Avec "Alpha Noir/Omega White" en 2012, Moonspell avait proposé un double album dont l'ambition était d'opposer les deux faces de sa personnalité, l'une agressive, l'autre plus posée. Mais cet ambitieux concept
avait trouvé ses limites. Séparer en deux l'identité de Moonspell
était une idée risquée tant la force du groupe portugais réside
justement dans sa capacité à mélanger ses influences.
Avec "Extinct", son 11ème album, le groupe revient à un format classique et évite
l'écueil de la redite en faisant
évoluer sa musique et se réinventant pour offrir un disque
sublime. En effet, Moonspell ralentit le tempo
métallique qu'il avait exploité ces dernières années pour revenir
à un son plus proche de l'époque "Darkness And Hope" et son caractère gothique et mélancolique. Mais le groupe mêle à cette facette de sa musique une rythmique puissante. La mise en avant
d'influences orientales et de passages au piano achèvent de
rendre prenant ce disque doté d'une beauté sombre.
Ce mélange prend forme dès
l'entame avec un 'Breathe' délicieux qui regroupe toutes ces
qualités, où le chant se fait à la fois séduisant et rude.
Musicalement, l'ensemble est délicat, les passages orientaux
sont splendides et les riffs plombés. Dans
cette même optique, 'Medusalem' est formidable tant elle combine bien
métal gothique et métal oriental proche d'un Orphaned Land, le tout
porté par la voix très pure de Fernando Ribeiro.
Pour la suite, le groupe propose des
titres puissants dans l'esprit de ses disques récents avec 'Extinct'
et 'A Dying Bride', mais toujours avec cette finesse nostalgique au
rendez vous. Surtout, il se surpasse dans les titres
mélancoliques qui donnent au disque un grand supplément d'âme. Ainsi, le très beau 'Domina', tout en retenue est porté par un
refrain et un riff qui donnent le frisson. Il y a aussi de véritables
tubes de métal gothique qui rendent la tristesse si belle, comme notamment 'The Last Of Us', 'Malignia' et surtout
un 'Funeral Bloom' énorme par son ton à la Sister Of Mercy sur les
couplets. Moonspell touche même au sublime avec le très mélancolique 'The Future Is Dark' et son solo atmosphérique dont l'ambiance nous rappelle l'esprit du "Paradise Lost" de Draconian Times.
Enfin, Moonspell finit de nous surprendre avec 'La Baphomette', chanté
en français. Ce titre essentiellement joué au piano est une petite
perle sombre ourlée d'un sentiment décadent délicieux et
prenant.
Beau, majestueux et
empreint d'une profonde sensibilité, "Extinct" est un
très grand cru d'un groupe attachant. Moonspell nous propose un
disque qui devrait figurer au panthéon de son œuvre et même au
sommet des meilleurs disques de métal gothique. Cet album, à
savourer sans modération, s'affirme comme un candidat sérieux au
titre de disque de l'année.