa muse, thème des plus singuliers présidant à l'élaboration de toutes les productions du label italien. Il est même sans doute de ceux qui parviennent le mieux à capter l'étrangeté de ces terres glacées et quasi irréelles.
Découvert en 2010 avec le très beau "Midnight Sun", le Canadien poursuit son exploration sonore en s'associant cette fois-ci avec un autre musicien avec lequel il est spirituellement connecté, l'Autrichien Zac Keiller. Il était écrit qu'ils se rencontreraient, collaboreraient à un projet commun. De cette alliance naturelle voit aujourd'hui la nuit, plutôt que le jour, "Farthest North", oeuvre à quatre mains, fusion plus qu'addition de deux personnalités complémentaires.
Mais plutôt que de vouloir vainement chercher la signature de chacun des deux protagonistes, mieux vaut se laisser couler dans ces nappes frissonnantes capables à elles seules de draper d'un épais suaire de givre tout ce qui les entoure. Unique, l'album a quelque chose d'un iceberg dérivant pour l'éternité à travers un océan gelé. Le duo nous convie à un voyage dont la puissance d'envoûtement n'en altère jamais la dimension hantée, l'aura obscure qui semble provenir de très loin, spectre insaisissable traversant la barrière de brouillard qui nappe ces étendues mystérieuses aux confins du fantastique.
Si sa partie centrale se pare de teintes plus légères, plus duveteuses, proches d'un Post-rock intimiste ('Abode Of Light'), égrenant une atmosphère squelettique ourlée de tristesse cristalline ('Opal Sky'), "Farthest North" pulse d'une noirceur hypnotique, tapis glacial qu'étirent des soundscapes souvent inquiétants ('Perfect Desolation') mais toujours d'une force d'évocation d'une sidérante beauté, à l'image de 'Smokey God', élévation engourdie au souffle fantomatique et résonnant de sons désincarnés.
L'opus sculpte des paysages figés par le froid, vierges de la moindre trace de vie... Il matérialise toute l'étrangeté des ambiances qui se dégagent de ces roches qui affleurent, tranchantes et séculaires, géographie à la fois pure et rocailleuse. La longue plainte éponyme résume a elle seule cette espèce d'irréalité, piste terminale qui gronde d'une puissance souterraine qui peu à peu se réveille et s'élève en un ressac oppressant.
Notes grêles d'un désespoir frissonnant, murmures lointains et nappes spectrales viennent se greffer à ce socle neigeux, surgissant telles des silhouettes granuleuses à travers ce blizzard pulsatif qui emporte tout, propulsant l'album vers une apothéose sombrement hypnotique. A noter que celui-ci est vendu avec un DVD d'une vingtaine de minutes durant lesquelles défilent des images de glaciers qu'accompagne cette bande-son spectrale.