Les voies du Death sont impénétrables. Elles mènent surtout partout, même là où on les attend à priori le moins. Ainsi qui aurait pû imaginer que l'arbre généalogique de certains dinosaures du Death suédois, celui qui fai(sai)t peur - pas celui de Göteborg - aboutirait à un groupe de Hard rock pure souche ? Peu de monde assurément.
Tel est pourtant le cas de cette belle triplette de garçons bouchers, associés depuis 2009 au sein de The Dagger, que forment, excusez du peu, le guitariste David Blomqvist, le bassiste Tobias Cristiansson et le batteur Fred Estby lesquels ont tous participé à Dismember et/ou Grave, Carnage, Entombed... Du lourd donc. C'est pourtant oublier que cette génération de musiciens a souvent été biberonnée au heavy metal avant d'aller patauger dans les viscères. Du coup, Ce side-project est pour eux un retour aux sources, une façon de se faire plaisir en braconnant sur des terres musicales à des années-lumière de celles qui ont fait leur renommée.
Ceci dit, savoir faire du bon death metal n'est pas forcément l'assurance de réussir du bon Hard Rock, doute heureusement balayé d'entrée de jeu par 'Ahead Of Your All', amorce accrocheuse dans la (grande) tradition du genre dont les lignes de guitare et les claviers convoquent ni plus ni moins le spectre du Rainbow de Ritchie Blackmore. Habitué des riffs aussi rocailleux que visqueux plus bas que terre, nous n'attendions pas Blomqvist sur ce terrain qui le voit se glisser avec bonheur dans l'ombre de l'Homme en noir, ce qui n'est pas donné à tout le monde. Le mimétisme est troublant sur des titres tels que 'Call Of 9' ou '1978' pour ne citer que deux exemples.
Et au final The Dagger étonne moins par sa réussite que par ses couleurs des plus mélodiques. De fait, au Heavy old school et saignant que le pedigree de ses géniteurs pouvait laisser deviner, c'est un hard rock souvent énergique, élégant toujours que ce premier album dévoile. Mais cette orientation surprend-elle réellement ? N'oublions ainsi pas que Fred Estby ne fut pas que le mercenaire des fûts du death suédois mais aussi le batteur de Terra Firma, ancien groupe de Christian Lindersson (Lord Vicar), un des fleurons du stoner national.
N'oublions pas surtout que le chant est assuré par Jani Kataja de Sideburn lequel en complétant le trio en 2012 ne lui a pas seulement permis d'enclencher la seconde mais aussi de lui insuffler cette touche racée et mélodieuse, arrimant le groupe davantage au Rainbow des années 80 qu'à celui de la décennie précédente.
Le résultat aboutit à une irrésistible collection de brûlots, recette à l'ancienne, anachronique sans doute, franchement agréable pour autant. Simples, les morceaux font mouche, emportés par cette belle voix, émaillés de soli placés là où il faut et quand il le faut. Sans surprise peut-être mais peu importe. Si la prise de son aurait pû être plus puissante, l'album n'en souffre pas.
Toutefois, The Dagger ne saurait uniquement passer pour un des (nombreux) héritiers de l'arc-en-ciel en cela que certaines de ses compositions arborent des tempos plus pesants qui n'ont à rien à voir avec l'écriture de Blackmore. Ainsi, les très bons 'Dog Of Warning' ou 'Ballad Of An old Man', bien qu'eux aussi striés de lignes de guitare flamboyantes, distillent des ambiances plus sombres cependant que des racines heavy metal font parfois plus qu'affleurer à la surface de certains morceaux ('Inside The Monothic Dome').
Il s'agit en définitive d'une excellente surprise car sans prétention et à la nostalgie sympathique, dont on espère qu'elle ne sera pas le fruit unique d'un projet dont la nature pourrait le condamner à être éphémère...