Membre de Citizen Cain dont il est le clavier et le principal compositeur, Stewart Bell s'offre une parenthèse en solitaire avec la publication d'un concept en deux parties, The Antechamber of Being, directement inspiré du livre The Cupboard of Fear dont il est l'auteur, et qui traite de la possibilité de prendre le contrôle de ses propres rêves afin de parvenir à un état de lucidité à nul autre pareil. Je laisserais à l'auditeur le soin de vérifier le bien –fondé (ou non) de cette théorie en parcourant les paroles de cette première partie (en attendant la seconde pour le dénouement !), et vais plutôt me concentrer sur la description musicale de l'objet.
Concernant la réalisation de l'œuvre, notre "musicien-qui-fait-tout-tout-seul" s'est tout de même entouré de quelques pointures vocales pour interpréter les différents personnages de son histoire, j'ai nommé ici les sieurs Simone Rossetti (The Watch) et Arjen Lucassen (de ses propres projets), ainsi que Mhairi Bekah Comrie, chanteuse du groupe de hard-rock écossais Grace & Legends.
L'album comprend ainsi 7 plages enchaînées, pour un total de 75 minutes de musique non stop, les titres les plus longs étant, comme dans le cas de Citizen Cain, découpés en de multiples parties. Et ceux qui connaissent déjà l'univers du groupe mené par le bassiste Cyrus ne seront pas dépaysés par le propos musical présent sur cette galette, où l'on constate une ressemblance plus que certaine avec les habituelles partitions du groupe d'origine de Stewart Bell : morceaux complexes à tiroirs, alternant des parties aux rythmiques et harmonies torturées, avec des passages plus consensuels et mélodiques, tout l'univers de Citizen Cain (et un peu plus) est bien présent ici, mais avec une cohérence bien supérieure, notre homme parvenant parfaitement à conserver une unité de ton en phase avec son sujet. On oubliera d'ailleurs très vite le traitement "technoïde" de 2 minutes de Decoherence qui pouvait laisser craindre le pire, mais qui s'avèreront heureusement sans suite.
Pourtant, la simple comparaison avec Citizen Cain ne suffira pas à décrire la musique ici proposée, en raison notamment de la présence des trois chanteurs qui, en collant tout d'abord à leurs personnages et à l'histoire, mais aussi en raison de leurs origines musicales, donnent une dimension en supérieure à un simple clonage des œuvres passées de Stewart Bell. Bien entendu, les parties chantées de Simone Rossetti s'accompagnent de belles ambiances "à la Genesis", et ceci se vérifie particulièrement sur A World Without Limits. Ses deux acolytes oeuvrent quant à eux dans des registres plus "hard", distillant quelques ambiances inquiétantes (The Breach !) ou carrément musclées évoquant bien entendu Ayreon, la guitare se faisant alors un plaisir de les accompagner dans cet univers plus musclé. Au final, l'alternance de ces trois caractères colle parfaitement à l'univers opéra-prog voulu par son concepteur, et les 75 minutes défilent sans que jamais lassitude ne survienne, plongeant au fur et à mesure l'auditeur au cœur de l'histoire, dans une ambiance quelque peu spéciale et envoûtante, les dernières mesures de Full Circle reprenant les premières de Decoherence, et incitant ainsi à une reprise du voyage jusqu'à plus soif.
Œuvre très riche, The Antechamber of Being offrira de multiples écoutes passionnantes, faisant voyager l'auditeur de Genesis à Ayreon en passant bien évidemment par Citizen Cain, ce qui avouons-le représente une belle brochette de références et devrait ainsi contenter nombre de passionnés. Il ne reste plus qu'à savourer cette belle œuvre … le temps de patienter jusqu'à la sortie de sa suite ?