Un an après leur premier album, les américains de Styx récidivent avec un second opus baptisé simplement "Styx II". Malgré un écart temporel relativement court, les progrès effectués par le groupe sont significatifs, "Styx II" étant appelé à devenir un classique du groupe et contenant leur premier tube, 'Lady'.
A l'origine de ce bond qualitatif, on peut sans nul doute invoquer le fait que le groupe ait pris sa destinée en main. Contrairement à l'album précédent, tous les titres sont signés par des membres de Styx, à l'exception d'une reprise de Bach (le groupe aimera reprendre des classiques sur ses premiers albums : Copeland sur "Styx", Haendel sur "The Serpent Is Rising", Debussy plus tard sur "Crystal Ball"). On note également une forte prédominance de DeYoung (5 titres sur 7 sont de lui) et l'apparition des premières compositions de Curulewski, Young n'étant crédité d'aucune chanson.
Indubitablement, DeYoung a pris les rênes sur "Styx II" et impose sa vision musicale faite d'un glam rock "strass et paillette" proche de ce que transcendera Queen peu de temps après, auquel il ajoute des touches de poésie mélancoliques d'une grande beauté. Les deux premiers titres exposent à eux seuls cet univers, 'You Need Love', feu d'artifice où les instruments s'entrecroisent dans une virtuosité toute en décontraction, rivalisant avec la fantaisie de très belles harmonies vocales, et 'Lady', mélange de heavy et de chœurs angéliques, de délicatesse et de fougue et truffé de trouvailles.
Si 'Earl of Roseland' et 'I'm Gonna Make You Feel It' reprennent les mêmes ficelles avec un peu moins de bonheur, le diptyque 'Little Fugue In G/Father O.S.A.' est un autre temps fort du disque. La première, et courte, partie est une reprise d'une fugue de Jean-Sébastien Bach jouée par de grandes orgues, petit divertissement permettant à DeYoung de faire preuve de sa dextérité. La seconde partie, enchainée à la fugue, prend la forme d'un hymne découpée en plusieurs thèmes et se terminant par un long decrescendo, la musique s'éteignant lentement dans les enceintes, conclue par de très lointains accords de piano.
Les deux compositions de Curulewski ne souffrent pas de la comparaison avec celles de DeYoung. Si 'You Better Ask' est un petit rock rétro sans prétention rappelant ELO ou ELP dans le même genre d'exercice, 'A Day' s'impose comme un titre psychédélique et hypnotique de haute tenue renvoyant au Pink Floyd de la période planante. Par ailleurs, Curulewski possède un timbre agréable, ce qui ne gâte rien. DeYoung, dont la rondeur de la voix lui permet de communiquer chaleur et passion à l'auditeur, interprète presque tous les autres titres, ne laissant que le dernier en pâture à Young.
Avec le trio d'enfer ('You Need Love', 'Lady', 'A Day') ouvrant "Styx II", on est loin des tâtonnements maladroits du premier album, même si la suite est un peu moins inspirée. Qualité des compositions, virtuosité des musiciens à l'enthousiasme communicatif, fraîcheur des mélodies, fantaisie des chœurs font de "Styx II" une complète réussite.