Le Blues français a le vent en poupe en ce moment et c'est très bien comme ça ! Ce qui est d'autant plus remarquable, c'est cette capacité qu'ont nos frenchies à y mettre leur patte toute personnelle afin de renouveler le genre sans pour autant faire honte à leurs arrières grands-pères. Si le Blues Power Band aime l'Opera Blues, si Furious Zoo nous épate avec son blues chromé, Dirty Deep, comme son nom l'indique très bien, défonce les portes du Blues Garage avec talent !
Après un premier album nommé "Back To The Roots" publié en 2012 et un format court nommé "Wrong Way-I'm Going Home", Dirty Deep a pris le temps de peaufiner son second essai.
La formation nous ouvre les portes de sa grange à coups de 'Bottleneck', titre gras, brut et saturé rappelant un peu le Blues Blanc et Rock des premiers essais d'un Johnny Winter (l'harmonica y est pour quelque chose) ou de Jeff Beck période "Truth/Ola". La trame musicale majeure est donc composée de cette guitare énorme, singulière marque de fabrique, d'une grosse caisse, de l'harmonica pour l'ambiance ('Low Down' et tant d'autres) et bien entendu de la voix assez impressionnante de Victor Sbrovazzo, sorte de tout terrain du Blues avec une réelle musicalité et la profondeur d'un... John Fogerty , voire pour le côté écorché à fleur de peau d'une version masculine de Natalie Merchant.
De temps en temps, pour varier les plaisirs, une véritable rythmique est de sortie comme sur le Rock N'Roll 'Junky Green Truck' garni de breaks plus vintages que nature ou sur la petite perle 'Midnight Bus' Bluesy à la ligne déconcertante, notamment sur son passage effrontément rappé voire le final limite cheap niveau sonore qu'est le brut de chez brut 'When The Sun Comes Up'.
C'est qu'il y a à manger dans cet album riche et intelligemment agencé où l'ennui n'a pas le droit de cité et où chaque intro est savamment travaillée pour faire monter l'envie avant l'explosion (l'excellent 'John The Revelator' dont le refrain vous restera en tête toute la journée). Et quand on croit avoir fait le tour du propriétaire, Victor nous sort de sa besace un 'What The Hell' tout en eperons et stetson et aux soli croisés de guitare et d'harmonica d'une profondeur viscérale suivi de 'She's A Devil Inside' alliant le meilleur des deux mondes dans un costume à la coupe moderne sur une rythmique des origines. Pour mieux vous happer, le rythme se calme régulièrement avec le lonely 'Middle Of Nowhere' minimaliste et pourtant captivant de bout en bout, le touchant 'Release Me' qui rappelle malgré le sentiment d'évidence quelle grande voix anglophone possède Victor, ou encore le nonchalant 'Til' The Day I Die'.
Et c'est peut être là que se trouve tout le talent du bonhomme qui parvient là où nombreux se cassent les dents à créer un réel univers et à captiver son auditoire sous la difficile étiquette de One Man Band Bluesy. Rien que pour cela, ce "Shotgun Wedding' vaut l'écoute.