"Silentia Nova" est le second album du groupe allemand Le Mur. C'est aussi le deuxième d'une trilogie qui a vu le jour avec "In Tenebris" en 2011 et un concept-album traitant de l'addiction croissante des gens à la technologie pouvant mener la race humaine à sa perte. Concept original et sinistre parfaitement reflété par la musique de cet opus.
"Silentia Nova" fait partie de ces œuvres labyrinthiques à la limite de l'hermétisme, semblant semer à foison des indices se voulant autant de clés pour résoudre les énigmes laissées à la sagacité de l'auditeur. Car qui dit concept-album dit histoire, et qui dit histoire dit textes. Or, "Silentia Nova" fait une très large place à l'instrumental, la parole se réduisant à quelques brèves interventions, plus souvent parlées, murmurées ou hurlées que chantées. Comprendre le concept au travers de ces bribes de délire s'avère une gageure d'une haute teneur.
Les titres sont un autre casse-tête, entre sigles (que signifie O.M.E.N qui ouvre et ferme l'album comme il ouvrait et fermait l'album précédent ? Faut-il le traduire par "prédiction", sens du mot latin omen ?), titres polyglottes (anglais, allemand, latin) ou absents (morceau sans nom caché au milieu de l'album également baptisé 'Ghost Track II') et n'aident guère à nous éclairer sur l'histoire.
Ne reste que la musique. Conceptuelle ? Peut-être. Entêtante, sans aucun doute, à défaut d'être envoutante. Déroulant ses méandres cycliques et ses ostinatos lancinants, elle se fait souvent sombre et inquiétante ('O.M.E.N. - A Decision Of Dispair'), parfois décadente et disjonctée ('Technical Progress And Other Suicide Stuff') ou folklorique et décalée ('Ghost Track II'), mais plus constamment hypnotique et hallucinée ('Die Nacht Der Lemuren - Part 2', 'Silentia Nova', 'O.M.E.N. – Creation Of A New Silence'). Originale sans conteste, avec cette basse prédominante qui sert d'instrument lead pour porter des mélodies spatio-psychédéliques sur lesquelles viennent se greffer les saillies d'un saxophone ou d'un orgue plaintif et les battements tantôt anémiques, tantôt survoltés d'une percussion un peu plate. Le côté fouillis de la production ajoute à l'impression "fin des années 60" laissée par l'écoute de ce disque.
Le Mur nous joue une musique cérébrale, trop peut-être, nécessitant de la disséquer par une analyse froide pour l'apprécier, empêchant l'émotion d'affleurer. Les amateurs de krautrock et de musiques psychédéliques y trouveront peut-être leur compte, les autres passeront leur chemin.