Gonzo Multimédia a entrepris de retracer la carrière d'Hugh Hopper sous la forme de dix albums reprenant des enregistrements studios et live n'ayant jusqu'alors jamais été publiés.
Pour ceux à qui le nom d'Hugh Hopper n'évoquerait rien, rappelons qu'il s'agit de l'un des pères fondateurs de l'école de Canterbury aux côtés de Robert Wyatt, Kevin Ayers, Mike Ratledge et Richard Sinclair entre autres. Bassiste de Soft Machine jusqu'en 1973, il collabore durant les 35 années qui suivent à de nombreux projets : toute une déclinaison de groupes en "soft" en hommage à la machine molle (Soft Heap, Soft Head, Softworks, Soft Machine Legacy, Softbounds, Polysoft) mais aussi des expériences avec des musiciens moins britanniques comme Hopper Goes Dutch qui deviendra successivement The Hugh Hopper Franglo-Dutch Band lorsque le guitariste français Patrice Meyer s'immiscera dans le groupe hollandais puis The Hugh Hopper Franglo Band lorsque tous les musiciens autour d'Hopper seront français.
Si les noms de groupes changent, si les musiciens qui gravitent autour du bassiste évoluent, et si les expériences musicales qu'il traverse sont nombreuses, l'homme reste néanmoins fidèle à un jazz-rock parfois plus jazz que rock, parfois plus rock que jazz, tantôt composé, tantôt improvisé, et flirtant occasionnellement avec des expérimentations hardies et d'avant-garde.
Le premier de ces dix albums en donne un aperçu au travers des sept morceaux qu'il propose. Pas d'ordre chronologique ici, le fil conducteur semblant être de faire découvrir les différentes facettes des collaborations nouées par Hugh Hopper (le sous-titre de l'album s'intitule 'Many Friends'), notamment au sein de Soft Machine ('Memories', seul titre chanté de l'album par la voix diaphane de Robert Wyatt) et du Franglo Band (un titre studio, 'Was A Friend', et un live, 'Dabinaire').
'Memories', 'Was A Friend', 'Shuffle Demons' et 'Dabinaire' (partiellement gâché par le bavardage irrespectueux du public que l'on discerne au casque derrière la musique) sont autant de digressions virtuoses où l'intérêt tient plus à la sensibilité d'interprétation des artistes qu'à la trame mélodique proprement dite. 'Playtime', 'MGH' et 'Long Piece' nécessiteront plus d'ouverture d'esprit et de patience par leur caractère expérimental : le premier est une adaptation programmée par ordinateur, le second un aride duo basse/percussions improvisé et le dernier un collage de boucles instrumentales, de conversations diverses et de divagations d'un sax et d'un harmonium.
Bien sûr, il serait illusoire de vouloir résumer quarante-cinq années de carrière en si peu de titres et l'intérêt tient surtout à la rareté de ceux présentés ici. Mais l'album ne s'adresse pas exclusivement aux collectionneurs compulsifs et pourra intéresser tous les amateurs de jazz-rock sensibles aux vagabondages d'instrumentistes émérites.