Les amateurs de spiritisme connaissent le Ouija. Ce dispositif permettant une meilleure connexion avec les esprits est une planchette portant lettres, chiffres, et les inscriptions “oui”, “non” et “au revoir” nécessaires à toute conversation avec l'au-delà. Plus musicalement, un trio français (guitare - basse et chant - batterie) a décidé de reprendre ce nom et nous les découvrons à l’occasion de la parution de leur premier album, “Addiction”.
Indéniablement, Ouija a su trouver un ton original, sombre et angoissé où les lignes mélodiques ne sont pas une priorité, mais où la mise en place de l’ambiance est très bien maîtrisée. Les lignes de guitares restent claires, les claviers sont présents mais relégués au second plan et la basse procure un soutien conséquent, tandis que la batterie sait se faire suffisamment technique pour apporter des touches intéressantes. Le chant, anglophone, est à la fois assez engagé et plaintif, ce qui renforce le sentiment d’oppression ressenti.
La formation en trio tire le jeu vers un esprit assez jazz et atmosphérique où les mesures impaires et les ruptures de ton et de rythme sont légion - un côté qui pourrait faire penser à certaines recherches de Robert Fripp de King Crimson. Autant dire que l’approche d’Addiction n’est pas des plus aisées et il est préférable de se laisser porter par l’atmosphère de l’opus que de chercher des évolutions thématiques. Le principal reproche que l’on pourrait adresser à cette réalisation est une certaine uniformité de ton, Ouija peinant à trouver de nouvelles ouvertures dans un style particulier.
Justice doit être rendue à la qualité technique de cet album qui rentre cependant dans la catégorie des opus assez difficiles d’accès et qui ne génèrent pas une euphorie débridée à leur écoute - surtout sur toute la longueur de l’album. L’auditeur qui sera sensible aux ambiances tourmentées et fiévreuses serait bien avisé d’y prêter une oreille attentive.