Progressive Progression ressort coup sur coup deux albums de Traumhaus ''Die Andere seite''et ce ''Ausgeliefert'' agrémenté de quelques bonus. L'occasion nous est donnée de nous pencher sur le passé discographique de cette maison du rêve.
Les amateurs des groupes fleurons du néo progressif s'y retrouveront avec notamment deux claviéristes qui doivent vouer un culte à Mark Kelly de Marillion (leurs interventions entraînantes sur la première piste rappellent 'Incommunicado' sur ''Clutching at straws'', l'introduction de Peter und der Wolf penche plutôt vers ''Fugazi''). Si la langue de Kleist peut rebuter pour son caractère âpre ou rugueux, à aucun moment, la voix douce et mélodieuse d'Alexander Weyland ne fait ressentir ces qualificatifs. Elle apparait en tout début d'album assez fade
et peu assurée ('Aufwarts') mais elle prend rapidement son envol pour
culminer sur le sommet de l'album 'Zu spat' en évitant un registre théâtral trop prononcé.
Si le groupe sait prendre des accents mélancoliques et nous proposer des
ballades contaminées par la beauté de l'urgence ('Wandler' et son solo de clavier sonnant comme un Mellotron), cette émotion s'exprime également par la hargne des guitares tranchantes apportant une folie métal ('Peter und Der Wolf'). La piste éponyme débute paisiblement par un duo entre un piano et un synthétiseur, avant qu'un crescendo orchestré par la guitare, la basse et la batterie ne prennent le relais et apportent un peu de violence à un ensemble romantique qui menace d'exploser (l'apparition de la voix ne dissipera le danger). Un break au piano permet de souffler avant de nous conduire vers un solo de basse funky, ouvrant la porte à un poignant solo de guitare gilmourien tombé des cieux. Une autre réussite 'Am Abgrund' sonne plutôt comme du Gentle Giant avec ces choeurs polyphoniques. Si l'hommage apparait surprenant, il est néanmoins réussi et ne tombe pas dans le pastiche gratuit.
Nonobstant ces qualités, ''Ausgeliefert'' ne manquera pourtant pas d'ennuyer quelque peu son auditeur, la faute à une durée importante (77 minutes), avec d'autant plus des bonus conséquents (presque 18 minutes à eux deux) n'apportant rien de plus. L'écoute et la compréhension s'avéreront en outre difficile à ingérer d'une traite d'autant que la moitié de l'album est instrumentale et accumule certaines redondances.
On peut saluer l'ambition des Allemands à vouloir nous offrir des perles dignes du néo-prog, mais il est légitime de s'interroger sur le statut de leur travail. Est-ce un simple exercice d'hommage ou un tremplin leur permettant de dépasser le Zugspitze? La deuxième hypothèse est la plus crédible, mais l'album aurait été une réussite totale si son propos avait été plus concis malgré la générosité de ses apports.