Bien que baissant un peu d'intensité sur sa seconde partie, le premier album éponyme de Billy Idol avait marqué le territoire d'un artiste à l'identité déjà bien affirmée. Le succès commercial étant également au rendez-vous, le britannique expatrié aux States ne tarde pas à donner une suite à cet opus, battant le fer tant qu'il est chaud et ne changeant pas une équipe qui a tout d'un ticket gagnant. En effet, le trio formé avec le guitariste Steve Stevens et le producteur Keith Forsey fait désormais preuve d'une grande complicité et d'une complémentarité qui est à l'origine de ce mélange de leurs influences réciproques pour un résultat unique. L'énergie punk amenée par le maître des lieux, la virtuosité hard-rock et l'inventivité de Stevens, et le son amené à la fois du disco et de la new-wave par Forsey, donnent une musique unique à même de toucher un large public venant d'horizons semblant jusque-là inconciliables.
Le nouveau venu, intitulé "Rebel Yell" en hommage au bourbon dont raffole Keith Richards avec lequel Billy a eu l'occasion de traîner un peu, reprend donc la recette de son prédécesseur mais fait preuve d'une maturité démultipliée et d'un niveau de qualité maintenu de bout en bout. Il faut dire que la quasi-totalité des titres a été écrite de façon collégiale. Seul le popisant et narquois 'Catch My Fall', zébré par les interventions du saxophone de Mars Williams, a été composé seul par le blond peroxydé. Et si l'ensemble est d'une cohérence sans faille, la variété est pourtant de mise, allant de l'hymne hard FM du titre éponyme à la ballade synthétique et fantomatique de 'The Dead Next Door', sans que l'attention de l'auditeur ne puisse se relâcher la moindre seconde.
Il faut dire que les sommets ne manquent pas et qu'aucun temps mort ne vient les contrebalancer. 'Rebel Yell' ouvre les hostilités avec efficacité et donne l'occasion à Steve Stevens de faire une démonstration de son raygun effect obtenu en appliquant un jouet contre le micro de sa guitare, effet qu'il développera ensuite avec du matériel plus spécifique. Autre single, 'Eyes Without A Face', ballade sombre et angoissante en hommage au film d'horreur du même nom, voit une partie de son refrain interprétée en français par Perri Lister, compagne du chanteur et ancienne membre de groupes tels que Visage ou Kid Créole And The Coconuts, pour un résultat envoûtant et obsédant. Sur l'inquiétant et hypnotisant, 'Flesh For Fantasy', la voix grave ondule autour d'une basse ronde, de claviers froids et d'une guitare urbaine avant de lancer son attaque sur un refrain cinglant. Mais chaque titre mériterait d'être cité, parmi lesquels l'hymne à la vitesse 'Blue Highway', hard-rock rendu plus accessible par les claviers et dégainant un superbe solo sur son final, ou le punkisant '(Do Not) Stand In The Shadow' à l'efficacité directe et obsédante.
Avec "Rebel Yell", Billy Idol franchit, dès son deuxième album, les derniers paliers qui permette à un artiste de produire un album incontournable dans son genre. Si les intégristes de chaque style musical concerné trouveront forcement à redire au mélange unique réalisé par le chanteur et ses acolytes, tous les amateurs de pop, de rock, de hard, de new-wave ou de punk à l'esprit un peu ouvert, pourront se repaitre à volonté de cette orgie de titres variés et imparables.