Sur Music Waves, le Panda aime vous faire voyager. Après des destinations aussi variées que la Pologne, la Roumanie, la République Tchèque, la Suède, l'Italie, le Japon et la région PACA, aujourd'hui c'est dans les Hauts Plateaux d'Asie de l'Est que l'on va faire un tour et plus précisément à la frontière entre la Mongolie et la Chine.
Depuis 10 ans maintenant, Hanggai nous propose de découvrir la musique traditionnelle mongole, mais savamment couplée avec une approche et des sonorités résolument punk-rock. Le résultat est surprenant, et dépaysant bien sur, mais ce "Baifang" est surtout une porte vers de nouveaux paysages que l'on a rarement l'occasion d'aborder et qui se révèlent d'une grande richesse et d'une grande beauté.
Hanggai est avant tout un groupe de musique mongole qui véhicule son héritage culturel à travers sa musique, ses sons et ses instruments. On en retrouve justement deux assez originaux : le Tobshuur, une sorte de guitare mongole, et le Morin khuur, un grand violoncelle à deux cordes produisant un son chaleureux. Ces deux engins donnent immédiatement sa coloration ethnique à la musique du groupe. On pourra les entendre tous les deux dès le 1er morceau, l'éponyme 'Baifang (Back To You)' et un peu partout sur l'album.
L'autre force musicale du groupe est son usage incroyable des voix. Le chanteur principal utilise en effet une technique appellée chant de gorge. Variation du chant diphonique, elle donne un effet hypnotique aux lignes vocales, presque incantatoires, extrêmement audibles sur 'Huhe Namijila'. Le groupe utilise également les harmonies à plusieurs voix, donnant des résonances merveilleuses.
Les paysages explorés sur "Baifang" sont absolument superbes, riches, intenses et nous renvoient aux images que l'on a pu voir ou imaginer de cette région du globe. On aperçoit les grandes plaines et les cavalcades à cheval sur 'Hershut Hero', les vastes forêts dans 'Tavan Hasag', ou encore, proximité avec la Chine voisine oblige, des visions de la Grande Muraille sur 'Miss Daughter (Missing You My Daughter)'.
Mais ce 3e album de Hanggai s'inscrit aussi dans la modernité, et présente une facette plus actuelle, plus urbaine de la production musicale mongole. Si le groupe utilise les instruments traditionnels, ces derniers sont complétés par une formation qui révèle l'héritage rock des musiciens, revendiqué à travers des noms comme Rage Against The Machine, Electrelane ou encore Radiohead et Pink Floyd. L'intro de 'Hong Galou' pourra rappeler les grandes heures du grunge de Seattle par exemple. On retrouve des influences folk, presque americana, sur le superbe 'Beautiful Mongolian Horse' notamment, ou sur 'Golden Autumn'. Le groupe propose même deux morceaux, prodiges de fusion, révélant tout l'art du groupe pour mélanger ses influences : le très bluesy 'Gold Buttons', et la bombe reggae 'My Mother', qui pourrait sortir tout droit d'un album des Clashs. A travers tous ces morceaux, Hanggai livre un portrait de culture mongole moderne, loin des clichés et des images de National Geography. 'Ulanbator Nights' nous propose ainsi une balade nocturne dans les rues de la capitale.
"Baifang" est un bel album, à bien des égards. Musicalement tout d'abord, puisqu'il propose des compositions très travaillées, aux mille arrangements et sonorités variées pour un résultat à la croisée des genres, entre musique traditionnelle, rock, blues, punk, et même post-rock par moment. Mais il est aussi l'occasion de la découverte d'une culture que l'on connait mal. Alors si on laisse de côté les préjugés et l'effet "resto chinois", on part pour un très beau voyage à travers les régions des Maitres des Chevaux.