Paru le jour anniversaire du huitième anniversaire du décès de Syd Barrett, le premier album de Garden Music Project est une collection de chansons inspirées par les peintures de l'artiste qui, faut-il le rappeler, fut un membre éminent et éphémère de Pink Floyd, le temps d'un premier album qui conservera une couleur psychédélique toute particulière et une place à part dans l'histoire du groupe. Initié par Adriana Rubio, auteur et compositeur de la majeure partie de l'album et qui s'est entourée pour l'occasion d'un assemblage de musiciens argentins, ce projet a pour trame le phénomène neurologique de synesthésie, dont elle est elle-même atteinte tout comme l'était Syd Barett, et qui permet d'associer deux ou plusieurs sens. Parmi les différentes catégories identifiées, certaines peuvent ainsi amener une personne à entendre des couleurs, à voir de la musique etc … Dans le cas présent, l'idée était de décoder les peintures de l'ancien guitariste du flamand rose en y associant de la musique lui rendant hommage.
Se plonger dans ce premier album de Garden Music Project (il semblerait que d'autres tableaux soient en cours de préparation), c'est effectuer un bond de plus de 45 années en arrière, aux sources de la musique psychédélique, avant qu'elle n'évolue franchement vers le rock progressif. Les sonorités de guitares et les vocaux évoqueront (un peu) les Beatles, et (beaucoup) le Pink Floyd des débuts, celui de The Piper at the Gates of Dawn et, dans une mesure moindre, Animals et Ummagumma.
Les titres courts qui composent cet album renvoient effectivement à l'unique album accueillant Syd Barrett en son sein, proposant des sonorités épurées avec peu d'effets sur les instruments et des mélodies faussement naïves. Elles évoquent bien entendu cet univers bien identifié, mais ce sont surtout certains plans qui sont carrément "repompés" et intégrés tels quels à ces nouvelles compositions. Squares, Lines & Polygons et Bridge rappelleront ainsi de bons souvenirs aux aficionados du flamand rose, tandis que Self Portrait reprend en intermède de ses couplets un des "refrains" de Interstellar Overdrive.
Et, histoire de pousser encore un peu plus l'hommage (ou le mimétisme ?), Garden Music Project s'aventure également sur les terres jadis explorées sur l'album studio d'Ummagumma, avec la présence d'un morceau instrumental expérimental (Transformation). Mais, au-delà d'une simple référence aux glorieux anciens, Garden Music Project finit par construire petit à petit son propre univers, intégrant de ci de là quelques plans de saxophone qui amènent une vraie personnalité à l'ensemble, ou encore une longue partie orientalisante en ouvert du titre le plus développé de l'album (Coliseum).
Alors même si l'ensemble ne brille pas par son originalité ni par son modernisme, il s'écoute néanmoins avec un certain plaisir, à condition de laisser son esprit divaguer et monter sans arrière-pensée à bord de la DeLorean pour un grand saut dans le passé. Une fois la conversion effectuée, et à défaut de déclencher une synesthésie de chaque instant, les 48 minutes de musique proposées par ce projet s'avèrent plutôt gouleyantes.