Venu d’Argentine, le quintet Laquesis nous propose son premier album éponyme. Le rock progressif est très présent en Amérique latine et se développe sous un mode plus festif et moins strictement organisé que dans les pays occidentaux. Laquesis flirte avec la fusion, brassant les genres, entre rock californien (à l’approche de l’instrumental de ‘Efecto Placebo’), touches jazzy (‘Hamacamatic’) et un progressif bien varié et dynamique.
Les titres, à l’exception de l’anglophone ‘Efecto Placebo’ et de l’hispanophone ‘Lemuria’, sont tous instrumentaux ce qui est préférable, le chant n’étant pas le point fort du groupe. Mais côté musicos, le groupe se défend très bien, équilibrant judicieusement guitares et claviers, gardant une ligne de basse très travaillée et une batterie “juste” qui distille le bon son au bon endroit, avec ces petites fioritures qui font toujours plaisir à entendre.
Laquesis s’amuse aussi à brouiller les limites entre les époques : le son peut se parer de couleurs résolument seventies, avec des touches de Hammond “emersonien” (‘Atropos’, une fuzz-bass (‘Tema X’, ‘Cloto’), l’utilisation de la pédale wah-wah (‘Tema X’), certaines sonorités de synthé rappelant le Camel des années 75-78, mais la dynamique peut se faire incisive, d’une façon beaucoup plus actuelle (‘Efecto Placebo’, entre autres). Camel n’est pas un référence anodine : les morceaux sont construits avec des plans qui évoluent rapidement, évitant les redites, comme dans “Dust and Dreams” ou le ‘Coming of Ages’ de “Harbour of Tears”... Mais un Camel sous amphétamines, ce qui donne des titres attachants, à l’image de l’excellente suite instrumentale ‘Las Moiras’ qui clôt l’album en beauté.
Voilà donc un premier album séduisant, certes perfectible pour le chant, mais qui donne envie de suivre le fil déroulé par un groupe qui semble avoir beaucoup de choses à démontrer.