"Les albums de Tagadas Jones se suivent et se ressemblent tous !"… C’est - en caricaturant un peu - ce que l’on entend de la part de certains auditeurs lorsque les bretons sortent un nouveau disque : il s’agirait toujours du même Rock hyper énervé et revendicateur, éructé avec conviction par un chanteur à la voix éraillé et un peu monocorde. Pourtant, ce "Dissident" se démarque un peu du lot.
En effet ce dixième album (décompte tout ce qu’il y a de plus personnel) semble avoir une saveur toute particulière du fait notamment d’un très gros son qui allie puissance et précision : les paroles bien que hurlées sont intelligibles et les instruments nous parviennent de manière bien distincte. Même la basse qui pointait habituellement aux abonnés absents, noyée dans le mur sonore du groupe, est ici bien identifiable et diablement efficace. Ajoutons à cela qu'un réel effort de diversification a été fait dans la continuité de ce qui avait été initié avec "Descente Aux Enfers".
Aux côtés de titres classiques pour le groupe, les Tagadas proposent ainsi des compositions capables de nous surprendre. C‘est le cas avec 'XXL', qui monte une facette un peu plus mélodieuse du groupe mais également avec l’excellent 'Vendetta', qui alterne parties syncopées, ponts calmes et gros riffs. Et que dire de 'Dernier Rendez-vous' qui célèbre l’alliance des guitares agressives de Tagadas Jones avec la voix plus soft de Guizmo (Tryo) si ce n’est qu’il constitue une petite oasis de fraicheur dans cette avalanche de riffs.
Quelques autres satisfactions peuvent être trouvées dans "Dissident" comme les très sensibles relents de Bérurier Noir sur 'De l’Amour Et Du Sang', et surtout 'Karim et Juliette' que ce soit au niveau du phrasé, des chœurs et des thèmes abordés. Ce dernier titre, sorte de clin d’œil à 'Hélène et le Sang' (Album "Concerto Pour Détraqués", des Bérus) est d’ailleurs proposé en Bonus avec la participation de Loran, actuel Ramoneur de Menhir et ex guitariste de Bérurier Noir. Il en va de même avec 'Skin Ou Keupon' qui fait revivre l’esprit burlesque et mutin des ineffables et oubliés Tulaviok ou bien avec le spontané 'I M Hungry' qui évoque Les Sheriff sous speed.
Tagadas Jones pratique toujours ce Punk Rock teinté de Hard Core excessivement véhément mais, lorsqu’il ne bourrine pas quand un dément comme c'est le cas sur 'Vivre' (auquel participe Vincent Peignart-Mancini, d’Aqme), il parvient à proposer une petite touche de finesse musicale qui lui permet de briser le cercle vicieux de la redite dans lequel il risquait de se cantonner. En combinant avec bonheur fidélité à leur style et velléités d'évolution, les Tagadas nous pondent là un album très réussi. Punk is not dead !