Nonobstant encore quelques belles et récentes réussites, force est de reconnaître que les grandes heures du Post-hardcore sont désormais derrière lui. De fait, tout semble avoir été dit par les Neurosis, Isis et autre Cult Of Luna il y a plus de dix ans maintenant. Tout ça pour dire que si le genre en a encore sous la semelle, il ne déclenche plus guère de frissons sauf chez quelques irréductibles que des miettes suffisent à rassasier.
La (bonne) surprise vient de là on ne l'attendait pas, du côté de Montpellier, berceau de Under The Sun qui, en quatre titres, réussit l'exploit de nous faire dresser les poils (entre autre) de plaisir. L'écoute lancée, le sentiment d'avoir à faire à quelque de chose de lourd (on s'en doutait), de grand (c'était moins évident), ne tarde pas à s'immiscer dans notre esprit.
Les mesures ouvrant 'Initium', désespérés préliminaires longs de près de neuf minutes, laissent ainsi augurer d'entrée de jeu l'orgasme à venir, jouissance que l'on imagine de prime abord instrumentale et d'une beauté sourde et douloureuse, qui sont les principaux traits de cette piste tout en progression dont l'entame feutrée cède peu à peu la place à une tension ramassée. Les guitares y tissent des lignes aux allures de câbles d'une absolue tristesse.
Si le second, la beauté sourde et douloureuse donc, se poursuit tout du long de cet opus éponyme et séminal, il n'en va pas de même du premier quand bien même le chant, (forcément) énervé et tuberculeux, s'efface bien souvent pour laisser les instruments étendre un maillage d'une puissance émotionnelle aussi apocalyptique que contemplative.
Une des grandes forces de ce groupe et de cet album réside dans cette faculté aussi rare que précieuse de ne jamais vraiment emprunter la direction attendue, de préférer la sinuosité à la linéarité, qualité admirablement illustrée par 'Burst In Dawn'. Le titre s'ouvre sur quelques accords d'un triste éclat que n'aurait pas renié le Anathema période "A Fine Day To Exit". Puis brusquement, le ton se durcit, avant de renouer avec la délicatesse originelle, laquelle est ensuite définitivement balayée par un déchainement des éléments, entre voix énervée et roulements de batterie. Troisième changement d'ambiance avec son épicentre instrumentale où les guitares s'envolent très haut tout en conservant leurs atours cendreux. Enfin, le chant reprend ses droits lors d'une dernière partie dont la fureur s'accouple à un désespoir inexorable.
Pulsation tumultueuse et dynamique, 'Anubis Path' ne manque pas non plus de surprendre notamment lorsque les musiciens tricotent de longues minutes durant des instants comme suspendus dans le temps. Rythmique hypnotique et six-cordes bouleversantes fusionnent en un magma progressif. Le terminal 'Scars Of Life' est fait du même bois, à la fois stratosphérique et tempétueux, rugueux et délicat, quand bien même il se révèle un (très léger) cran en-dessous de ses superbes devanciers.
Bloc indivisible, il est fortement permis de considérer "Under The Sun" comme un des meilleurs albums que le post-hardcore nous ait offert depuis bien longtemps. Le groupe s'ouvre grâce lui une véritable autoroute vers une reconnaissance franchement méritée.