4 ans après ''The Sanctuary'', Alex Carpani est de retour avec un projet dantesque. En grand fan de progressif devant l'éternel, notre italo-suisse a décidé de combiner les thèmes de l'album de Gentle Giant ''Three friends'' (contant le destin tragique de trois amis d'enfance) avec les longueurs (plus raccourcies cependant) de Tales from topographical oceans de Yes : 4 faces flirtant chacune avec le quart d'heure. Le groupe a également un atout de taille dans la manche : la présence du saxophoniste et flûtiste David Jackson, incontournable membre d'un des plus grands groupes novateurs du rock progressif, Van der Graaf Generator.
L'auditeur est immédiatement embarqué pour un voyage dans le temps et dans l'histoire à travers les quatre destins qui lui sont proposés, sinon imposés. 'The silk road' ne possède pas une apparence soyeuse, elle vous saute à la gorge dès les premières secondes avant de se raviser et de proposer un chant clair en anglais. Mais aussitôt une guitare électrique nous conduit dans un autre monde, un monde où l'on chante en italien et dans lequel on est accueilli par un clavier tantôt cajoleur, tantôt venimeux. Arrive alors cette deuxième minute où tous les troubles qui semblaient s'abattre laissent place à une sérénité grandiose magnifiée par son piano de velours. Mais une ombre surgit des limbes et un saxophone démoniaque se fait entendre discrètement (Jackson a fréquenté la bonne école hammillienne).
Cette piste introductrice comporte d'autres moments agréables, des pauses bucoliques, mais à chaque fois, les vibrations d'une épée de Damoclès, (un clavier, un saxophone, une flûte) laissent supposer qu'un bonheur n'arrive jamais seul... Sur 'Sky and sea', l'un des morceaux les plus langoureux de l'album, un splendide solo de saxophone laissera d'ailleurs place à l'angoisse primale face à la nuit étoilée, avant que la terreur ne se dissipe à travers les flots apaisants.
Après une première piste épique qui ravira les fans de rock progressif en leur faisant éprouver une pointe de nostalgie, Alex Carpani continue son exploration divinatoire dans la même veine que sur la première piste. Chaque instant de ce disque contient sa dose d'opium et les appréhensions dues à l'hégémonie des claviers sur le dernier opus se voient vites résorbées. Ces derniers ne se font pas envahissants et subtilement employés.
Tout en citant ses groupes de chevet, comme Genesis ('Fly on a windshield) ou Pink Floyd ('Echoes') sur 'The infinite room', Alex Carpani ne tombe jamais dans l'hommage béat et pourrait bien donner envie aux réfractaires du rock progressif italien de se laisser tenter. Si l'élève n'a pas encore dépassé ses maîtres, il est sur la bonne voie...