Si la Suisse est connue pour ses vertus thérapeutiques, qui aurait pu penser qu'elle abriterait en son sein une formation douloureuse aimablement appelée Intercostal ? En effet, le quatuor genevois nous propose comme tout remède un voyage douloureux entre les côtes, immobilisant un auditeur qui risque de le terminer sur les rotules.
S'autoproclamant ''massive down-tuned progressive stoner'', ce qui correspond à du progressif de bûcheron, il serait plus juste de parler d'un quatuor de metal. En effet, le savoir-faire technique des musiciens les autorise à broder quelques petits canevas hard en rappelant certaines figures imposées du genre, la majeure partie de l'album étant d'ailleurs purement instrumentale.
L'album débute sur les chapeaux de roue avec une efficace 'Hellfire Helix' qui enfonce d'emblée le clou à l'aide de ses deux guitares contondantes. Sans prendre le temps de laisser l'auditeur panser ses plaies, Intercostal enchaîne le second morceau (ou plutôt la deuxième partie de la suite) dans lequel on peut entendre une voix spectrale planer autour de cette dissection musicale. L'enchaînement des pistes correspond à un voyage au plus profond de la plaie sans que l'idée de retour soit spécifiée. L'album s'organise comme une progression ésotérique visant à faire disparaître, sinon détruire ('The tools of war' qui fête la première apparition d'un chant proche du growl) tous les oripeaux d'un corps peut-être perverti par l'âme, comme le titre 'The end of the knowledge' avec son final assourdissant mais également 'Tons of humans' nous y invitent à le penser.
Néanmoins, si la progression du voyage est savamment étudiée, on pourrait formuler plusieurs reproches. Le premier est l'utilisation du chant growl qui, même s'il semble avoir trouvé sa place à juste titre, apparait comme un
accompagnement vocal superflu (à l'exception du final de 'Lay down arms'
où il apporte un peu d'émotion dans cette froideur
clinique). En outre, la propension du groupe à se vouloir instrumental obscurcit son propos et frustre l'auditeur qui aurait apprécié quelques paroles en lien avec le thème du corps ('Sagawa' par exemple).
Avec des chansons dépassant rarement les quatre minutes et malgré un sens mélodique notable ('Tons of human' et son solo de guitare prodigieux), Intercostal rate malheureusement un peu sa cible. En se reposant sur certains canevas du métal tout en restant à la lisière du genre dont il se définit, le groupe nous propose un hard rock certes mélodieux mais trop lisse pour réellement attirer les amateurs de progressif.