Après plusieurs années passées à affiner leur style en concert, le groupe estonien Wrupk Urei sort en 2012 son premier "album", "Koik Saab Korda", disponible uniquement en téléchargement suivi quelques mois plus tard d'un second tout aussi dématérialisé. En 2014, le label Altrock décide d'élargir l'audience de Wrupk Urei en produisant sur support physique "Koik Saab Korda" deux ans après sa création.
"Koik Saab Korda" signifie "Tout ira bien", un souhait qui s'adresse probablement autant aux musiciens comme encouragement qu'aux auditeurs … qui eux aussi auront bien besoin d'un petit encouragement pour aller jusqu'au bout de ce disque. Ce que je les invite d'ailleurs à faire, les meilleurs titres se trouvant justement à la fin de l'album.
Le disque est entièrement instrumental (si l'on excepte les quelques gloussements façon carnaval de Rio qu'on entend sur les premiers titres) et mélange jazz rock façon big band, prog et world music, une fusion qui donne parfois de bons résultats. Malheureusement, Wrupk Urei manque singulièrement de personnalité et d'imagination pour intéresser durablement l'auditeur à ses prestations. Les thèmes mélodiques sont peu entrainants et peu variés, les instruments ont tendance à jouer en tutti, nous privant de la palette sonore qu'on était en droit d'espérer au vu de la diversité de l'instrumentarium. Les vents sont notamment sous-utilisés et la musique se transforme en mixage brouillon, manquant de nuances, tout étant joué forte, et de changements rythmiques, chaque morceau prenant un tempo (généralement allegro) qu'il conserve imperturbablement d'un bout à l'autre.
L'album est schématiquement découpé en trois parties. Le titre éponyme en constitue à lui seul la première et la meilleure au travers d'une évolution lente et sérielle installant savamment une ambiance faite d'espoir et d'inquiétude. La deuxième partie, et la plus ingrate, va de 'Termiitide Tervitus' à 'Sai Ju Räägitud!', marquée par une répétitivité chronique de thèmes peu fédérateurs. La dernière partie commence avec 'Valteri Ohtlik Elu' pour se terminer sur 'Spirituaal'. La musique s'y révèle plus entrainante et légèrement plus variée, plus séduisante que ce qui l'a précédée, ce qui était, il faut l'avouer, peu difficile à réaliser.
C'est néanmoins insuffisant pour faire de "Koik Saab Korda" un disque attachant. Trop lisse, trop peu inventif ou audacieux, trop répétitif, il s'oubliera à peine écouté par ceux qui n'auront pas abandonné en chemin.