''Jack Knife'' est la seconde face du coffret Wetton-Palmer édité par Cherry Reccords. Si le premier se présentait comme une anthologie de work in progress de certains morceaux de King Crimson, ''Jack Knife'' peut s'écouter comme l'album d'un groupe amateur de blues. Le groupe est composé de Curt Cress aux batteries et percussions, John Hutcheson aux claviers et aux choeurs, et bien sûr, Richard Palmer à la guitare, et John Wetton à la basse et au chant.
On peut diviser l'album en deux parties : les reprises blues et les compositions originales. Si l'idée de pochade est assez sensible sur 'You can't judge a book by the cover' de Bo Diddley, sur laquelle John Wetton contrefait avec bagout la voix des crooners, acclamé par une guitare flamboyante, le groupe opte moins pour une reprise à l'identique qu'à une déconstruction sensible. 'I wish you would' qui ouvre l'album est une reprise énergique de Billy Boy Arnold qui transcende l'original, l'harmonica ayant été remplacé par une guitare nerveuse qui s'illustre sur deux longs soli. La voix rocailleuse de John Wetton n'est pas en reste et apporte un peu de drame à des paroles plutôt convenues. L'alchimie entre blues, psychédélique, boogie et punk est parfaite sur cette chanson. 'Too much Monkey business' (que l'on retrouve sur l'autre coffret) rivalise d'audace rock 'n' roll avec le maître Chuck Berry, le chant minéral de John Wetton se rapprochant même de celui d'un autre bassiste, Paul McCartney sur l'ouverture éponyme de ''Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band.'' 'Eyesight to the blind' (de Sonny Boy Williamson) se présente comme un blues électronique, tandis que 'Dimples' (John Lee Hooker) greffe à ce grand classique un apport funk apaisant et exotique par des percussions se rapprochant plutôt de la samba.
Ce dernier genre, brésilien de surcroit, semble avoir suffisamment intéressé le groupe pour rééditer l'exploit sur une composition personnelle, peut-être le meilleur morceau du groupe, 'Walk on heaven's ground', qui se présente d'abord comme un ballade folk proche de la pop avec ces ''Shalalalala'' sur ces refrains et son break de percussions samba laissant place à un solo de guitare électrique. Le groupe rivalise de truculence avec un sketch parodique de blues 'Mustang momma' qui met en scène une jeune fille prophétisant avec réalisme son future statut en cas de réponse positive à l'invitation d'un marlou qui l'invite à grimper dans sa voiture (''If you think there's any action in a bottle of wine/I feel kinda homesick for the good old days [...]/And a belly full of pills...'').
Si le caractère de ce "Jack Knife" est plus qu'anecdotique, son écoute reste conseillée si vous souhaitez recevoir une bonne bouffée d'air frais musicale, la capacité de ses auteurs à revisiter un genre avec brio et à s'amuser ensemble étant très communicative. L'album est bien entendu indispensable pour les amateurs de John Wetton.