Ceux qui écument les scènes parisiennes trempées de cette sueur stoner si particulière, attendaient de pied ferme sa première galette car plus qu'un oubliable chauffe-salle, Dot Legacy a su brûler le cerveau de ceux qui l'ont vu en ouverture des concerts de Mars Red Sky ou Stoned Jesus. Inutile de s'égarer en vains préliminaires, cet opus éponyme tient toutes les promesses suscitées par des performances live aussi jouissives qu'énergiques.
On sent bien d'ailleurs à son écoute que cette longue expérience scénique a permis à cette jeune pousse de façonner son art, de polir ses compos qui toutes font mouche, petits bijoux d'écriture et d'arrangements. Qu'ils soient déliés, à l'image des très psyché 'The Midnight Weirdos' ou 'Rumbera', pandémonium orgiaque baignant dans un déluge d'orgues Hammond ou plus resserrés, registre trapu qu'incarnent des titres tels que "Days Of The Weak' ou bien encore 'Kennedy', ces morceaux illustrent déjà la maîtrise et la classe insolentes de Dot Legacy qui affiche une étonnante maturité et auquel il est aisé de prédire un avenir radieux.
D'autres qualités expliquent cette précoce réussite, à commencer par le jeu des musiciens et notamment celui des deux guitaristes, gorgé de feeling et tour à tour nerveux ou plus soyeux ('Pyramid') voire quasi atmosphérique. Le chant du bassiste Damien Quintard, plus pop que Stoner et souvent noyé sous une fiévreuse couche d'effets ('Think Of A Name') apporte aussi une vraie fraicheur à ce rock plus nostalgique qu'anachronique.
On touche d'ailleurs là du doigt l'une des grandes forces de ce groupe, cette approche vintage sans être datée ni passéiste. Energique et décomplexée, la musique forgée par le quatuor s'affranchit des barrières, se moque bien des étiquettes, alliage d'une délicate puissance de mélodies électriques et d'effluves nébuleuses . Malgré sa jeunesse, Dot Legacy possède déjà quelque chose qui n'appartient qu'à lui, une espèce de 'vibe' unique, une patte tavelée d'un feeling finalement plus racé que poussiéreux.
Fort de ce galop d'essai à la hauteur de l'attente, les Parisiens entrent d'emblée dans la cour des grands, entre Stoner enfumé et rock psyché couillu. Tout y est : les compos, le jeu, l'attitude, la classe, la magie... La suite promet de chaudes nuits peuplées de rêves humides.