Après trois albums dont les deux premiers, "Climbing !" et "Nantucket Sleighreide" sont aujourd'hui considérés comme des pierres angulaires du hard rock naissant, Mountain se saborde en 1972. Très vite, son chanteur et guitariste, Leslie West, met en branle un nouveau groupe. Pour l'accompagner, il n'a pas à chercher bien loin en embauchant derrière les fûts son ancien compère au sein du défunt, Corky Laing.
Désireux de collaborer de nouveau avec un bassiste/chanteur à la voix aussi douce que la sienne est rugueuse, comme c'était le cas avec Felix Pappalardi, l'homme a l'idée géniale de s'associer à Jack Bruce resté discret depuis le split de Cream survenu trois ans plus tôt. Afin de ne tromper personne, le projet aux allures de super-groupe décide de s'appeler tout simplement West, Bruce & Laing.
Deux rondelles ainsi qu'un live naîtront de cette éphémère alliance. "Why Dontcha" est la première d'entre-elle. Ceux qui espèrent y croiser une resucée de la légende britannique ne la trouveront pas (vraiment) car le power-trio porte avant tout la marque hargneuse des ex Mountain. Pour autant, West, Bruce & Laing ne saurait être perçu comme une simple copie de son aîné dont il est néanmoins l'évident successeur. Il est à la fois plus brutalement bluesy, plus sec et l'opposition entre les deux tessitures vocales avec en corollaire des titres très nuancés tour à tour durs ou plus délicats, n'est pas seulement affirmée mais amplifiée.
D'une certaine manière, on peut voir "Why Dontcha" comme une lutte - amicale - entre les deux facettes du groupe. D'un côté, des brûlots trapus et assez sauvages pour l'époque, tels que le morceau éponyme aux lignes accrocheuses, 'The Doctor', chanté par Corky et pollué par une slide démoniaque qui prendra toute sa démesure en live, sans oublier 'Love Is Worth The Blues', lente et lourde pulsation au feeling poisseux qu'enjambe un pont instrumental orgasmique.
De l'autre, des perles raffinées (em)portées par la grâce de Jack Bruce. Le très beau 'Out Into The Fields' et ses choeurs magnifiques, 'While You Sleep' et 'Pollution Woman', nappé de nappes de synthétiseurs, alternent ainsi avec les décharges libérées par la guitare déglinguée de Leslie toujours prête à sortir ses griffes ('Third Degree').
Grand disque donc et grand succès à l'époque, "Why Dontcha" sera l'occasion pour ses auteurs de briller sur scène ("Live n' Kickin'" en témoignera) avant de lui offrir un successeur plus inspiré encore, "Whatever Turns You On"...