Alors que le genre semblait de prime abord des plus masculins, on mesure pourtant depuis quelques temps combien le chant féminin peut lui aussi très bien se fondre dans le Doom, en cultivant moins une forme de douceur qui de toute façon n'y trouverait pas vraiment sa place qu'une aura occulte quant à elle tout à fait opportune. De fait, autrefois rare, on ne compte plus les groupes emmenés par une chanteuse, pour le meilleur (surtout) et pour le pire (c'est plus rare).
Le nez toujours creux, Lee Dorrian (Cathedral pour les puceaux qui l'ignoreraient encore) compte dans son écurie plusieurs pouliches, de Blood Ceremony à Purson que vient compléter aujourd'hui, The Oath, plutôt avantageusement d'ailleurs. Si certains spécimens peinent à cacher leur banalité derrière de séduisants apparats, tel n'est pas le cas de cette formation dont nous étions nombreux à attendre le premier album après un séminal single 'Night Child/Black Rainbow', 7'' déjà culte.
Basé en Allemagne, le projet se veut avant tout un duo, celui qu'incarnent la vocaliste Johanna Sadonis et la guitariste suédoise Linnéa Olsson (Sonic Ritual), autour duquel bassistes et batteurs se succèdent, parmi lesquels Leo Smee (Chrome Houf et ex Cathedral). Bien entourées, les deux jeunes femmes toutes de cuir vêtues, se font panthères noires, sortant les griffes pour notre plus grand plaisir.
Cet opus éponyme est à leur image, d'un charme vénéneux, rituel heavy doom d'une puissance sombre et au pouvoir d'envoûtement immense. Prêtresses sauvages dans les courbes desquelles on a envie de se perdre, de s'égarer, Johanna et Linnéa nous convient à une messe noire où alternent brûlots aux allures d'hymnes immédiats taillés pour les cérémonies et hosties tavelées d'ambiances délicieusement occultes.
Les premiers trouvent dans le déjà connu 'Night Child' sa plus irrésistible illustration, portée par des lignes mélodies nerveuses. A ses côtés, citons aussi 'Silk Road', parfaite fusion entre cette voix hantée et les riffs lourds et acérés que souligne idéalement une section rythmique aussi discrète qu'explosive, sans oublier 'Silver & Dust' aux motifs ensorcelants.
Oscillant entre six et sept minutes au compteur, les seconds, moins directs, encore que 'All Must Die' fasse mouche d'entrée de jeu, misent davantage sur les ambiances, à' l'image de 'Leaving Together' d'une lenteur morbide et dont le guide reste plus que jamais la silhouette au charme empoisonné de la ravissante teutonne, quand bien même le segment instrumental qui le cisaille se révèle des plus jouissifs. Dans ce registre, on pense bien entendu au terminal 'Psalm 7', ténébreuse montée en puissance, et plus encore à 'Black Rainbow', accrocheur dans sa première partie, carrément ensorcelant en milieu de parcours.
Enrobé dans un son terreux et old school, "The Oath" est un sans-faute qui ravira tous les amateurs de Heavy doom qu'il soit chanté par femme ou non.