S’il y a bien une formation américaine emblématique de la Californie (alors qu’aucun des membres n’en n’est originaire), c’est bien les Eagles. Ce groupe, l’un des plus gros vendeurs de disques aux Etats-Unis, symbolise en effet une certaine idée du rêve américain faite de réussites mais aussi d’excès et de crises d’ego. En pratiquement 10 ans (de 1972 à 1980), les Eagles ont construit une carrière exemplaire, sorti des singles mémorables et au moins un chef d’œuvre unanimement reconnu (‘Hotel California’).
Mais revenons au début des 70’s, lorsque Glenn Frey et Don Henley rencontrent Randy Meisner et Bernie Leadon alors qu’ils se produisent en tant que backing band de Linda Ronstadt. Pour la petite histoire, le nom du groupe serait né durant une soirée arrosée (et pas que) dans le désert de Mojave, représentée en bas de la pochette dépliante de l’album, sous ce ciel bleu au soleil levant. Ils signent avec le nouveau label de David Geffen, Asylum Records et enregistrent leur premier album éponyme en Angleterre en seulement quelques jours sous la direction du producteur Glyn Johns (Steve Miller Band, Led Zeppelin, Family…)
D’entrée de jeu, tout est en place. Les harmonies vocales, la musique gorgée de soleil à la fois Country et Rock ce qui la rend accessible au plus grand nombre, les guitares à l’unisson et enfin le partage des compositions et des chants principaux par chaque membre du groupe. On comprend l’engouement pour ce groupe avec la composition 'Take It Easy' qui ouvre l’album. Composée par Glenn Frey et Jackson Browne, il s’agit d’un tube mélodique imparable (12eme au Billboard des singles pop en 1972) dans lequel le son clair des guitares se croisent et s’entrecroisent se mêlant habilement aux harmonies vocales impeccables des différents chanteurs. Le genre de morceau qui place un groupe sur de bons rails pour construire une carrière. 'Witchy Woman' composé par Don Henley est peut-être moins mémorable, plus Rock, mais la voix légèrement éraillée de son interprète principal fait des merveilles, toujours admirablement soutenu vocalement par ses camarades de jeu. On retrouve également les talents de vocalistes de Don Henley sur une autre composition de Browne, 'Nightingale', qui aurait pu facilement finir en single.
S’il y a bien un trésor caché dans ce premier album, c’est très probablement 'Earlybird' composé par Leadon et Meisner avec ses chants d’oiseaux en introduction et son incroyable mélodie au banjo. Oubliée des best-of, ce morceau est pourtant une vraie réussite apportant la touche d’originalité qui manque peut-être à cet album un peu trop formaté. Le dernier single 'Peaceful Easy Feeling' composé par Jack Tempchin (un chanteur-musicien qui va collaborer régulièrement avec le groupe) est un mid-tempo, chantée par Glenn Frey qui ouvre la voie aux nombreuses ballades dont le groupe va nous abreuver, parfois abusivement, à l’avenir ('Tequila Sunrise', 'The Best of My Love', 'Take It To The Limit').
‘Eagles’ est un album particulièrement marquant composé par un groupe déjà solide qui va entamer à partir de ce moment là, si ce n’est la conquête du monde, du moins celle de l’Amérique.