Au petit jeu des classements par genre, il y a des disques qui s’évertuent à déclencher de longues polémiques. Bien qu’ils demeurent rares, ils sont néanmoins délicats à chroniquer tant les portes d’entrée classificatrices qu’ils ouvrent sont multiples.
Bien souvent synonyme de richesses musicales, d’idées conceptuelles foisonnantes, les opus en question prêtent aussi le flan à des critiques relatives à la dispersion créative ressentie ou à l’absence de cohésion du produit. Bref perdre l’auditeur en route en le conduisant à ne pouvoir se vouer à aucun saint peut être le revers de la médaille d’une imagination débordante. "Requiem", le second album du groupe suédois Jono est de ceux-là.
Cet opus affiche neuf titres pour une durée de quarante minutes, ce qui peut s’avérer un tantinet chiche de nos jours où les productions approchent souvent l’heure de plaisir auditif. Voilà qui sera la seule fausse note de cette oeuvre proposant clairement deux ambiances rythmiquement opposées avec cinq titres enlevés et quatre compositions calmes.
Pour ce qui est des premières, Jono visite tour à tour les contrées du Rock, du Rock Progressif, du Pop Rock et du Hard Rock mélodique dans sa version Glam. On pense souvent à A.C.T. et à Queen, parfois à Styx - et ici la voix de John Norrby et l’utilisation du piano ne sont pas les seuls en cause tant la trame et le style des compositions font référence aux susnommés - mais également, ponctuellement, à Supertramp, Elton John, Cheap Trick ou Wig Wam.
En ce qui concerne les titres calmes, très calmes même, nous avons droit également à quelques touches musicales diverses et variées qui vont de la comédie musicale façon Broadway à des chœurs dignes de l’armée rouge, en passant par des touches symphoniques, des chorales et des ambiances jazzy. Ici, Queen est à l’honneur et Freddy Mercury aurait, sans hésitation aucune, pu interpréter ces morceaux. Gageons même que cet exercice lui aurait plu.
Voilà un patchwork quelque peu original. Cependant, bien que les références qui viennent à l’esprit à l’écoute de cette œuvre soient multiples et puissent désorienter l’auditeur, la qualité des compositions - toutes dotées de superbes mélodies et de riches structures - et leur superbe interprétation ne peuvent que recueillir une brassée d’éloges méritées.
Jono ne s’apprête certainement pas à renverser la Reine, mais le Fou A.C.T. n’a qu’à bien se tenir car le Cavalier Jono vient de faire un bon sur l’échiquier des groupes de Rock Progressif à tendance melting pot.