Kalle Vilpuu, c'est l'histoire d'un artisan guitariste estonien, qui après avoir été au service des autres pendant une trentaine d'année, a considéré qu'il était temps pour lui de monter sur le devant de la scène. Il est d'usage dans un premier effort solo de présenter ses influences en guise de synthèse stylistique. Pourtant, notre géant vétéran, multi-instrumentiste de surcroit, n'hésite pas à faire valoir ses droits de musicien expérimenté en osant dévoiler une panoplie d'instruments proches du progressif des origines : violons, violes, flûtes s'y font entendre. 'Silver lining' sera t'il un album placé sous le signe de l'hommage ou un véritable tour de force ?
L'album se révèle un album concept instrumental centré autour de la venue possible et probable des aliens. L'auditeur est convié à un voyage spatial dès la piste d'ouverture qui ravira les cinéphiles avec l'utilisation sonore du générique de présentation des studios RKO Pictures (ce qui est logique, car le studio a produit des films de série B). Le voyage ne sera pas de tout repos car dès la première piste 'Anomalies', l'auditeur sentira planer une menace sourde qui éclatera dans une longue progression menée tambour battant par une guitare toujours sur le qui-vive, quasi hendrixienne et une basse étourdissante, tandis qu'un clavier fantomatique se charge d'apaiser le climat.
La trajectoire se fait à travers des paysages apaisants comme l'atmosphérique 'Trappings' avec ses bruitages technologiques, 'The touch of an angel et son chant monosyllabique, 'Rosie' et ses violons de velours. Ces ambiances sont parfois un peu plus poussives, lorgnant du côté du métal, avec 'Forgiven' et son pendant 'Unforgiven' couplés à une flûte qui peut rappeler Camel. Ajoutons à cela le feu d'artifices sonore que constitue 'In the back of my head' dans lequel Kalle Vilpuu fait montre de prouesses techniques à la guitare, le truculent 'The aliens (have landed) ou encore Industrial n.4 qui, comme son nom l'indique, tend vers le rock industriel . L'album renferme également une perle, 'Inferno', ciselée avec beaucoup de sensibilité, grâce à son chant hypnotique (pacifiste?) et ses impressionnants arpèges de guitare, avec à la clé une symphonie qui pourrait rappeler de grandes réussites instrumentales à l'image du travail de John Barry ("BO de Danse avec les loups").
Même si l'on peut regretter l'absence de paroles au profit de mélopées féminines universalisant le propos, 'Silver Lining' nous invite à lever la tête vers les étoiles, avec la promesse d'un long voyage enchanteur à écouter les yeux fermés...