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"Emile Jacotey, maréchal ferrant de son état et "petit vieux de tous les temps" revient nous faire une petite visite quarante années après son "A mon âge ? J'me r'pose" couronné de multiples disques d'or ..."
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Puisque la mode est au revival, il semblait à tout le moins logique que le plus ancien groupe de rock français encore en activité ne succombe un jour à la tendance, et vienne reprendre quelqu'ancienne production. Après que l'un de ses anciens membres éminents ait revisité le premier album du groupe il y a quelques mois (Caricatures, revisité par Francis Décamps), voilà que la bande angélique actuelle s'attaque à ce qui fut l'un des plus grands succès du groupe, tant commercial qu'artistique, et vient ressusciter le "Petit Vieux de tous les temps", le maréchal ferrant passé à la postérité par la grâce de quelques dizaines de minutes musicales (et quelques centaines de milliers d'albums vendus), le ci-devant dénommé Emile Jacotey.
Servi dans un magnifique livret illustré de façon tout aussi magnifique par le fidèle Phil Umbdenstock, Emile Jacotey Resurrection ne se contente pas de nous proposer une redite des titres publiés 40 ans plus tôt. Il s'agit véritablement d'une œuvre à part entière, pour laquelle Ange a créé non seulement de nouveaux arrangements et développements pour les titres originaux, mais également quatre nouvelles plages qui viennent s'insérer de façon très naturelle au sein du concept initial.
Parmi celles-ci, l'on retiendra plus particulièrement le délicieux Gustave et Lucy, parabole très imagée sur l'Origine du Monde, peinte par Courbet sous la forme que l'on connait, et le statut de plus ancienne femme de l'humanité détenu pendant longtemps par la seconde. Musicalement, ces quatre créations sont marquées du sceau des dernières productions du groupe, alliant tradition et modernité avec bonheur, et ne dénaturant en aucune sorte l'œuvre originale, qualifiée par Christian Décamps comme du rock paysan chez nos confrères de Chromatique.net.
Quant aux anciens titres, ils ont fait l'objet d'un lifting on ne peut plus réussi. Non seulement la production s'est modernisée, mais certains arrangements ont été revus avec bonheur (Bêle Bêle Petite Chèvre notamment, ou encore Le Marchand de Planètes et ses passages orientalisants). Pour d'autres, ce sont carrément de nouvelles séquences qui sont venus enrichir la partition initiale ; c'est particulièrement le cas de Jour Après Jour, Les Noces et sa séquence centrale intrigante, et last but not least, Emile Jacotey lui-même qui, non content d'être déplacé en fin d'album, devient une véritable plage progressive par le truchement d'une deuxième partie inédite. On a ainsi l'impression d'écouter le groupe en live, réinterprétant des partitions anciennes qui auraient évolué au fil du temps et des représentations.
Ajoutez là-dessus le talent d'un Hassan Hajdi qui délivre quelques soli de furie à la guitare, ainsi que celui d'un Benoit Cazzulini qui renverrait presque Gérard Jelsch à ses chères études, et on en oubliera les quelques parties chantées où la voix des Décamps père et fils force un peu trop le trait.
C'est toujours avec un peu de scepticisme que l'on aborde la relecture d'une œuvre ayant connu un tel succès, l'exercice étant périlleux en soi, surtout lorsqu'un groupe s'attaque à l'un de ses propres chef d'œuvres. Cette résurrection d'Emile Jacotey échappe pourtant à la critique, tant son esprit original reste préservé par cet Ange du 21è siècle. Loin d'être une simple redécouverte d'une production quadragénaire, l'écoute de cet album prodiguera à tous le frisson de l'histoire, tout en y introduisant de nouvelles séquences qui ne feront que grandir un peu plus l'aura de cette Œuvre. Indispensable.
Plus d'information sur
http://www.ange-updlm.com/
LISTE DES PISTES:
01. Bêle, Bêle petite chèvre (5:34) 02. Sur la trace des Fées (5:02) 03. Le nain de Stanislas (4:58) 04. Jour après Jour (5:20) 05. Innocents les mains sales (3:52) 06. Gustave et Lucy (6:27) 07. Le bouseux (3:54) 08. Ego & Deus (4:28) 09. J'irai dormir plus loin que ton sommeil (5:04) 10. Aurélia (3:13) 11. Les Noces (8:22) 12. Parallèles amoureuses (3:16) 13. Le Marchand des Planètes (7:19) 14. Ode à Emile (6:31)
FORMATION:
Benoît Cazzulini: Batterie Christian Décamps: Chant / Guitares / Claviers Hassan Hajdi: Chant / Guitares Thierry Sidhoum: Chant / Basse Tristan Décamps: Chant / Claviers
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(1) AVIS DES LECTEURS
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(2) COMMENTAIRE(S)
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«comment avons-nous vieilli ?... » EMLILE JACOTEY est une œuvre particulièrement réussie d’ANGE, datant de 1975, tant du point de vue artistique (Grand Prix de L’académie Charles Cros) que populaire. Une œuvre semi conceptuelle tournée autour d’un vieux maréchal ferrant, dont le discours sonore éclairait les morceaux, comme un fil rouge. Les thèmes abordés étaient déjà particulièrement lucides ; écologie, vie à hauteur d’homme, sens des réalités et du changement d’époques, importance des cultures régionales, confrontation entre tradition et modernité… Voilà qu’aujourd’hui Ange (énième chapitre) a décidé de réinterpréter et transformer cet album, pour lui donner une nouvelle vie (le titre « résurrection » est sans équivoque)… J'ai, en ce qui me concerne, été frappé par le caractère premièrement un brin inutile, tout autant que risqué, de ce projet. En effet, quel intérêt y-a-t-il à réinterpréter une œuvre telle que celle-ci, qui plus est particulièrement réussie, en tous points, et qui fut un réel succès à son époque? Rodin a-t-il refait son Penseur, ou ses Bourgeois De Calais? Le Facteur Cheval a-t-il reconstruit son Palais Idéal (ceci dit il n'aurait pas eu le temps, vu le temps que ça lui a pris !), Marcel Duchamp a-t-il « refait » son urinoir, Ferré a-t-il réécrit « Avec Le Temps » ? On fait un grand écart: Georges Lucas a-t-il amélioré son Star Wars?... euh... Oui justement, et on en a vu le résultat, piètre, et les motivations, purement commerciales, le poussant à ré-améliorer plus tard son « amélioration », tant les images de synthèses plaquées sur ses images inédites étaient laides et dépassées, déclinant à l’infini son patrimoine (blu Ray, son DTS, bonus, rééditions etc), démontrant par l'absurde son manque probant d'imagination, d'inspiration, et de fond, pour dire vrai... J'étais donc méfiant à l'annonce d'un « neo-Emile Jacotey » dont j’entrevoyait les possibles échecs. Pourtant la démarche ne s’avère pas toujours vaine ; un album sacrifié à l’époque, pour des raisons de droit, de contingence, de finances insuffisantes etc… serait sorti malgré tout, ou pas, et auquel la technologie actuelle aurait rendu justice… Cela c’est vu, et parfois pour le meilleur. Il existe même des disques qui, pour toutes ces raisons, n’avaient jamais vu le jour, et qui pourtant attendaient, patiemment, dans un tiroir presque oublié (saluons l’extraordinaire travail de réhabilitation du label MUSEA, pour ne citer que lui, particulièrement durant les années 80-90)… Mais ici ? Encore, s'il avait été question de redonner vie à cette œuvre sur scène, et en rendre compte a posteriori sur disque, par le biais d'un live, j'aurais applaudi des deux mains... Cela pend tout son sens dans ce cadre, l’énergie live redonnant vie à une œuvre, le temps d’un concert… Ce n’est pas le cas encore une fois avec l’album qui nous préoccupe… Alors quelle fut ma surprise, mon effroi pour tout dire, en découvrant que le disque était en plus "augmenté" (on ne parle que des bagnoles en ces termes, d’habitude), avec quatre nouveaux morceaux actuels?!?! L'album avait-il été pensé ainsi, plus long à l'origine, et les obligations contractuelles ne l'avaient pas permis, une affaire de place, de temps, un double album revu à la baisse, et publié en simple? Non, du moins je n’en ai pas connaissance... Je ne suis pas un spécialiste non plus… Mais alors, qu'est-ce qui a poussé Christian DESCAMPS? Je mets l'album et j'écoute... Et je me rends compte que l'ordre des chansons a changé aussi !… je tombe de ma chaise... ! De plus, les nouveaux arrangements dépossèdent la musique de ses sonorités chaleureuses, « faites main », « maison", folk, si bien en accord avec la personnalité et le style de vie du personnage central… Le piano bastringue a disparu !...Que penser de ces étoffements, ces effets modernes, cette froideur synthético-symphonique hyper produite? Quand aux morceaux nouveaux, que viennent-ils faire là? Leur style, leur inspiration, très ANGE actuel, tranchent terriblement avec la saveur 70s de tous les autres, pour tout dire, ils sont en très net retrait !... Bref, le fossé qui se dresse entre les deux époques est abyssal, et malgré la tentative de réactualisation d'Emile Jacotey mouture 1 (rien que de l'écrire ça me mets mal à l’aise!), l'album en pâtit terriblement. DESCAMPS lui-même, dont on a mesuré depuis longtemps déjà le glissement vocal, d’une voix urgente et directe vers un chant maniéré façon parfois variète d’un autre temps, comment ne pas l’entendre peiner dans les aigus, la justesse des notes faisant parfois défaut, on le surprend même à alourdir le propos d’une joliesse embarrassante… On finit par ce demander s’il s’agit du même disque ! Bref, le bilan est à la catastrophe… A peine pourra-t-on se réjouir d'entendre quelques bribes supplémentaires des paroles du maréchal ferrant, cette façon qu’il avait de n’être pas tout à fait en guerre contre le progrès, mais qui malheureusement résonne ici terriblement à contresens, dénonçant au final la démarche si moderniste de ce « reboot » dans lequel il figure !!! L’arroseur ANGE 70s se retrouverait-il arrosé ?Et qu’en ont pensé les membres qui ont participé à la création de 1975? Ont-ils tous donné leur accord ? Ont –ils même eu droit au chapitre ?...Une fois le disque terminé les mêmes questions du départ perdurent: ce remodelage apporte-t-il quelque chose de plus? Non. Est-il fidèle à l’œuvre d’origine ? Non. Eclaire-t-il plus l'auditeur sur l'intention et le propos du groupe à l'époque? Non. Indique-t-il une évolution, un choix de cap particulier pour le Ange à venir? Non. Démontre-t-il que Ange est en symbiose avec son passé? Encore moins finalement! Et malheureusement, cet échec artistique restera inscrit dans le temps, comme un jalon assumé de la carrière du groupe, qu’il va devoir justifier bien au-delà de ce qu’il imagine, peut être dix ans encore après... Même de la part de De Vinci, un piercing sur le nez de la Joconde ne s’oublie pas, peut être même jamais… Et j’imagine le père et le fils bien emmerdés de devoir répondre pour la millième fois sur ce sujet, dans dix, 15, 20 ans… ! « Quelle était votre démarche, et comptez-vous faire la même chose pour d’autres albums existant ? » En fait, cette opération hasardeuse apparaît comme un symptôme de plus en plus répandu, comme une indication supplémentaire concernant cette génération des ténors du progressif (et de leur public contemporain finalement), qui, pour la deuxième fois de leur histoire (personnelle comme contextuelle?) traversent une profonde crise, celle de l'inspiration, et parfois de la capacité à résonner avec son temps, privilégiant des préoccupations davantage commerciales. C'est le cas flagrant de Yes (The Yes Album, Close To The Edge, Going For The One pour leur dernière tournée, Fragile pour la prochaine), de Mike Oldfield (Tubular Bells 29 ou 17, on ne sait plus !), Peter Gabriel (best of avec orchestre, « So » rejoué en intégrale, rappelons que son dernier album date d’il y a 12 ans, en 2002 donc!), ce fut le cas pour feu Genesis (la tournée de reformation en forme de best of en 2007, une future reformation ne présageant que du pire !), Jethro Tull aujourd’hui (Thick As A Brick 2, avec un chanteur de soutien pour la tournée !), Steve Hackett (Genesis Revisited, qui publie consécutivement deux live issus de la même tournée!), Camel (The Snow Goose reloaded), Focus (reboots en forme de best of !), PFM (best of avec orchestre symphonique !), mais aussi Kansas en son temps, Deep Purple (bien que leur nouveau disque annonce un très net regain de talent), Saga, j’en passe et des meilleures… Quand à la France: Thai Fong, Atoll (qui a failli devenir Asia !), Francis Décamp (« Caricature » revisité tout au clavier ou presque!), et c'est donc aujourd'hui au tour de Ange, dont le dernier gardien autoproclamé, depuis déjà longtemps, jadis pourfendeur de conformisme, bretteur d’une tiédeur politico artistique certaine, défenseur forcené de l’intégrité créatrice, qui se met lui aussi à piétiner ses propres plates-bandes... A l’aube des 80s, tous ces groupes ont dû (ou voulu)changer de braquet, cherchant brusquement à pondre des tubes, souvent avec succès, financier s’entend… Aujourd’hui, trente ans après, deuxième crise majeure, au cours de laquelle ils fossoient consciencieusement leurs chefs d’œuvres et leur jeunesse passés, plutôt que de s’atteler à un vrai travail de création, d’expérimentation, d’enrichissement de leur vocabulaire, et de mixité sur les horizons actuels… Alors, évidemment le costume est devenu trop étroit, le cheveux teint ne cache que trop peu le crâne apparent, le rythme a ralenti, la dextérité aussi, et la voix n’est plus là, pour la plupart…Quand à nous, qui avons le même âge qu’eux, et leur ressemblons comme deux gouttes d’eau, nous payons à chaque rendez-vous, chaque coffret, chaque concert, chaque DVD, bien docilement, en mal d’une illusoire magie retrouvée… Et vous, Emile, vous l‘aviez entrevu, vous, cet auto remake ? Allez, ne vous en faites donc pas, là où vous êtes, sous et avec la terre, vous demeurez bien vivant à nos cœurs, bien plus que lors de cette Résurrection… Restons là haut, à se torcher le cul, ensemble, au firmament !
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Je confirme la chronique de Tonyb. C'est à une magnifique résurrection que nous avons affaire là.
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4.4/5 (9 avis)
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STAFF:
4.5/5 (4 avis)
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EN RELATION AVEC ANGE
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DERNIERE INTERVIEW
Ange (29 Novembre 2014)
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Music Waves a eu l'occasion de rencontrer le leader du groupe Ange chez Paulette et de pouvoir effectuer une interview intéressante et instructive sur la résurrection d'Emile Jacotey.
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