Est-ce la géographie contrastée de leur ville d’origine Wollongong entre océan et montagne qui est à l’origine du grand trouble qui agite les musiciens de Troldhaugen ? Après un premier album d’inspiration baroque en 2012 le quartet déjanté australien sort un "Obzkure Anekdotez For Maniakal Massez" sur l’excellent label Bird’s Robe dans la même veine heroï-comico-extremo-avant-gardiste que son prédécesseur.
Bien que de durée très raisonnable avec moins de 40 minutes de musique, cet album peut paraitre une éternité aux estomacs les moins vaillants. Alternativement dépaysement radical et aventure auditive éprouvante "Obzkure Anekdotez For Maniakal Massez" est au rock ce que le banquet médiéval est à la gastronomie, une expérience débridée, excessive et roborative. Sorte de potion dans laquelle on retrouverait les ingrédients entrant dans la composition des musiques de 6:33, Devin Townsend, Bumblefoot et Diablo Swing Orchestra fortement relevées aux épices chères aux trolls festifs ou finnois, Troldhaugen puise aussi dans les ambiances cinématographiques d'épouvante proches de Danny Elfman.
Une dizaine d’écoute n’est pas suffisante pour se familiariser avec la complexité et l’exubérance du métal-folk farfelu, comme aime à se définir le groupe. Si cette définition est bien le mètre étalon principal de la musique comme du chant de "Obzkure Anekdotez For Maniakal Massez", les australiens aiment à surprendre en allant puiser dans le western (‘The Good, The Bad And The Gristle’), la folk mélangée à la dance-disco hantée (‘Lefty’s Wild Ride’ résume tout cela) et l’orchestration qui groove (‘The Rabiator Teuthida’). Summum de l'improbable qui restera dans les an(n)ales ‘Viva Loa Vegas’ aurait pu être la version orgiaque et troldhaugienne du haka si le morceau ne finissait pas sa course en feux d’artifice techno !
On connaissait l’Australie fertile en groupes alternatifs et progressifs, on peut désormais y ajouter le métal avant-gardiste et extrême. Les musiciens de Troldhaugen sont tombés dans la même marmite que Toehider mais les bougres s’y sont baignés jusqu’à l’ivresse. Le résultat est époustouflant de maitrise technique et d’inventivité mais parfois exténuant à comprendre ou simplement à suivre.